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VOLS, CRIMES, VIOLS, ABUS: L’AVOCAT, UN DÉFENSEUR DE TOUTES LES CAUSES


Lundi 27 Avril 2015

Viols, crimes, vols, prédations... Y a-t-il une déontologie à respecter dans la nature des causes à défendre ? Si la majorité des Sénégalais ne maîtrise pas totalement les ficelles qui entourent le métier d’avocat, ils ne restent pas indifférents dès lors qu’il s’agit de se prononcer sur l’emploi souvent plein de préjugés. Tantôt angélisé, tantôt diabolisé, le métier d’avocat attire à la fois sympathie et désapprobation.

Un avocat ne défend-il pas mieux son client, lorsqu'il le croit innocent ? « Un mauvais avocat, probablement. Un bon avocat, non. L'avocat n'est pas juge, il n'est pas non plus le garant de la morale : c'est un défenseur avant tout, d’un accusateur, et d’un tiers. L'avocat ne défend pas un homme, il défend d'abord un dossier. La seule question utile qu'il doit se poser est : le dossier contient-il des éléments suffisants pour entraîner la condamnation de mon client ? » souligne maître Bamba Cissé.

Son confrère Me Yéri Ba affirme lui : « Je ne prends cependant pas n’importe quel dossier. J’ai des limites, je trouve que certaines causes ne méritent pas attention de ma part. Pour autant, je ne critique pas les confrères qui les enrôlent. C’est une question de choix, de tempérament et d’éducation », fait-il savoir.

«Pour faire son travail, l’avocat doit rester objectif. Un avocat qui dit oui à tout ne sera pas efficace. Pour être franc, dans les dossiers au pénal, j'ai une règle d'or : mon premier ennemi, c'est mon client. Pourquoi ? Parce qu'il va parfois me mentir pour tester son histoire sur moi, afin de me faire croire qu'il est innocent pour titiller ma corde sensible», relève l’avocat qui capitalise déjà plusieurs années au barreau.

Devoirs de l’avocat

L’avocat est soumis à des règles professionnelles et déontologiques. Il prête serment dès qu’il accède à la profession. « Je jure, comme avocat, d’exercer mes fonctions avec dignité, conscience, indépendance, probité et humanité », dit-il, entouré de ses confrères, amis et famille, au cours d’une cérémonie qui, de par son caractère, revêt une solennité.

Ce serment prêté, l’avocat se tourne alors vers ses activités. Cette activité amène le professionnel du Droit à côtoyer honnêtes citoyens, personnes malencontreusement accusées, brigands de grands chemins, voleurs, pédophiles... Dans ce tri, pas simple, l’avocat est tout de même appelé à enrôler certains et à défendre leur cause.

La société ayant foncièrement horreur des contre-valeurs, s’en prend dès lors à la personne qui se propose de prendre la défense d’un présumé pédophile par exemple.

«Un avocat peut refuser un dossier ou une affaire pour des motifs propres ; et il ne peut intervenir dans une même affaire pour plusieurs personnes, s’il existe entre elles un conflit d’intérêts. S’il accepte une affaire, l’avocat doit la conduire jusqu’à son terme », renseigne maître Bamba Cissé.

Toutefois, il peut, dans certains cas, s’en décharger, mais il doit prévenir son client en temps utile pour lui permettre de sauvegarder ses intérêts. A l'inverse, le client peut désavouer son avocat, s’il n’est pas satisfait de ses prestations, précise-t-il.

L’avocat est tenu au secret professionnel et doit donc garder confidentiel le contenu de ses discussions et courriers ainsi que les informations dont il aurait eu connaissance au cours d’échanges avec l’avocat de l’adversaire.

L’assistance d’un avocat n’est pas obligatoire, mais elle est conseillée. En dépit du fait que la personne poursuivie est la mieux placée pour connaître, apprécier et choisir ses moyens de défense, il est difficile, en l’état d’une procédure, de mettre en œuvre une défense efficace sans l’aide d’un avocat.

L’assistance d’un avocat est-elle obligatoire ?


« Qu’il s’agisse de prouver l’innocence ou d’atténuer la responsabilité, la démonstration doit reposer sur une connaissance exhaustive du dossier, tenir compte du point de vue de l’accusation, être cohérent avec les faits et s’appuyer sur des éléments matériels. L’ensemble des actes de l’information étant soumis à des formes prescrites par le Code de procédure pénale, il appartient à l’avocat de s’assurer de leur régularité », relève Me Bamba Cissé.

Partant, l’avocat connaît en principe d’avance, en âme et conscience, si les faits imputés à son client sont fondés ou non. C’est dans cette perspective qu’il prend la décision de défendre celui-ci.

D’aucuns à la recherche de notoriété, ou désirant se frayer une place, défendront n’importe quelle cause. D’autres, mettant en avant l’aspect pécuniaire, enrôleront des dossiers, en faisant fi des possibles préjugés. Il y a enfin ce lot d’avocats qui, persuadés que la dignité humaine doit prévaloir dans la défense de toutes et de tous, prendront un dossier au nom de la préservation de cette dignité humaine.

Il n’est nullement indiqué qu’un avocat doit se limiter à tel ou tel autre dossier. Il est libre de s’engager à prendre le dossier dès lors que celui-ci est suspendu en justice.

Rôle de l’avocat avant le procès


L’avocat est le seul à avoir un accès complet et permanent au dossier, lequel contient la totalité des déclarations transcrites par les enquêteurs, des auditions et interrogatoires effectués par le juge d’instruction, ainsi que la totalité des constatations matérielles et des expertises techniques.

