Culture

Plateforme des Arts visuels du Sénégal: Des cartes professionnelles pour nos plasticiens


Vendredi 7 Juillet 2017

De nouveaux membres, une carte pour les artistes plasticiens, qui sera présentée au ministère de la Culture et de la Communication, des conditions particulières d’adhésion pour les artistes «reconnus», les «nouveaux talents» et les «autodidactes», etc. Voilà plus ou moins ce que la Plateforme des arts visuels du Sénégal (Pavs) a prévu. Avec à sa tête le plasticien Viyé Diba, l’association était en conférence de presse ce mercredi 6 juillet au Musée Théodore Monod, où devrait se tenir l’Open Meeting Art du mois de novembre prochain. A cela s’ajoute que la plasticienne Maty Niang, installée à Chicago depuis une vingtaine d’années, voudrait rendre hommage aux artistes disparus.


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A la place de l’actuelle Plateforme des arts visuels du Sénégal (Pavs), qui existe depuis 2014, le président de ce collectif, le plasticien Viyé Diba explique que l’on a d’abord pensé à quelque chose comme un Forum des arts visuels. Mais le format n’avait pas vraiment l’air de convenir, un peu trop «aérien» disait-on. Sans oublier, dit le président de la Pavs, qui n’a pas voulu «entrer dans les détails», que l’association des artistes plasticiens a comme qui dirait  traversé une «crise majeure», entre 1995 et 2006, autrement dit pendant plus d’une dizaine d’années. Aujourd’hui, Viyé Diba, qui s’exprimait lors de sa conférence de presse de ce mercredi 5 juillet au Musée Théodore Monod, annonce que la Plateforme des arts visuels du Sénégal va accueillir de nouveaux membres, mais que tout cela sera très «encadré».

Avec «trois types de cartes», que l’on ne cèdera pas à «n’importe qui», selon les explications de Viyé Diba : «D’abord, il y a une carte pour artistes, une autre pour les associations, et une autre encore pour les partenaires des artistes». La carte numérisée destinée aux artistes sera ensuite «présentée au ministère de la Culture et de la Communication comme la carte professionnelle». 

Il y a évidemment quelques critères à respecter : être un artiste «reconnu», de ceux que l’on ne présente plus, ou alors, pour les «nouveaux talents» comme on dit, «deux expositions majeures crédibles», pour ceux d’entre eux qui sont effectivement «sortis d’une école». Là où les «autodidactes» vont quant à eux devoir présenter «quatre expositions», en plus d’être parrainés par un «grand artiste». Même si, précision de Viyé Diba, cela ne signifie pas que «ceux qui ne peuvent pas avoir cette carte-là ne sont pas artistes». Cela voudra surtout dire qu’ils «ne remplissent pas nos (propres) critères» dit le plasticien.

Le président de la Pavs ajoute que les associations peuvent elles aussi «être membres de la Plateforme, mais disons qu’elles, les associations, vont surtout servir d’ «espaces d’accompagnement, avec leurs programmes d’activités à elle». Quant à la plateforme, elle viendra en renfort. 

Une carte aussi pour les «partenaires» donc, où derrière le mot, on retrouve aussi bien les critiques d’art, les historiens, les collectionneurs, les promoteurs, que les galeristes et agents d’art. Histoire de pouvoir ne serait-ce que les «reconnaître», et «clarifier le jeu», dit Viyé Diba, qui explique que dans ce projet, la Plateforme a des «points focaux» dans plusieurs régions du pays : Saint-Louis, Louga, Thiès, Sédhiou et Ziguinchor. 

Sans oublier que le plasticien et ses co-équipiers sont aussi en train de «négocier un protocole d’accord» avec la structure qui devrait «produire les cartes», que l’on cèdera ensuite à «10.000» francs CFA. Jusqu’à l’Assemblée générale du mois de novembre prochain, qui va mettre en place «les nouvelles instances de l’association».

En attendant, la Pavs a son Bureau provisoire, chargé de «faire reconnaître l’association », avec à sa tête Viyé Diba, et son vice-président, le plasticien Kan-Si (Amadou Kane Sy) ; comme elle a aussi son statut, son règlement intérieur, etc.

L’autre aspect, insiste Viyé Diba, c’est que «chaque membre du Bureau est évalué à son poste» ; autrement dit «pas seulement le président. Il est prévu de mettre en place un Bureau des Arts, qui va administrer », parce que les artistes ne seraient pas «de bons organisateurs». Ce qui revient à «confier l’organisation à un spécialiste».

