Opinion

Décret présidentiel pour la Corniche : Trop tard !Par Charles FAYE


Vendredi 19 Aout 2016

Le Président Macky Sall a pris un décret en juillet dernier soumettant à autorisation spéciale la cession de droits sur des immeubles domaniaux nus sur la corniche de Dakar jusqu’aux Mamelles. Désormais toute transaction sur l’un des plus beaux tronçons de la côte ouest du continent africain devra être passée au crible à la primature du Sénégal. Voilà une nouvelle qui plait semble-t-il, faisant même la Une des sites d’information du pays ce vendredi 19 août, mais au regard de ce qu’est devenue la corniche, cette balafre hideuse qui a défiguré l’un des plus beaux et recherchés patrimoines du pays, on ne peut que regretter que cette décision soit tombée au crépuscule des gâchis le plus souvent provoqués par ceux-là même qui ont aux confisqué aux Dakar leur vue sur mer.
Certes, d’aucuns sauteront de joie, s’écriant : « Enfin, le Président Macky Sall nous a entendu ». Soit.
« Mais, et après, leur rétorquerions-nous ».
Pour avoir la mer en face des yeux embués de larmes par le piteux spectacle qu’offre cette corniche bouffée par la boulimie foncière, on pourrait ajouter que la décision pourrait être encore beaucoup plus courageuse au point de traduire, pourquoi pas, la vision d’un Dakar nouveau et moderne porté par l’ambition affichée, volontaire et concrète de la smartcity qu’il doit devenir dans les meilleurs délais.
Quand une ville présente autant d’offrandes naturelles, concentre à elle seule près de 80% de l’activité économique, soit plus de 50% du PIB, regroupe plus de 3 millions d’habitants, près de 25% de la population du pays, on ne peut pas ne pas avoir une politique spécifique propre à Dakar prenant en compte la réalité économique, politique, culturelle, sociale, sportive, sanitaire, éducative, du don de Dieu.
Oui ! Dakar est un don de Dieu.
Il n’est d’étranger qui ne soit tombé amoureux de ce trésor. Seul des Sénégalais bon teint ont manifesté autant de mépris à l’offrande naturelle et peu d’égard au projet de développement qui aurait dû pourtant s’inscrire dans l’ordre naturel de la prise en charge des questions évidentes et ambitions évidentes de Dakar et Dakarois.
Qu’a-t-on fait de la mythique Place de l’Indépendance ? Quelles photos prennent nos enfants de notre très beau Palais présidentiel construit face à la mer et réceptionné en 1907 ? Que savons nous de ce bâtiment baroque historique qui tient de nom Gare ferroviaire. Qu’avons nous fait pour ajouter et vendre à nos enfants et nos hôtes les bonheurs des yeux que sont le Musée de l’Ifan et ses plus de 10 000 oeuvre artisanales, le marché Sandaga, le marché Kermel, marché Tilène, la Médina, la Grande Mosquée, la Porte du Millénaire, le Parc de Hann, la Cathédrale du Souvenir africain, le cimetière catholique de Bel Air, enfin Gorée, l’île Madeleine, l’île de Ngor, Soumbédioune, les Mamelles, les plages Anse Bernard, de l’Enfant, Virage ?
Qu’ont fait bon nombre d’hommes politiques sinon acheter des terres sur le littoral pour s’offrir des villas de folie sous les regards consternés de leurs compatriotes quand ils n’ont pas, le plus simplement du monde et sans aucun remord, donné leur accord pour la prédation de la Corniche sur laquelle il était question en 2003 de tracer la « Promenade des Dakarois ».
La plate-forme pour l’environnement et la réappropriation du littoral (PERL) dont quelques membre comptent de superbes baraques en face de l’Atlantique, dans des quartiers résidentiels de Fann, Mermoz, Almadies, peut applaudir cette décision si tardive, mais nous autres dont beaucoup ont d’autres préoccupations que de pleurer pour le littoral dakarois, restons froids, dans une colère sourde. On nous a volé notre corniche et les fautifs qui se reconnaîtrons n’ont que faire de nous et de notre Dakar !



Abdoul Aziz Diop