Maimouna Sao épouse de Cheikh Bethio « Mon mari m’a chassée de la maison et a pris notre enfant »

Vendredi 6 Décembre 2013

Rendez-vous avait été pris à Touba où elle réside, mais pour des impondérables, l’entretien s’est fait au téléphone. Au bout du fil, c’est une dame, Maïmouna Sao, cinquième épouse de Cheikh Béthio, poussée dans ses derniers retranchements, qui se rebiffe pour éviter de perdre la garde de son enfant. Ironie du sort, le fils chéri de presque trois (3) ans de cette épouse s’appelle Serigne Saliou. Du nom du défunt cinquième khalife de Bamba qui avait béni son mariage avec Cheikh Béthio Thioune en 2007. Une union faite de miel du bonheur et de moment de grâces, jusqu’à ce que le fuel de la division se déverse entre les deux époux en 2011. Aujourd’hui engluée dans une procédure de divorce forcée, Maïmouna Sao 5e épouse de Cheikh Béthio Thioune, raconte ses tourments.

Confidences d’une femme blessée…


«Je suis mariée à Cheikh Béthio Thioune depuis 2007, avec la bénédiction de Serigne Saliou (5e khalife de Cheikh Ahmadou Bamba, décédé le 8 décembre 2007, Ndlr). Mais présentement, j’ai des problèmes avec mon mari Serigne Cheikh Béthio. Et je pense que la moindre des choses entre un mari et sa femme, c’est de devoir s’expliquer quand il y a des problèmes. Mais le marabout ne m’a même pas appelé pour qu’on en discute. Pis, il appelle certains de mes proches pour me mettre en mal avec eux.

Notre couple a commencé à battre de l’aile en 2011, mais comme je suis engagée dans une procédure de divorce avec Cheikh Béthio, je ne veux pas entrer dans les détails.

J’étais en de bons termes avec le marabout, il m’avait même offert un véhicule et une maison à Oumoul Khourrah à Touba. Mais quand il y a eu ces problèmes, le marabout a récupéré le véhicule et quand j’ai pris un taxi pour me rendre à Touba, Cheikh Béhio a appelé ses disciples pour que je n’entre pas dans la maison. Pourtant, j’avais confié cette maison à mon frère et à sa femme qui y vivaient. Mais quand les disciples du Cheikh sont venus, ils ont corrigé sévèrement mon frère, pour le contraindre à quitter la maison, puis ils ont attaché ses mains par derrière. C’est ainsi que j’ai dû quitter cette maison de force, laissant derrière moi mes effets personnels, une mallette, mes habits et l’ensemble de mes bagages.

«Cheikh Béthio m’a appelée au téléphone pour me dire qu’il me répudie»

Une de mes connaissances a dû se saigner pour nous trouver moi et mon fils un logement à Grand Mbour. Après cinq mois dans cette habitation, les problèmes se sont envenimés dans notre couple. Et comme je m’étais mariée à lui, je ne pouvais pas me contenter d’un coup de fil de sa part m’annonçant qu’il me répudie. Je trouvais que la moindre des choses, c’était qu’on en discute entre deux responsables. Et il n’y a aucun responsable des deux familles qui ose lui en parler au risque de subir sa colère. J’ai alors décidé de prendre mon destin en main. J’ai décidé d’aller le voir directement pour lui en parler de vive voix. Malheureusement, à cause de son arrestation dans l’affaire du meurtre de Médinatoul Salam, je n’ai pu le faire.

Alors, j’ai changé de fusil d’épaule, parce que j’ai mis de côté mes problèmes pour le soutenir dans l’épreuve qui venait de lui arriver. Je suis d’ailleurs l’une des premières épouses à me rendre en prison pour lui rendre visite. Ce jour-là, il m’a très bien reçu et a salué le geste que je venais de faire. Il m’avait donné des garanties qu’il paiera désormais la maison et qu’il continuerait à m’apporter son aide. Tout semblait rentrer dans l’ordre, mais quelque temps après, il ne m’envoyait plus le moindre sou. Or, cet argent ne m’était pas destiné, mais à mon fils Serigne Saliou qui a deux ans et demi. Cela ne m’a pas empêché d’aller le voir en prison et de le soutenir dans les moments difficiles qu’il traversait. Malgré tout, il a continué à ignorer ses devoirs vis-à-vis de moi et de notre fils, j’ai saisi son avocat Me Clédor Ciré Ly pour m’indigner de son comportement et j’ai fait savoir à son avocat que je voulais discuter avec le Cheikh de nos problèmes en tête à tête. C’est ainsi qu’en compagnie de son avocat, je me suis rendue au tribunal de Thiès et on a eu un laissez-passer pour aller le voir un vendredi. Quand l’avocat est entré pour le rencontrer, je l’ai attendu à l’entrée. Mais il n’a pas daigné nous recevoir moi et mon fils. Il a prétexté le passage mouvementé de Adja Déthié Pène, quelques semaines plus tôt, pour décliner la visite. Alors l’avocat lui a rappelé que ce n’était pas le même cas. Il lui a dit que j’étais son épouse et qu’il avait le droit de lui rendre visite. Depuis cette date-là, je n’ai plus de nouvelles de mon mari Cheikh Béthio Thioune.

