Politique

ENFERMÉ DANS SA TOUR D’IVOIRE : Wade éconduit Lamine Diack et les ambassadeurs de l’Ue


Jeudi 30 Juin 2011

Le président Wade ne veut rien entendre au sujet du pays qui brûle. Enfermé dans sa tour d’ivoire, le chef de l’Etat sénégalais n’entend pas être raisonné. Hier, il n’a pas voulu écouter Lamine Diack, le président de la Fédération internationale des Associations d'athlétisme (Iaaf) qu’il a reçu lors d’une audience expéditive.


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Le président Diack était pourtant venu le sensibiliser sur la gravité de la situation et la nécessité de prendre des initiatives hardies à la mesure du contexte. C’est de Lomé, où il se trouvait, que le patron de l’athlétisme mondial suivait, inquiet, les évènements des deux folles journées des 27 et 28 juin dernier avec les émeutes de l’électricité qui avaient embrasé la quasi-totalité du pays. Dans la suite de la journée du 23 juin lors de laquelle, toujours à l’étranger, il avait appelé les radios pour manifester son adhésion à la lutte contre le projet de loi controversé. Diack qui estime ne pouvoir rester les bras croisés devant les périls qui s’annonçaient, décide alors de différer son retour sur la France prévu hier soir afin de faire le déplacement à Dakar. 
«Non, il faut faire quelque chose, je ne peux pas regarder le pays dans cette situation», dit-il à ses proches en soulignant que les «gens qui disent au président que tout ceci est un épiphénomène, ça va passer, se trompent ou le trompent». De Lomé, il décide de solliciter une audience avec le président Wade et appelle à la Présidence pour se la voir accorder pour hier à 17 heures. Les modalités de leur rencontre réglées pour hier, Lamine Diack, qui a quitté Lomé en début d’après-midi débarque à l’aéroport Léopold Sédar Senghor vers 16h40 et pique directement sur le Palais où le maître des lieux le reçoit à 17 heures dans ses appartements privés.
 Pensant rencontrer le président de la République et le prévenir de ce qu’il croit être juste avant de rentrer sur Paris, Lamine Diack est sorti désillusionné de cette audience qui a été expéditive, moins de dix minutes alors qu’elle était prévue pour durer une demi-heure. Et pour cause, après les urbanités d’usage, le président de l’Iaaf attaque tout de go en disant à Wade : «Je suis venu vous parler des problèmes auxquels le pays fait face…». Visiblement tendu, Wade le coupe net : «De quoi vous parlez, moi je n’ai pas de problème, il ne se passe rien qui justifie qu’on vienne me parler». Il lui indique d’ailleurs que les ambassadeurs de l’Union européenne voulaient le voir, mais que, selon lui, il n’y a rien qui justifierait que les gens viennent lui parler à propos de la situation actuelle. 
Le ton et la tonalité du propos présidentiel ne laissaient plus à Diack la latitude de dire à Me Wade ce dont il était venu l’entretenir. C'est-à-dire, condensé en quelques mots : Monsieur le Président, l’heure est grave. Retirez votre candidature et retirez votre fils des affaires de l’Etat pour préserver la paix au Sénégal. C’est donc déçu et inquiet que le président Lamine Diack est sorti de son entrevue avec le président Wade. Selon nos interlocuteurs, Diack, qui est reparti sur Paris le cœur gros de voir le pays basculer dans l’incertitude, a la conviction que si Wade reste sur ses positions, c’est parce qu’il est frappé de cécité. Ce qui fait que la situation risque de lui échapper. Selon lui, aucune force répressive ne pourra arrêter les manifestations du genre que le Sénégal va connaître si le chef de l’Etat persiste à ne pas voir la réalité en face.
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La Rédaction