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Opinion

Benno ou Manko, à qui se fier ?


Lundi 8 Mai 2017

Un spectre hante la galaxie présidentielle : celui de la cohabitation. Certains alliés zélés s’évertuent à démontrer l’impossibilité d’une telle éventualité. Selon ces apprentis politologues, qui sont loin d’être objectifs et désintéressés, une victoire de l’Opposition aux prochaines élections législatives n’aurait pour seule conséquence que la déstabilisation du pouvoir dirigé par Macky Sall avec l’aide de sa méga-coalition Benno Bokk Yakaar. Nous nous retrouvons donc encore une fois devant un nième reniement de certaines forces de gauche, hier avocats intransigeants du régime parlementaire face à l’omnipotence présidentialiste, devenues aujourd’hui partisans zélés d’un hyper-présidentialisme quasi-absolutiste.


Benno ou Manko, à qui se fier ?

LES GISEMENTS DE PÉTROLE ET DE GAZ, NOUVELLE DONNE A PRENDRE EN COMPTE

Cela est d’autant plus affligeant qu’il apparaît de plus en plus, que les gisements prometteurs en pétrole et gaz découverts dans notre pays nous commandent de changer de paradigme dans nos analyses politiques. Sous ses airs débonnaires et bon enfant, il semble bien que le petit ingénieur-géologue en charge de la base de données de PETROSEN soit devenu une pièce maîtresse dans le dispositif d’accaparement de nos ressources minières par les grandes compagnies pétrolières.

Ce n’est donc point un hasard si l’opinion publique nationale n’arrive pas à démêler l’écheveau des contrats pétroliers, depuis les accointances du frère du président avec des hommes d’affaires peu recommandables jusqu’à la récente signature avec Total de deux accords pour l’exploration et l’exploitation de concessions pétrolières, qui a d’ailleurs été à l’origine de dissensions profondes au sein du gouvernement.

Il est, en tout cas, flagrant que le successeur du président Wade cherche depuis son accession à la magistrature suprême à s’affranchir de tous les contrepouvoirs consacrés dans n'importe quelle démocratie libérale. La dernière marche des professionnels de la Presse, venant à la suite de la fronde des magistrats, auxquels on a bien dû se résoudre à faire quelques concessions, montre que dans notre pays, il n’est pas donné au premier aventurier venu – même s’il bénéficie du soutien inconditionnel de lobbies pétroliers – de remettre en cause des acquis démocratiques arrachés, de haute lutte, par le mouvement national démocratique.

LE PARLEMENT, MAILLON FAIBLE DE NOS INSTITUTIONS

Il faut, cependant, reconnaître que parmi les contrepoids aux velléités monarchiques du régime présidentialiste sénégalais depuis la crise de 1962, le Parlement fait office de maillon faible. Après cet épisode dramatique, ayant abouti à l’arrestation arbitraire du président DIA, le Parti-Etat "UPS-PS", parti unique avait institué une dictature de fait avec des simulacres d’élections auxquelles ne participaient d’ailleurs que ses propres militants.

L’ouverture démocratique de 1981, même si elle a institué la reconnaissance officielle de tous les partis, qui en faisaient la demande, n’a pas permis de régler automatiquement le problème de la sincérité du scrutin. Il faudra attendre la crise électorale de 1988, la décrispation, qui s’en est suivie avec les gouvernements de majorité présidentielle élargie, pour aboutir au code consensuel de 1992 permettant l’identification des électeurs, avant et après le vote (pièce d’identité et encre indélébile) et empêchant le trafic d’influence en rendant le vote secret (isoloir), pour amorcer un processus permettant la survenue de la première alternance en 2000. Le parti "socialiste", en fin de règne, pour contrer une perte de sa majorité parlementaire consécutive à son impopularité croissante, avait établi  un mode de scrutin inique, majoritaire à un tour.

