Senxibar

LE SENEGAL ET LA CAN 2012 : Les «raisons» d’une défaite, selon Gérard Dreyfus


Lundi 13 Février 2012

1972-2012. 40 ans de football africain. Notre confrère Gérard Dreyfus pèse huit coupes du monde avec des équipes africaines, 17 Coupes d’Afrique des nations. Décoré au mérite d’or par la Confédération africaine de football, cet ancien de RFI, revient dans un entretien exclusif avec l’Envoyé Spécial de Sud Quotidien sur la déroute des «Lions» à Bata.


Autres articles
SENXIBAR- «Le football africain ne se joue pas en Europe. Il faut qu’on intègre bien cette idée. Il faut penser à développer le football au Sénégal», a d’emblée déclaré Gérard Dreyfus.

Et d’ajouter : «je crois qu’il faut même revoir le terme binational. Les joueurs doivent s’impliquer totalement. Quand on me dit qu’il y a un joueur qui est allé signer un contrat alors que l’équipe était en regroupement (le cas de Papiss Demba Cissé qui est allé signer à Newcastle, Ndlr). Quand on me dit que pendant la compétition, un autre est allé signer un contrat (le cas de Moussa Sow, parti de Bata pour signer un contrat avec Fenerbache, Ndlr). Je dis que ces joueurs ne sont pas concernés par la coupe d’Afrique des nations».

Des actes qu’il considère comme un manque d’implication de la part des joueurs susmentionnés. «Moi, je ne veux que des joueurs qui sont concernés par la Coupe d’Afrique des nations ».
«Potentiellement, le Sénégal a une grande équipe mais il faut plus d’implication personnelle de la part des joueurs. Il faut être Africain ; ne pas penser Europe, ne pas penser carrière etc. Il faut penser équipe nationale», souligne l’ancien Chef de Service des Sports de RFI.

Se refusant de donnant des conseils, Gérard Dreyfus déplore toute de même la précipitation avec laquelle la Fédération sénégalaise de football s’est séparée de Amara Traoré. «On s’est précipité pour retirer l’entraîneur. Mais, je rappelle que c’est cet entraîneur qui avait qualifié l’équipe dans un groupe très difficile, composé du Cameroun et de la RD Congo», regrette-t-il.

Et de poursuivre : «Chacun réagit à sa manière. Je comprends certaines choses après les trois matches, trois défaites». «Mais, s’empresse-t-il de préciser : si j’étais décideur, je serais curieux de comprendre dans quel état d’esprit, ils (les joueurs, Ndlr) étaient. Il ne suffit pas de paraitre pour gagner. Non ! Il faut une application».

«Les Ivoiriens ont été comme ça, ces dernières années. Ils se sont demandés pourquoi ils ont échoué ? Mais peut-être, c’est parce qu’ils n’étaient pas suffisamment concernés. Le discours a été : l’Europe, l’Europe, l’Europe ou mon club, mon club, mon club. Or, l’Afrique, c’est autre chose. C’est pour cela que j’ai dit que la CAN ne se joue pas en Europe. Si vous voulez jouer en équipe nationale, mettez vous au diapason. Il faut éviter les états d’âme et les égos trop développés. Souvenez vous où est ce que vous avez appris à jouer au football ? Vous devez être un exemple pour cette jeunesse. Conduisez-vous en exemple dans le terrain et en dehors du terrain. La Can, c’est la joie, c’est du bonheur, c’est la liberté. C’est aussi une manière de vous replongez dans vos sources», fait-il remarquer.

Gérard Dreyfus dira également «le Sénégal n’a pas perdu brusquement». «J’aurais fait un audit. Je vais rencontrer chaque joueur, séparément. Je ferais de la même manière avec l’encadrement technique. Je ferai une analyse pour comprendre qu’est ce qui s’est passé pour qu’on ait eu un blocage. A partir de là, on essaie de tirer des conclusions».
Parce qu’estime-t-il, «il ne faut pas tout détruire. Ça avait causé beaucoup de tort au Sénégal en 1986. On a mis beaucoup de temps à reconstruire».

«Et puis, souligne-t-il, il y a trop de sous-entendus politiques au sein de l’équipe nationale du Sénégal. Je ne crois pas que la remise du drapeau soit une grande nécessité. Quand vous êtes politiques, récupérez les victoires après. Mais ne vous engagez pas trop en amont parce que c’est trop dangereux».

Moussa Sarr