Opinion

Les lundis de Madiambal Diagne: La France ne mérite pas ce qui lui arrive


Lundi 18 Juillet 2016

Nous ne pourrions dire certainement rien de nouveau. On ne peut plus s’indigner plus qu’on ait déjà eu à le faire. Encore un acte lâche et ignoble, commis prétendument au nom de l’islam ! L’attentat du 14 juillet 2016 à Nice est sidérant. Ils sont nombreux, les citoyens français de confession musulmane ou d’origine musulmane à dire leur honte. La France ne mérite pas ce qui lui arrive. C’est l’un des pays occidentaux les plus ouverts, les plus intégrateurs et peut-être les plus portés vers la tolérance religieuse. La société française n’est pas un modèle achevé de cohabitation de peuples avec des cultures différentes. Mais au nom du principe fondateur de la laïcité de la République française et de son triptyque «Liberté, Egalité, Fraternité», la France reste un pays séduisant, un exemple qui demeure, encore une fois, imparfait dans une Europe qui a tendance à se recroqueviller sur elle-même.


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La France se donne assez de peine pour contenir la montée de la xénophobie, mais il faut dire que les actes perpétrés par des personnes d’origine étrangère et spécialement musulmane constituent le terreau d’une extrême droite ringarde. La France ne connaît sans doute pas tous ses fils et filles comme l’a chanté Soprano, mais est-ce que tous ses fils et ses filles cherchent à la connaître, à l’aimer, à vivre en paix sur son sol et à participer à la développer ? La France semble payer le prix fort pour son ouverture et elle peut s’estimer trahie. C’est parce qu’il y a plus de liberté, plus d’égalité et plus de fraternité en France que les parents des assassins de plus de 275 personnes, durant ces derniers mois, sur le sol français dans des actions de terrorisme islamiste, ont quitté leur Tunisie, leur Maroc, leur Algérie, leur Mali ou leur Sénégal natal pour aller chercher une vie meilleure en France. Donc, la France meurtrie et éplorée peut bien se sentir trahie par ses fils et filles, les descendants de ceux qui lui doivent, tant soit peu, plus de liberté et de dignité sociale.

Qu’est-ce que ces dizaines d’enfants joyeux sur la «Promenade des Anglais» à Nice, émerveillés par les feux d’artifice, un soir du 14 juillet, avec leurs parents ou grands-parents, ont commis comme crime contre l’islam ou son prophète ? Il était arrivé que des personnes eurent trouvé compréhensibles les attaques contre le journal satirique français Charlie Hebdo le 13 janvier 2015. Que disent-elles maintenant de ces nouveaux crimes contre l’humanité ? Qu’est-ce que les fidèles qui prient dans la Mosquée du Prophète à Médine ont-ils commis comme blasphème ou outrage à l’égard du Prophète pour voir ce lieu être foudroyé par des bombes de kamikazes se réclamant de l’Etat islamique ? Les auteurs des attaques ne sont jamais sortis d’une université ou d’un institut de théologie islamique. Ce sont systématiquement des repris de justice, des drogués et trafiquants de drogue, des braqueurs de banque, des personnes en déviation sociale qui prétendent être des soldats de Dieu. Quel est ce Dieu ou quelle est cette religion qui seraient fiers de tels disciples et surtout qui accompliraient leur foi dans le sang de leurs victimes innocentes après s’être saoulés d’alcool ou de drogue ? Ces «fous de Dieu» font d’ailleurs le plus de victimes dans les rangs de leurs coreligionnaires. 
Ce qui est arrivé à Nice pouvait l’être partout à travers le monde. Tout le monde pouvait être victime : le touriste, le citoyen français, le citoyen du monde comme ces passagers d’un avion de ligne régulière qui vaquaient à leurs occupations et foudroyé en plein vol par une bombe dissimulée dans une canette de boisson ou par un missile ; comme ces travailleurs foudroyés dans un métro à Londres, à Madrid, à Bruxelles, à Paris ; comme ces supporters qui allaient suivre un match au Stade de France ou ces personnes qui regardaient un spectacle au Bataclan ou qui étaient attablés à un café ou un restaurant ; comme ces clients d’un hôtel à Bamako (Mali) ou d’une terrasse de café à Ouagadougou (Burkina Faso) ou ces baigneurs de la plage de Grand Bassam (Côte d’Ivoire) ou de Djerba (Tunisie). Manger à un restaurant, s’attabler à un café, se promener au bord de la plage, voyager dans un avion, un train, un bus ou marcher dans la rue ou loger à l’hôtel ou prier dans une mosquée constitue un blasphème ou une insulte au prophète.
Ces actes vont se répéter fatalement et seront de plus en plus violents. Une certaine forme d’exaltation de groupe pousse ces tueurs déshumanisés à agir de manière effroyable et leur idéologie religieuse les présente comme des «martyrs» et donc des exemples à suivre par des abrutis de leur acabit. 
La France est restée stoïque et digne. Elle continue à être agressée de façon récurrente parce que sa vulnérabilité est due simplement au fait qu’elle s’est voulue plus regardante que de nombreux pays sur les libertés et les droits des personnes sur son sol.
La France n’a pas fait plus que d’autres pays dans la lutte contre le terrorisme international. D’ailleurs, l’aurait-elle fait que ce serait à son honneur. Elle s’est acquittée dignement et avec responsabilité de sa part dans le combat contre cette gangrène qui menace l’humanité. C’est peut-être trop vous demander, mais «Douce France», ne changez pas, malgré tout !


Abdoul Aziz Diop