On ne peut que déplorer le fait, malgré deux alternances réussies en 2000 et en 2012, que ce soit toujours ce mode de scrutin injuste, qui reste en vigueur. Il permet, en effet, au parti présidentiel, bénéficiant des attributs du pouvoir et du poids de l’idéologie dominante, crédité de réalisations réelles ou supposées – disposant, de surcroît de mallettes remplies de pétrodollars - d’avoir une longueur d’avance sur ses rivaux de l’Opposition.

LA COHABITATION, UN MOYEN DE STOPPER BENNO

C’est bien pourquoi, il ne faut pas faire la fine bouche, mais se féliciter dans un premier temps de la naissance de la grande Coalition électorale Manko Taxawu Senegaal, mise sur pied par l’Opposition.

Même si elle a des relents de « sauve-qui-peut » face au rouleau compresseur du clan présidentiel adossé à une Police et une Justice instrumentalisées, elle permettra, à tout le moins, d’infliger une cinglante défaite politique à la nouvelle maffia politico-affairiste de Benno Bokk Yakaar, en l’empêchant d’atteindre la barre fatidique des 50%, ce qui prouvera son caractère sociologiquement minoritaire.

Si l’Opposition dans son ensemble arrivait à être majoritaire à l’Assemblée Nationale, elle empêcherait effectivement le Président de continuer à travailler de la manière dont il le fait actuellement et qui n’a rien à voir avec la façon dont les patriotes vénézuéliens – et avant eux, Salvador Allende et ses camarades chiliens – s'évertuent à libérer leurs peuples des griffes de l’impérialisme américain.

Une défaite de BENNO pourrait mettre un terme – même si c’est de manière provisoire - à ce partage indécent du gâteau (avec de forts relents de corruption), qui a brouillé tous les repères de la vie politique nationale, occasionnant une crise profonde au sein des élites politiques largement discréditées.

Nous n’en voulons, pour preuve, que la tourmente, qui agite tous les partis de la Coalition présidentielle (AFP, parti socialiste), les dernières en date étant la démission du secrétaire général de la LD et la tempête médiatique provoquée par les turpitudes du frère du président, qui indexe l’entourage de son frère, accusé de comploter contre l’APR, ce qui lui a valu une réplique salée du président du groupe parlementaire de Benno Bokk Yakaar à l’Assemblée Nationale.

QUE NOUS PROPOSE MANKO ?

Il ne s’agit, pas pour autant d’occulter les insuffisances des partis de Manko Taxawu Senegaal, qui semblent se focaliser sur les conséquences et non sur les véritables causes de la mal-gouvernance du régime de Macky. En effet, leur résolution, faisant office de profession de foi, marquée du sceau d’un électoralisme démesuré, se contente de lister tous les travers de la gestion actuelle du gouvernement de Benno tandis que les solutions préconisées au-delà du flou, qui les caractérise, font l’impasse sur la nécessité d’une refondation institutionnelle. Ces formations politiques persistent à occulter l’héritage des Assises Nationales et certaines parmi elles rêvent même de restaurer la gouvernance désastreuse de la dynastie Wade. On ne peut passer sous silence la mutation en catimini d’une Coalition devenue électorale alors qu’au départ elle avait pour vocation la défense des libertés individuelles, la lutte pour une gestion transparente des ressources naturelles et la bataille sur le code électoral. Que dire des rumeurs de résurrection politique de l’inamovible secrétaire général du PDS annoncé comme tête de liste de Manko ?

Au-delà des rivalités entre les Coalitions BENNO et MANKO, qui toutes deux ne semblent aucunement intéressées par une véritable responsabilisation des masses populaires et des couches travailleuses, il est temps pour les partis de la Coalition Sam Li Ñu Bokk de prendre date et de s'investir pour la matérialisation des conclusions des Assises Nationales et des recommandations de la C.N.R.I.

Il ne faut, à aucun moment, perdre de vue, qu’au lendemain de la défaite de Benno Bokk Yakaar lors des prochaines législatives, un rapprochement spectaculaire pourrait s’opérer entre libéraux et socialistes des deux camps dans le but de préserver les intérêts supérieurs de leurs "maîtres à penser" impérialistes, au grand dam de la cause du progrès social.

NIOXOR TINE




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