Retrait de la loi instituant le ticket, manifs des 23 et 27 juin… : Wade, huit raisons de rompre le silence

La date du 23 juin restera à jamais gravée dans la mémoire des Sénégalais. Ce jour-là, comme jamais avant, le peuple sénégalais s’est levé comme un seul homme pour dire non à un projet de son président. Une vraie révolution qui a fait dire aux historiens que ‘les Sénégalais n’ont jamais été aussi déterminés dans leur volonté de voir primer leurs aspirations profondes et légitimes’. Une clameur aussi forte qui a contraint Me Abdoulaye Wade à retirer son projet de ticket présidentiel, lui exigeait donc, aussitôt après, de prendre une initiative appropriée : parler à son peuple pour lui livrer son sentiment et le fixer sur l’avenir. Parler à la nation pour lever certains écueils nés des interprétations équivoques de son action. Mais, plutôt que d’adopter une posture d’échange, pour ne pas dire de clarification, le Chef de l’Etat fait dans un mutisme que rien ne justifie. Mutisme que ses concitoyens observent avec une certaine perplexité. Son silence assourdissant pollue plus qu’il n’apure l’atmosphère devenue pesante depuis. Pourtant, les raisons pour lesquelles le locataire du palais de la République doit parler sont nombreuses. Des raisons qui, sous d’autres cieux, astreignent le capitaine qu’il est à reprendre la barre. Parmi celles-ci, huit émargent avec pertinence.
1- Retrait de la loi instituant le ticket présidentiel
Loin d’avoir clôturé le débat, cette décision, forcée par la contrainte de la rue, appelle une clarification. Le peuple doit en connaître les tenants et aboutissants. Le projet a-t-il été définitivement retiré ou s’est-il juste agi d’une stratégie politique qui consiste à reculer pour mieux sauter ? Les Sénégalais doivent savoir. Car, malgré cet acte politique fort, pris pour apaiser des populations outrées, rien n’a été fait pour dissiper les malentendus qui sont encore légion. A Dakar, comme dans bien des grandes villes du pays, les salons feutrés et les grand-place en parlent sans discontinuer. Wade doit donc parler !
2 - Manifestation du 23 juin devant l’Assemblée nationale
Wade a-t-il décrypté le message du peuple ? En tout cas, la question vaut son pesant d’or.Les Sénégalais attendent une réponse à leurs messages qui ont été nombreux le 23 juin. Ne pas parler, en ce sens, serait faire fi de leurs aspirations et, surtout, risquerait davantage de heurter leurs susceptibilités. Pour un homme qui a beaucoup fait pour la démocratie au Sénégal, ce serait une sorte de retournement de veste. Wade doit donc parler !
3- Emeutes du 27 juin contre les coupures d’électricité
Sur cette question comme sur celle du mouvement du 23 juin, le Chef de l’Etat doit aussi dire aux Sénégalais si leur message a été compris. Il doit, de surcroît, leur proposer des solutions susceptibles de régler la crise énergétique qui secoue le Sénégal depuis de nombreuses années. Car, un Plan Takkal qui peine à donner la lumière, les populations sont de plus en plus sceptiques et doutent de la capacité du gouvernement à pouvoir surmonter cette quasi-équation.Wade doit parler !
4- Sa démission réclamée par l’opposition
Sur cette exigence de ses adversaires politiques, il a, là, l’occasion de montrer que la Constitution est sacrée. Car, élu par le peuple, seul celui-ci est en droit, dans le cadre d’une nouvelle consultation, de le faire partir. Un exercice qui a la subtilité de circonscrire toute velléité de prise de pouvoir par des moyens autres que le suffrage populaire.
5- Accusations de Saïf Al Islam Kadhafi
Dans une interview accordée à un journal français, le fils de Kadhafi a accusé Wade d’avoir reçu des millions de dollars des autorités quatariennes en faveur de son fils, Karim Wade. Des millions obtenus en échange de son soutien à la rébellion libyenne. Une situation qui a suffisamment entamé la crédibilité des Wade et terni l’image du Sénégal à l’extérieur.
6- Vrai-faux appel de Karim à l’armée française
Les Sénégalais attendent aussi de leur président qu’il s’explique sur le supposé appel à l’armée française-comme l’a révélé une journaliste de l’Express- afin de mater les manifestants le 23 juin dernier, Car, malgré les dénégations de Karim et le démenti de Serigne Mbacké Ndiaye, porte-parole du Chef de l’Etat, les Sénégalais restent sceptiques. Le trouble est d’autant plus grand que la presse en a fait ses choux gras.
7- Main tendue du Chef de l’Etat à l’opposition
Son appel au dialogue donc suscite autant l’intérêt de ses compatriotes. Il doit les rassurer sur sa volonté réelle de négocier avec l’opposition, dans un climat de réelle volonté de dialogue et de vérité. Wade doit, là aussi, parler !
8- Inondations et campagne agricole
Hivernage oblige, Me Wade doit parler aux Sénégalais sur des mesures concrètes que le gouvernement va prendre pour gérer de façon appropriée les inondations qui font surtout monter la grogne dans la banlieue et la prise en charge adéquate des sinistrés. Le président doit aussi rassurer quant aux mesures prises pour un déroulement correct de la campagne agricole.
Toutes ces questions et ces interpellations imposent à Wade de rompre avec l’aphonie qui le caractérise depuis deux semaines maintenant.Il doit montrer au peuple sénégalais qu’il a pris toute la mesure de la situation.Il doit faire une adresse solennelle pour dire qu’il va prendre en compte les préoccupations des Sénégalais, mais aussi celles de ses opposants. Scandales par ci et incapacités à résoudre des soucis récurrents des Sénégalais par là.Finalement, Wade doit parler pour assainir un environnement politique qui n’a jamais été aussi vicié !
Mohamed Mboyo EY’EKULA
walfadjiri