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Opinion

COMMENTAIRE DU JOUR Prendre la proie pour l’ombre par Vieux SAVANE


Mercredi 3 Octobre 2012

Du Président Macky Sall, on attendait qu’il remette sur ses pieds un pays qui prenait un malin plaisir à marcher sur la tête. Enrichissement sans cause, népotisme, gestion clanique et familiale des biens publics, patrimonialisation du pouvoir avaient ainsi jalonné son parcours. Aussi, contrairement à son prédécesseur, le nouveau chef de l’Etat n’a-t-il bénéficié d’aucune période de grâce. Il lui était exigé des résultats probants articulés autour d’une gouvernance modeste et vertueuse. Il était attendu sur l’exploitation des audits des pontes de l’ancien régime, la lutte sans merci contre la corruption, la refonte des institutions, etc.

Six mois après, il y a comme une espèce de torpeur qui bat son plein, non pas du fait de la chaleur d’étuve en cours mais de l’impression de pilotage à vue, d’absence de dynamisme et de volontarisme face à une société en crise. Absence de boussole et de cap marquée par quelques initiatives de mauvais aloi.

Dès après son installation, le président s’est mis dans la dynamique d’un second mandat. Macky Sall donne l’impression de ne penser qu’à ça ouvrant ainsi la porte à toutes sortes de dérapages. Et l’un des plus graves est cette volonté de massification de l’Alliance pour la République (Apr). Quitte à débaucher les militants de partis alliés, encourager la transhumance politique, en un mot flatter les bas instincts sur lesquels ne peut s’édifier aucun contrat de confiance.

Aurait-il oublié qu’il ne suffit point d’être un parti majoritaire pour gagner les élections ? Lui-même venait d’en imprimer la preuve en terrassant le parti majoritaire d’alors le Parti démocratique sénégalais (Pds), lequel avait en son temps battu le Parti socialiste (Ps). Débaucher des gens, additionner des militants alimentaires sans aucune conviction, se laisser enivrer par la ronde des courtisans. Rien n’y fera. Quoi qu’on dise, quoi qu’on mise sur les achats de conscience, ce sont en définitive des électeurs capables d’apprécier les réponses apportées à leurs attentes qui font la vérité des urnes. Et en ce moment, les angoisses sont nourries par l’insécurité, l’école qui fout le camp, les routes et les quartiers inondées dès les premières gouttes de pluie, la Casamance toujours en proie aux démons de l’irrédentisme, la cherté de la vie, de la santé.

Le Président Macky Sall ne doit pas s’illusionner, c’est autour des réponses apportées aux problèmes concrets que les choses vont se dessiner. Même s’ils sont incontournables, ce ne sont ni les militants ni la capacité d’un parti à être majoritaire qui font gagner des élections. A trop se focaliser sur cela, il risque de prendre la proie pour l’ombre. A trop vouloir un second mandat, il risque de s’interdire toute initiative. Et ce sera le meilleur moyen de s’ouvrir la porte de la retraite anticipée. A moins de se ressaisir et de revenir à la patrie avant le parti, une profession de foi qui gagnerait à être ancrée dans le réel, en rupture avec la foi du charbonnier qui somme toute a été la marque de fabrique de l’ancien régime.

On se rappelle qu’en mars 2000, l’euphorie était au rendez-vous suite à la première alternance politique post indépendance. Comme dopés, les Sénégalais baignaient dans une ambiance d’optimisme et de grande espérance. Tout leur semblait possible et à portée de main. Par vagues successives nombre d’entre eux vivant à l’étranger sont rentrés au bercail. Le pays était redevenu attractif par la grâce et l’aura d’un homme, Me Abdoulaye Wade. Entouré d’une « dream team » de haute facture, notamment des gens au parcours militant impressionnant, il avait réussi à désinhiber et à meubler la tête de ses compatriotes des rêves les plus fous.

Douze ans après, tout s’est écroulé. Revenus de leurs désillusions, forts de leur douloureuse expérience, les Sénégalais ont amorcé leur seconde alternance politique tout en réclamant une rupture épistémologique. Il n’était plus question, comme avec le père Wade de confier leur destin à un quelconque messie. Fermant cette parenthèse, ils se sont redécouverts comme sujets, c'est-à-dire des moteurs déroulant une histoire dont ils sont comptables. Les rapports ont été inversés avec l’irruption du peuple souverain exerçant son rôle de vigie, décidé à mettre le pouvoir sous pression et sous surveillance.

Plus question de penser qu’on allait, par la dextérité d’un magicien basculer dans le monde du merveilleux. A défaut de rendre cynique, la déception tue le rêve et fracasse la naïveté. Instruits par leurs propres expériences ils ont été témoins une fois de plus de la dimension corruptogène du pouvoir et de sa capacité à sécréter de l’arrogance et du mépris. Pour peu que les citoyens, sous le registre de la fascination, ne se posent en sentinelles de la démocratie. Avec l’avènement de Macky Sall qui n’a fait rêver personne ni n’a cherché à le faire, il était question de mettre un terme aux dérives wadiennes, à une hyper présidence qui, à force de se perdre dans les mailles d’un égocentrisme tropical avait fini par se croire omniscient et omnipotent, succombant ainsi à une prétention qui fragilise la raison. Seulement il est de petits signes qui font penser que la partie est loin d’être gagnée (Voir par ailleurs). Et c’est cela tout l’enjeu de cette mandature.
SUDONLINE.SN





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