La communication de pièces du dossier à la personne mise en examen ne pouvant se faire qu’avec l’accord du juge d’instruction, il est important de s’assurer que l’avocat a pris effectivement connaissance de l’ensemble du dossier.

«L’avocat suit le déroulement de l’instruction et peut solliciter par écrit l’accomplissement d’actes de la procédure : interrogatoire du prévenu, audition d’un témoin, confrontation, transport sur les lieux, production d’une pièce utile à l’information, complément d’expertise ou contre-expertise. Il vérifie les conditions de détention et la régularité de la procédure et doit soulever toutes nullités de l’information susceptibles de conduire à l’annulation de toute ou d’une partie de la procédure », note Moussa Aw, juriste.

L’avocat s’entretient avec le prévenu sur le dossier afin d’en réduire les zones d’ombre, les incohérences et élaborer une stratégie. Il assiste son client devant le juge d’instruction, le prépare aux interrogatoires en lui rappelant le contenu de ses déclarations à la police et en lui indiquant la possibilité ou non de changer le contenu de ses déclarations. Il devra expliquer et justifier les raisons des contradictions ou modifications contenues dans ses nouvelles déclarations.

Perspicacité, force argumentaire et combines

Certains n’y vont pas par quatre chemins. Ils jurent devoir leur salut au travail extraordinaire abattu par leur avocat, alors qu’ils étaient décidément dans de sales draps. A cet égard, le témoignage de ce jeune homme nommé Modou, âgé de 33 ans, est très éloquent.

Accusé d’association de malfaiteurs, de vol en réunion et d’irruption chez autrui, il a été arrêté pour avoir été cité par un des prévenus comme faisant partie de la bande de malfaiteurs. Ce qui du reste n’était aucunement avéré, car le jeune homme ne s’est jamais illustré dans ce genre d’activité.

La perspicacité et la force argumentaire de son avocat l’ont définitivement tiré d’affaire le jour du procès. Aujourd’hui, c’est avec recul et philosophie qu’il évoque cette partie sombre de sa vie.

« Après avoir discuté avec mon avocat, il a tout de suite compris que je n’étais ni de près ni de loin mêlé à ce dont on m’accuse. Il s’est dès lors constitué pour défendre vaillamment ma cause. Cela a pris du temps, mais je m’en suis, en définitive, sorti. C’est cela l’essentiel », laisse-t-il entendre.

Dans le métier d’avocat, la liberté prime sur tout. Ce professionnel du Droit est en effet appelé à défendre la cause de personnes désemparées ou désespérées, à la recherche du salut. Des causes souvent différentes qui s’articulent sur le défi de faire ressurgir la vérité. Paré de leurs robes noires, ces professionnels du Droit formés à bonne école usent de procédures et de textes pour la manifestation de la vérité.

« Les avocats, quand ils font bien leur travail, exercent l’un des plus beaux métiers. Rien n’est plus méritant que de sortir d’affaire quelqu’un d’innocent qui était voué à la condamnation sur la base de simples accusations entièrement fallacieuses », laisse entendre Modou.

D’autres particuliers fustigent les honoraires parfois élevés des avocats. Ce qui, à coup sûr, les empêche de pouvoir faire recours à leur service. Des personnes souvent aux revenus peu conséquents et rattrapées par les turpitudes de la vie. Les avocats spécialisés dans les affaires criminelles bénéficient d’une grande latitude pour déterminer le montant de leurs honoraires.

La seule limite est imposée par le Code de conduite professionnelle du tribunal : les montants pratiqués ne doivent pas être « excessifs » au regard du travail requis et de l’expérience de l’avocat. Le code précise néanmoins qu’il revient à l’avocat de juger du caractère « excessif » de ses honoraires.

« Les règles de facturation font l’objet d’un accord entre l’avocat et le client au début de l’affaire. Est signée une sorte d’avance de laquelle sera déduit le montant de la prestation. Il y a deux modes principaux de facturation : horaire et forfaitaire. La tarification horaire est la plus usitée », laisse entendre cet avocat sous le sceau de l’anonymat.

Des facteurs objectifs (taille de la firme, nature du crime, nombre de personnes travaillant sur l’affaire, fortune de l’accusé...), mais aussi subjectifs (réputation de l’avocat, expérience, complexité estimée de l’affaire...) entrent en compte dans le montant de la note, avoue-t-il. Un des principaux obstacles qui font renoncer des clients potentiels à solliciter les services d’un avocat est donc la question du coût.

Les robes noires sont-elles assoiffées d’argent, âpres au gain et méprisantes pour les revenus modestes ? « Bien sûr que non. Les avocats exercent une profession libérale. Cela signifie que notre seule source de revenus, ce sont les honoraires que nous versent nos clients. Ces honoraires sont libres. Il n’existe aucun tarif comme pour les médecins. Notre but est de gagner de quoi vivre, comme tout le monde. Cela semble simple à dire. Pourtant, pour y arriver, il faut que chaque mois nous encaissions de quoi payer d’abord nos charges et frais. Une vision du métier en dehors du prétoire permet d’en mesurer la portée », souligne maître Bamba Cisé.

D’autres citoyens rencontrés fustigent le comportement de certains avocats parce que prêts à défendre toutes les causes. « Aux yeux de ce genre d’avocats, tout ce qui compte c’est de se faire de l’argent, peu importe la manière », assène Adama Guèye.

Il est, à ses yeux, déplorable que certains avocats prennent par exemple l’initiative de défendre des pédophiles, des assassins, des agresseurs ou des voleurs. « Ce genre de personnes ne méritent pas égard malgré l’argent qu’elles sont prêtes à débourser, leur cas ne doit pas être pris en compte », tranche-t-il sans état d’âme.

LESOLEIL





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