PLEIN FEUX - 22 ans d’existence, fissures, menaces d’effondrement,… : Pont «Sénégal 92», une vieille dame à relooker

Mardi 16 Septembre 2014

Situé entre les quartiers de Grand-Yoff, Grand-Médine et Patte d’oie, le pont «Sénégal 92» porte l’empreinte de son année de construction. En effet, érigé en 1992 pour les besoins de la Coupe d’Afrique des nations de football organisée par le Sénégal, le pont «Sénégal 92» était à l’époque une solution circonstancielle pour faciliter l’accès au stade Léopold Sédar Senghor. Vingt-deux ans se sont écoulés et ce pont supporte toujours le poids des véhicules qui y passent quotidiennement, au moment où on parle de son potentiel effondrement. Zoom sur un édifice menacé par l’impact du temps.

Des fissures béantes et des écorchures qui dévoilent l’amas de ferraille et de béton ayant servi à la construction. C’est le spectacle qu’offre le pont dénommé par certains pont Vava et appelé aussi par d’autres Sénégal 92 dans sa partie dorsale et au niveau de ses ailes latérales. Les véhicules gros porteurs qui dépassent la hauteur maximale requise pour passer sous ce pont ont fini de laisser leurs traces destructrices sur l’édifice. Des traces qui, par ailleurs, sont assez flagrantes pour attirer le regard de quelques curieux. Mais, le temps également n’a pas manqué de faire son effet caractérisé par un vieillissement notoire du pont.

«Le pont n’est plus sûr»
Le pont «Sénégal 92» est l’un des héritages matériels de la Can organisée par notre pays, en 1992, qui ont subsisté à l’usure du temps. Depuis son édification, cette passerelle tient toujours sur ses jambes. Pourtant, si on se réfère à divers avis, il a été construit pour une durée de vie très limitée. Et les signes de sa dégradation sont assez perceptibles pour les observateurs qui y prêtent attention. D’ailleurs, il suffit de regarder près de l’installation plus ou moins anarchique des mécaniciens et autres occupants dans la partie donnant sur le quartier Grand-Yoff pour constater les fissures d’une façade du pont. Aujourd’hui, nombreuses sont les voix qui s’élèvent pour alerter les autorités sur ce danger plus que réel. C’est dans cette optique que s’inscrivent les propos tenus par Issseu Cissé, une vendeuse de mangues, rencontrée dans les parages : «Le pont n’est plus sûr et nous qui vivons ici en savons quelque chose. La façade située du côté de Grand-Yoff risque de s’effondrer et nous avons tout le temps peur pour nos petits enfants qui, souvent, le traversent avec insouciance.»
Des agents de l’Entente Cadak-Car présents sur les lieux pour une opération de nettoiement confirment cette situation de délabrement du pont. L’un d’eux, Alassane Ndongo, explique en ce sens que «ce pont a été construit depuis longtemps et les autorités s’étaient accordées sur la nécessité de le démolir et d’en construire un nouveau. D’ailleurs, un contrat fut négocié à l’époque par le régime de Abdou Diouf avec les Chinois, mais depuis lors rien n’a été fait», confie-t-il. Cette situation renseigne à bien des égards sur le manque de considération des pouvoirs publics face à cette question urgente pour les usagers et riverains du pont.

La récurrence des accidents
En plus de menacer de s’effondrer, le pont «Sénégal 92» enregistre beaucoup d’accidents qui sont, dans certains cas, assez graves pour les victimes. A cause de son étroitesse et du nombre important de véhicules qui y passent sans arrêt, le pont fait en effet de nombreux dégâts et souvent les accidentés en sortent avec des séquelles à vie. Une passante déclare à ce propos : «Il y a beaucoup trop d’accidents sur cet axe. Vous ne pouvez pas rester un instant sans voir un choc.» Tout juste un moment après, comme pour attester de ce constat, un véhicule de transport en commun de marque Tata se fait percuter par un taxi qui venait à l’arrière. «L’autre jour, une maman s’est fracturée la jambe à cause d’un accident de voitures très violent. La douleur se faisait sentir dans son regard et la scène était insoutenable», renchérit la vendeuse de mangues. Les ronds-points situés de part et d’autre du pont contribuent à accroître les risques d’accident, car les conducteurs ne respectent pas toujours le code de la route. Et pour preuve, beaucoup de chauffeurs ne connaissent pas que la priorité est à droite au niveau du rond-point.

La vie autour du pont
Les activités vont bon train dans le coin aménagé par les mécaniciens, les nettoyeurs de voitures, les restauratrices et autres occupants. L’endroit choisi c’est sous le pont, et on peut juger de l’intensité des activités par la diversité des installations. Les ateliers de mécaniciens implantés au hasard s’affairent autour de la réparation des véhicules parmi lesquels on retrouve surtout des cars Ndiaga Ndiaye qui ont fini de transformer l’espace en une sorte de gare routière.
De leur côté, les jeunes nettoyeurs de voitures font leur travail avec passion, tandis que les gargotiers préparent le déjeuner. La clientèle est généralement composée d’adeptes du milieu : mécaniciens, chauffeurs, commerçants, etc. L’ombre du pont «Sénégal 92» sert également d’abri aux sans domiciles fixes appelés communément Sdf. Ces derniers se plaisent dans cet espace qu’ils considèrent comme leur territoire naturel à tous points de vue. Ce qui ne manque pas d’impacter sur la sécurité des environs du pont. Puisque beaucoup d’individus aux intentions diverses s’y meuvent et parmi ceux-là, on note certainement des agresseurs et autres malfaiteurs.
Dans cette atmosphère, les gens évitent de parler de l’état de délabrement du pont, car sa démolition est synonyme de déguerpissement pour eux. Cependant, d’aucuns s’accordent sur la nécessité de rénover cet ouvrage dont l’utilité ne fait plus de doute.

LEQUOTIDIEN



Abdoul Aziz Diop