PAVS : La Commission Ethique et Veille pour…

A côté de ce Bureau des Arts, il y a la Commission Ethique et Veille, avec «des personnalités nommées selon leur profil, qui ne sont pas membres du Bureau, mais qui peuvent se prononcer sur tout comportement d’artiste, qui n’entrerait pas dans l’éthique de leur métier». L’autre mission de cette Commission consiste à «veiller à l’application de l’environnement juridique des arts visuels. Senghor avait tout prévu, dit Viyé Diba : en 1967, la loi sur le patrimoine artistique privé de l’Etat prévoit qu’après chaque Salon, l’Etat achète des œuvres» à nos artistes, ce qui leur faisait «des revenus». Aujourd’hui, ce patrimoine ne va pas au-delà de 15 «ridicules» millions de francs CFA ; là où le Fonds d’achat de l’Etat au Burkina Faso, par exemple, faisait «165 millions de francs CFA l’année dernière (…). Ce serait intéressant de faire le bilan de ce qu’ils ont acheté depuis 15 ans. C’est un problème ». Il y a aussi la fameuse loi du 1%, qui dit que «tout bâtiment public, ou recevant du public, et dont le coût dépasse les 20 millions, financé entièrement ou en partie par le budget l’Etat, doit consacrer 1% consacré à la décoration», donc à nos artistes.

Quant au Fonds d’aide aux artistes et au développement de la Culture, qui date de 1977, «ce n’est pas un fonds social, nuance Viyé Diba, il sert à financer des projets». Au-delà, il y a un certain nombre de questions à résoudre : l’Ecole des Arts qui serait «par terre», dans une «maison classique», avec un budget de «jardin d’enfants». Ensuite «on reconduit le directeur artistique de la Biennale (Simon Njami, Ndlr) sans avoir fait de bilan. Ce n’est même pas bon pour lui» dit le président de la Pavs, qui laisse entendre que pour un pays qui a «créé la Biennale», nous n’avons même pas de «vie artistique intense et organisée».

ARTISTES PLASTICIENS DECEDES : 45 jours pour leur  rendre hommage

C’est une idée de Maty Niang, du nom de cette plasticienne diplômée des Beaux-arts en 1996, installée depuis une vingtaine d’années à Chicago : rendre hommage à nos artistes plasticiens disparus, et Dieu sait s’il y en a…Souleymane Keita, Ousmane Sow, Alpha Sow, Ismaïla Manga, Ibou Diouf, Joe Ouakam, Ndary Lo, etc. Maty Niang, qui est là pour une période de 45 jours, pense à un atelier d’à peu près trois jours, avec à la clé une exposition. La plasticienne promet d’ores et déjà d’apporter du matériel, de la peinture et des toiles, qui nous viendront de Chicago. Pour l’ancien directeur des Arts, Ousseynou Wade, «il faut prendre cette proposition comme un déclic. Nous y avons tous pensé (…) : réunir tout le monde autour d’un programme-hommage. Ce sera au début du mois d’août ; participation volontaire, mais sur inscription. Un travail comme celui-là doit naturellement se terminer par une exposition. L’idée est de faire le travail ici même, au Musée Théodore Monod, dont le directeur a donné son accord de principe». Quant au lieu qui devrait accueillir cette exposition, «rien ne s’oppose à ce que cela se fasse au Musée Théodore Monod». Ousseynou Wade devrait d’ailleurs rencontrer ce lundi le Conservateur du Musée, Dr El Hadj Malick Ndiaye. Lors de cette conférence de presse, on entendra aussi dire que le projet avait, quelque part, une «vocation sociale», puisqu’il devrait permettre d’«associer» les familles des artistes défunts. Sans oublier qu’il va falloir voir comment utiliser leurs œuvres. Comme on entendra aussi quelqu’un comme le photographe Pap Ba, dire que le délai serait peut-être un peu «trop court», pour organiser à la fois l’atelier et l’expo. «Des inquiétudes compréhensibles» aux yeux d’Ousseynou Wade, mais comme il dit lui-même, «nous allons faire au mieux».

OPEN MEETING ART EN NOVEMBRE : Pas un «Salon classique»

Ce ne sera comme le Salon de l’Art sous Senghor, où les artistes étaient quasiment «invités», se contentant de jouer un rôle plus ou moins «secondaire», ni tout à fait comme celui que les artistes eux-mêmes organisaient pendant la présidence d’Abdou Diouf, à une époque où l’Etat était «partenaire». Prévu au mois de novembre, l’Open Meeting Art (ou Réunion publique autour de l’art), dixit Viyé Diba, n’aura pas grand-chose d’un «Salon classique : il y a trop d’expositions», et on n’est pas très loin de l’ «inflation. Il faut innover». Concrètement, l’Open Meeting Art «va durer 7 semaines», mais ce sera très «intense» annonce déjà le président de la Plateforme des arts visuels du Sénégal (Pavs). Thème de cette toute première édition, un peu «comme un slogan» : «Améliorer la qualité de la vie dans nos espaces urbains : nous sommes preneurs». Parce qu’ «on ne peut pas passer notre temps à critiquer sans proposer, (ou à) répéter le même discours depuis l’Indépendance». Chaque artiste va donc devoir faire des propositions : «une maquette de banc public, une maquette de poubelles, des projets d’aménagement en matière de végétation, de dallage, des fresques mobiles», etc.
Dans cette histoire, disons tout de même que la Pavs va s’appuyer sur son «Collège de facilitateurs», qui aura la mission d’organiser des rencontres entre les aménagistes, les maires, le président de la République, etc.

SUD QUOTIDIEN


Abdoul Aziz Diop