«Cheikh Béthio veut me prendre mon fils pour le confier à Adja Déthié Pène»

Maintenant, mon mari a enclenché une procédure de divorce. Mais dans un premier temps, il a tenté de force de récupérer notre fils de presque 3 ans. Mais j’ai refusé. J’ai été obligée de chercher à Cambérène (Dakar) un appartement pour y habiter à mes propres frais. J’ai vécu dans cet appartement de janvier à août dernier. Malheureusement, ce bâtiment menaçait ruine. J’ai dû finalement l’appeler pour lui expliquer la situation, il m’a alors promis de régler au plus vite le problème. Le lendemain, c’était également au mois d’août, il me rappelle pour me proposer de rejoindre sa maison à Touba au quartier Khourrah qui présente plus de sécurité pour notre fils. Mais à ma grande stupéfaction, le mois suivant il m’appelle pour me dire : «Je veux récupérer mon fils pour le confier à une de mes épouses, Adja Déthié Pène.» J’ai refusé, arguant que je pourrai bien m’occuper de mon enfant. En novembre dernier, il revient à la charge. Je me suis encore opposé. Il m’a alors menacé, je lui ai répondu que j’avais des arguments valables que je gardais par-devers moi. Notamment notre certificat de mariage. Au mois d’octobre, je vois arriver au domicile à Touba, Me Abdoulaye Babou qui me dit être un envoyé du Cheikh. Après l’avoir écouté, je lui ai dit ceci : «Je me plierai à la volonté de Serigne Cheikh Béthio, s’il accepte d’aller dire à Serigne Saliou, l’origine de notre différend. S’il accepte d’aller jusqu’au mausolée de Serigne pour dire qu’il veut me répudier, j’accepterai toutes ses conditions sans lui réclamer un sou.»

Après cette réponse, je vois débarquer le Cheikh, un beau matin flanqué de son épouse, de quelques-uns de ses enfants, de ses lieutenants et certains de ses disciples et devant tout ce beau monde, il s’est mis à exposer notre vie conjugale. Il voulait m’inciter à parler, mais j’ai gardé le silence. Il m’a fait savoir que sa pension de retraite était très faible et il ne pouvait me donner que 25 000 FCfa, comme pension alimentaire pour notre enfant. Car à son avis, j’étais incapable de m’occuper de notre enfant. Puis, il m’a dit que son avocat Me Babou va entrer en contact avec moi pour que je signe les papiers du divorce. Le samedi dernier 30 novembre, Me Babou est venu à la maison, alors que la date convenue pour le rendez-vous était le lundi. Il a appelé mon oncle avant de venir. Mon oncle m’a transmis le message. Par la suite, Cheikh Béthio m’appelle pour me dire : «Maïmouna, je sais bien que tu es à la maison. Je sais que tu mens.» Je lui ai rétorqué que j’étais bel et bien à la maison et que Me Babou n’avait qu’à venir. Je les ai attendus jusque tard dans l’après-midi. Mais, aucune trace d’eux. Je suis sortie pour faire un Ziarr chez Serigne Saliou. En cours de route, Cheikh Béthio m’a appelée pour me dire qu’il m’attendait à la maison avec son avocat. Après avoir terminé mes Ziar au mausolée de Serigne Saliou, j’ai fait un tour chez l’épouse de Seigne Cheikh à qui j’ai raconté tous mes problèmes. Cheikh Béthio qui était en train de m’attendre a fait un tapage incroyable en ameutant tout le voisinage. Au retour, je ne l’ai pas trouvé à la maison.

«Comment le juge a avalisé les requêtes du chef»



Vendredi dernier, j’ai reçu une convocation du tribunal de Mbacké provenant de Me Babou pour le mercredi 4 décembre. J’ai été me rendre au tribunal le mercredi à 8h. Le juge m’a demandé si j’avais un avocat. Je lui ai répondu que non. Il m’a dit que de toute façon, je n’en aurai pas besoin pour le moment car, on en était à la phase de conciliation. Il m’a demandé de revenir à 17h 30. Finalement, le Cheikh est venu à 18 heures. Ils ont tout organisé en toute discrétion, afin que les travailleurs du tribunal ne se doutent de rien. Par la suite, on s’est retrouvé en tête-à-tête avec le juge et le greffier. Le juge a demandé si on voulait une conciliation, je lui ai dit que j’ai été convoqué et que j’en ignorais le motif. Il s’est tourné vers Cheikh Béthio avec la même question. Celui-ci lui a répondu qu’il ne peut pas y avoir de conciliation. Le greffier a tout noté. Quelques minutes après, Me Babou s’est présenté et a commencé sa plaidoirie. Il a dit que son client voulait récupérer son enfant et sa maison et qu’il était disposé à verser une pension de 50 000 FCfa par mois. Je leur ai dit que je ne parlerai pas sans la présence de mon avocat. Me Babou a continué sa plaidoirie et le juge a tout noté. Il nous a donné rendez-vous pour le 8 janvier. Et en quittant, le juge m’a dit qu’il avalisait toutes les requêtes du Cheikh. Le Cheikh m’a demandé de lui rendre sur le champ sa maison et son enfant.»

Ps : Une bonne partie de la soirée d’hier, L’Observateur a tenté de joindre Me Abdoulaye Babou, l’avocat de Cheikh Béthio Thioune dans cette procédure de divorce enclenchée contre sa cinquième épouse, Maïmouna Sao. En vain. Les multiples tentatives et les nombreux messages laissés sur le répondeur de l’avocat n’ont pu permettre de recueillir son avis. Malgré tout, nos colonnes lui sont largement ouvertes.

GFM.SN


Abdoul Aziz Diop