Opinion

Edito de Seneplus: Transhumance politique, la triple violence- Par Momar Seyni NDIAYE


Jeudi 4 Janvier 2018

Au fur et à mesure que l’on s’approche de mars 2019, les défections de l’opposition vers la majorité iront crescendo - Ce changement de prairie sera servi avec la même désinvolture, le même verbatim, et… sans sourciller


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Le nouveau transhumant Sada Ndiaye, pourtant jusqu’ici grosse pointure du PDS,  vient d’en donner le la. Le cycle infernal du « broutage » poursuivra sa cadence spirale jusqu’aux dernières heures de mars 2019 période fatidique de l’élection présidentielle.  Il faudra bien hélas, que les Sénégalais s’y préparent le cœur très bien attaché. Au fur et à mesure que l’on s’approche de mars 2019, les défections de l’opposition vers la majorité iront crescendo. Ce changement de prairie accompagné de la litanie justificatrice habituelle sera servi avec la même désinvolture, le même verbatim, Et… sans sourciller.
         
Souvenons tout de même de quelques séquences du sinueux parcours de Sada Ndiaye. Juste quelques points de repères pour remarquer que celui qu’on appelait dans les années 80, le « préfet rouge», ayant semble-t-il flirté avec le maoïsme, s’illustrait brillamment par ses sorties fracassantes contre le modèle de décentralisation, qui faisait des gouverneurs de région "des régnants, et des présidents de Communautés Rurales, de véritables Lamanes". Ses combats épiques contre Madieng khary Dieng, « gouverneurs des gouverneurs » aux  accents et allures aristocratiques, lui avaient valu des marginalisations administratives, mais aussi l’estime d’hommes libres et indépendants d’esprit, hostiles et réfractaires au diktat de l’establishment dioufiste.    
        
Administrateur civil, docteur en droit et haut fonctionnaire adulé, il rejoignit le Parti socialiste avant de déposer, à la surprise générale, son baluchon au PDS non sans raccourcis explicatifs rocambolesques. Ministre et député de Wade, il entrera dans l’Histoire des horreurs parlementaires avec cette fameuse loi qui aura permis l’éviction de l’actuel Président de la République du Perchoir. Les qualificatifs qui avaient accompagné  (et encore dans une période récente) son triste argumentaire résonnent encore dans nos oreilles comme l’expression d’une ignominie sans nom.

Six ans, après on attend avec impatience, le registre de orthographier qu’il utilisera pour  tisser des lauriers à celui sur qui il avait jeté l’opprobre hier. Non pas que l’actuel président ne les mérites pas. Mais parce que tout simplement, la parole de Sada Ndiaye a perdu son sens et sa valeur. La transhumance, produit en réalité trois souffrances. Une première, celle que se fait le transhumant lui-même, contraint au reniement et au délitement moral dans une société où les valeurs, le sens de la parole donnée comptent encore beaucoup.
           
La seconde, celle qu’on fait à ses proches  de voir cet icône dont on était si fier, renoncer à toutes ses valeurs séculaires, pour « brouter » ailleurs. Et enfin, celle qu’on fait à ceux qu’on rejoint, eux-mêmes, obligés de s’accommoder d’un hôte désincarné et si encombrant. La contrainte, dit-on, crée l’art. Le transhumant s’estimera toujours contraint au renoncement de ces principes et croyances. C’est son art de vivre et d’être que de se résigner à une perpétuelle logique de reniement et de souffrances à faites à la société en général. Dans notre écosystème, la transhumance est devenue un art consommé que le Président Macky Sall  avait raison, à l'époque, de péjorativement qualifiée.
   
En voyant Sada Ndiaye à ses côtés, il serait bien avisé de ne pas brandir avec délectation ce trophée de guerre. Un transhumant est un voyageur en constant transit, qui, du salon d’honneur scrute le prochain aéronef pour une autre destination toujours plus juteuse.


Abdoul Aziz Diop