Opinion

Cinq nouvelles victimes de notre incurie aux Parcelles Assainies : suite et pas fin de la série noire


Jeudi 11 Mai 2017

Cinq pauvres enfants sont morts hier asphyxiés par la fumée d’un incendie d’une chambre contiguë à la leur, dans leur maison des Parcelles assainies. Il s’agit de quatre filles et d’un garçon qui viennent ainsi s’ajouter à la longue liste de personnes mortes suite à notre insouciance, cette incurie que le Maire des Parcelles assainies a évoquée hier avec beaucoup de rage.


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Le même jour, un ouvrier de 37 ans tombait d’un immeuble à la Rue Carnot de Dakar dans un chantier où, apparemment, les conditions minimales de sécurité ne sont pas respectées.

Bien sûr, c’est la suite de la série noire après le Daaka de Gounass, Bettenty, les incendies de marchés de grandes villes, les accidents de la route avec des chiffres records de 606 morts en 2016, avec un coût financier estimé à 77 milliards de Fcfa.

C’est qu’il y a près de 3500 de morts par an sur les routes à travers le monde selon des chiffres de l’Oms, mais le Sénégal présente cette particularité de joindre à ces victimes d’autres comme ces jeunes des Parcelles assainies dont le père est en prison et la mère absente depuis deux mois.

Comment voulez-vous que, dans ces conditions, les enfants soient en sécurité ? Impossible. C’est vrai qu’un malade mental est indexé, mais c’est une raison de plus de pointer du doigt la propension de plus en plus grandissante de notre société à abhorrer, à tout moment et en toute circonstance,  des comportements à risque.

Bien plus qu’une politique de protection civile efficace avec ses aspects prévention  et répression, c’est notre relation avec le danger qui doit faire l’objet d’une réflexion profonde.

A chaque fois qu’un drame survient  (et ils font légion), on s’en émeut et on recommence de plus bel les pratiques anciennes qui nous ont poussés dans une telle situation.

Conséquence, nous avons la plus grave catastrophe maritime de l’histoire de l’humanité, avec 2 mille morts, et cela ne nous pousse guère à revoir notre mode de vie. Les voitures de transport en commun, les charrettes et aujourd’hui les moto-Jakarta, causent des dégâts qui dépassent même les chiffres officiels.

Les autorités publiques, les municipalités s’en émeuvent, le temps d’oublier ce qui s’est passé. Et les populations de même. Les Sénégalais semblent être atteints d’une forme de malédiction avec les dangers qu’ils bravent et qui les tuent ou les blessent et d’une amnésie collective qui fait que l’on oublie et que l’on recommence.

Le cycle est infernal et rien ne semble pouvoir l’arrêter.

Cependant, ce qu’il faut savoir, c’est qu’il n’y a pas de hasard. Tous ces accidents, ces drames, ne sont que le fruit de la désorganisation de notre société en proie au règne de l’informel, partout. Tout se passe comme si nous sommes réfractaires à l’ordre et à la loi. Nous déployons plus de moyens et de stratégies à contourner la loi, les interdits, qu’à les respecter.

Au lieu de réparer un phare éteint, nous préférons rouler avec, quid à soudoyer l’agent verbalisateur sur la route. Les visites techniques sont devenues plus sévères, mais toujours contournables. D’ailleurs, dans la plupart de nos villes, les voitures de transport dites « clando » n’ont pas de visite technique.

Il fut un moment où il était plus facile de réussir le permis de conduire par la corruption que par le passage honnête au service des Mines. Et je ne suis pas sûr que la pratique ait cessé.

Il en va ainsi dans tous les domaines de notre société. Les règles existent et souvent bien écrites comme le code de la route, mais des stratégies de contournement sont toujours déployées pour éviter de les observer.

Dans ces conditions, nous ne saurons éviter les drames. Les responsabilités sont partagées. Nous sommes tous coupables et ceux chargés de faire régner la loi, les premiers.

L’autorité de l’Etat est tellement faible chez nous que les groupes de pression de toutes sortes n’admettent pas la critique dans leur secteur d’activités où les comportements à risque font légion, surtout si cela touche à la religion, l’ethnie, etc.

Alors, nous ne pouvons, pour le moment, que fermer les yeux et attendre le prochain drame…

Assane Samb

ABDOUL KADER Ba