Politique

Manquements dans le processus électoral: L'Administration accusée de complicité


Lundi 24 Juillet 2017

Le processus électoral actuel est émaillé de graves dysfonctionnements qui en entachent la crédibilité. Ce sont notamment les retards observés dans la confection des cartes d’électeurs qui obligent certains responsables, y compris du camp présidentiel comme Moustapha Diakhaté, à souhaiter que les élections soient reportées de quelques jours.

Le Président de la coalition Mankoo Yessal, Modou Diagne Fada, déplore cet état de fait et enjoint les autorités de tout faire pour que les citoyens puissent disposer de leurs cartes.

D’ailleurs, une marche initiée par la tête de liste de la coalition gagnante Wattu Senegaal, Me Abdoulaye Wade, est prévue demain pour exiger que des correctifs soient rapidement apportés que les cartes soient rendues disponibles.

Ainsi, le débat est lancé sur un couac qui semble inacceptable aux yeux de beaucoup, d’autant plus que 50 milliards ont été donnés à la société Iris Corporation pour arriver à doter tous les Sénégalais de ces cartes.

Ainsi, nombre de responsables politiques pointent du doigt les autorités en charge de l’organisation des élections, au premier rang desquels le Ministre de l’Intérieur Abdoulaye Daouda Diallo dont certains hommes politiques avaient exigé le départ.

Malheureusement, ce même doigt accusateur de complicité active avec ces autorités de l’Etat a été porté contre l’administration de l’Etat.

Un des hauts responsables du Pds, en l’occurrence le Docteur Cheikh Dieng, Maire de Djiddah Thiaroye Kao, avec qui nous avons pris langue, a dénoncé vigoureusement le fait que « des cartes d’électeurs soient distribuées nuitamment dans des sous-Préfectures avec la complicité manifeste de l’administration ». Le responsable libéral, membre du Comité Directeur du Parti démocratique sénégalais (Pds) et investi sur la liste nationale de la coalition gagnant wattu Senegaal, révèle que leur coalition détient des preuves de cette implication des autorités administratives et les met en garde contre ces actes de fraude qui sont une violation grave de la loi. Il promet ainsi que leur coalition ne ménagera aucun effort pour saisir la Justice afin de démasquer et de punir ces individus.

S’agissant des déclarations du Sous-Préfet des Almadies sur le cas de ces deux jeunes alpagués par les leaders de la coalition Mankoo Taxawu Senegaal, il fait remarquer que Khadiadiatou Sène Traoré « a fait preuve d’une méconnaissance de la loi » car, à l’en croire, les cartes ne peuvent, pour des raisons de sécurité, être en possession d’individus. Elles doivent être gardées en lieu sûr, connues d’un groupe de personnes restreint comme le Président du Bureau de vote, le représentant de la Cena.

Le Maire dénonce des manœuvres des hautes autorités de l’Etat tendant à procéder à une distribution sélective des cartes d’électeurs, y compris dans des demeures familiales, ce qui est inadmissible.

Il faut rappeler que c’est dans cet état d’esprit que leur mentor, Abdoulaye Wade, a appelé à un marcher ce mardi. Le patron libéral est convaincu que la rétention des cartes est volontaire et qu’il faut tout faire pour obtenir leur délivrance.

Contentieux post-électoral

En tout état de cause, nous sommes en train d’assister à une situation incompréhensible qui est de laisser en rade des milliers de Sénégalais qui risquent d’être privés de vote.

La responsabilité entière des pouvoirs publics est ainsi engagée car, comme le dit Modou Diagne Fada, « on ne peut pas voter sans cartes d’électeurs ».

Cette situation mériterait que l’on réfléchisse à la proposition de Moustapha Diakhaté de reporter pour quelques jours les élections. Mais comme pour le Premier ministre, Boune Adallah Dionne, ce n’est pas envisageable, il faudra se convaincre à l’idée que beaucoup de gens ne vont pas voter faute de carte d’électeur. Ce sera inédit dans l’histoire de notre démocratie. Le contentieux post-électoral risque d’être très embarrassant et la Cedeao pourrait s’en mêler pour condamner le Sénégal.

A tort ou à raison, la supposée mauvaise foi des autorités étatiques deviendra ainsi un argument de campagne et après, de contentieux. Les suspicions de fraudes existent bel et bien et c’est dommage que l’administration soit ainsi pointée du doigt.

Si les élections se tiennent, elles offriront aux vainqueurs une victoire douteuse et aux perdants, des raisons d’espérer.

Comme quoi, ce baromètre de popularité qui pourrait constituer ces élections aura été faussé et cela va relancer la polémique sur les vraies forces des partis.

Ce sera de bon ton de dire : « C’est parce que tout le monde n’a pas voté que… ». Et ce ne sera pas tout à fait faux.



Abdoul Aziz Diop