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France : haro sur le halal


Lundi 20 Février 2012

La viande halal française est au cœur d’une nouvelle polémique depuis que Marine Le Pen a dénoncé lors de la convention présidentielle du Front national samedi 18 février le fait que toute la viande consommée en Ile-de-France était halal. Les professionnels de l’alimentation et de la viande réfutent ses accusations. Ce n’est pas la première fois que le halal est sujet à débats.


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C’est lors d'une réunion politique que la question de la viande halal a ressurgi. Samedi 18 février, tandis qu’elle prononçait un discours à Lille, la présidente du Front national Marine Le Pen a affirmé que la viande distribuée en Ile-de-France était exclusivement halal, et ce à l’insu du consommateur. Elle a par ailleurs soutenu que « tous les abattoirs d’Ile-de-France vendent du halal, sans exception ».
Ses propos font suite à la diffusion jeudi d’une enquête sur le marché de la viande dans l’émission Envoyé Spécial sur France 2. François Hallepée, directeur de la Maison de l’Elevage d’Ile-de-France, une association d'éleveurs, y déclarait que les abattoirs de la région « abattent tous selon le rite musulman, donc 100% de l’abattage est halal en Ile-de-France ».
Confusion
Mais abattage 100% halal ne signifie pas forcément distribution 100% halal. « Dire que toute la viande commercialisée à Paris ou en région parisienne est d’origine halal, c’est absolument faux », a ainsi martelé sur France Inter Dominique Langlois, président de l’Association nationale interprofessionnelle du bétail et des viandes (Interbev).
Des propos confirmés par Pierre Halliez, directeur général du Syndicat des entreprises françaises des viandes : « Les tonnages abattus en Ile-de-France sont minimes » et ne fournissent que « de manière extrêmement minoritaire, voire insignifiante », les enseignes de distribution de la région, a-t-il affirmé à l’AFP. D’après lui, la production des abattoirs d’Ile-de-France est inférieure à 5 000 tonnes par an alors que la consommation de viande de boucherie dans la région est au moins de 200 000 tonnes. L’essentiel de la viande vendue en région parisienne est ainsi originaire des grandes régions d’élevage.


Une réalité à laquelle Frédéric Feund, directeur de l’Oeuvre d’assistance aux bêtes d’abattoir (OABA), apporte cependant une légère nuance : « Le problème, c’est que ces viandes (halal) ne se retrouvent pas toutes dans les circuits de distribution halal. Du coup, le consommateur mange à son insu des viandes issues de l’abattage rituel juif ou musulman ». Sur ce point, le ministère de l’Alimentation, de l’Agriculture et de la Pêche, estimait déjà en 2009 que « certaines parties de la carcasse de ces animaux peuvent être mises dans le circuit traditionnel lorsque l'offre de certains morceaux de viande halal ou casher est supérieure à la demande ». Un principe religieux sujet à débats
Ce n’est pas la première fois que le marché de la viande halal se retrouve au cœur d’une polémique. En février 2010, la même Marine Le Pen avait déjà fustigé une initiative mise en place par la chaîne de restauration rapide Quick qui proposait uniquement des sandwichs halal dans huit de ses restaurants français (sur plus de 300). « Ceux qui ne veulent pas manger halal n’auront même pas le choix. Je trouve cela inadmissible », s’était-elle emportée sur le plateau de Canal +. Quelques jours plus tard, un groupe d’identitaires affublés de masques de cochon avait investi un Quick halal  de la banlieue de Lyon.
Ce combat contre le halal n’est pas l’apanage des militants d’extrême-droite. Début 2011, six associations de défense des animaux avaient lancé une vaste campagne d’affichage dénonçant des pratiques d’abattage moyenâgeuses. Car si l’abattage traditionnel des animaux fait depuis 1964 l’objet d’une réglementation ordonnant un étourdissement préalable, ce n’est pas le cas de l’abattage rituel. Pour que la viande soit halal, l’animal doit en effet être égorgé conscient, la tête tournée vers la Mecque, pour qu’il se vide de son sang. D’après un rapport  de l’Institut national de la recherche agronomique (INRA) publié en 2009, l’agonie des bêtes abattues selon la technique rituelle peut durer jusqu’à quatorze minutes.
Deux propositions de loi avaient été déposées fin 2010, au Sénat et à l'Assemblée nationale, pour obtenir un étiquetage spécifique des viandes abattues sans étourdissement. Si celles-ci n’ont pas abouti, un nouveau décret  promulgué le 29 décembre 2011 doit réglementer le marché du halal. Il oblige les abattoirs français à demander une autorisation préfectorale pour pouvoir abattre leurs bêtes sans étourdissement préalable. Celle-ci ne sera délivrée qu’ « à raison de commandes commerciales le justifiant ». Un rapport des ministères de l'Agriculture et de l'Intérieur réalisé en 2005 révélait en effet que 80% des ovins, 20% des bovins et 20% des volailles seraient abattus en France selon le rite halal. Ce décret doit entrer en vigueur le 1er juillet 2012.
RFI.FR

Abdoul Aziz Diop