Phare des Mamelles: 152 d'histoires dans le ciel dakarois

C'est le 1er avril 1864, il y a donc de cela 152 ans, qu’une lumière jaillit sur l'une des collines des Mamelles, qui culmine au sommet de Dakar. Il s'agit d'un signal unique, un repère et pour les bateaux et pour les avions. Cette lumière, c'est celle du phare des Mamelles, le deuxième phare le plus important de l'Afrique, après celui du Cap de Bonne Espérance, en Afrique du sud. Retour sur l'histoire d'une lumière de 53 km de portée devenue aujourd'hui un pôle d'attraction touristique.

Une route goudronnée permet d'accéder au sommet de l'une des collines des Mamelles où se dresse le phare du même nom, juste derrière la cité léboue de Ouakam. Le trajet n'est pas aisé, car le chemin se fait à pied sur une colline haute de 150 mètres, au milieu des plantes touffues qui jalonnent le long de la route, en cette période hivernale.
Au sommet, le bâtiment en question clôturé d'un mur blanc est assez complexe. Pour y entrer, il n'y a qu'une seule grande porte en fer de couleur noire. Les bâtiments construits tout autour servent de locaux pour les gardiens de phares, le maître phare et le personnel. Un escalier métallique en boucle permet d'accéder tout au sommet, au bâtiment abritant le phare des Mamelles.

Les Mamelles : deux volcans éteints

A l'intérieur, le décor est fascinant. Bienvenue au phare des Mamelles. Les noms des Mamelles viennent des deux collines, celle abritant le phare et l'autre le monument de la Renaissance, deux anciens volcans. Des volcans jumeaux aux allures de deux seins, d’où l’appellation des Mamelles. Deux volcans éteints depuis les années 1864, dont ces hauts sommets sont la résultante de la coulée de laves. «C'est le deuxième phare le plus important de l'Afrique, après celui du Cap de Bonne Espérance, en Afrique du Sud et la 18e au monde», informe d’emblée le gardien du phare.

Concernant l’édifice, il explique qu’il s'agit de deux phares d'accueil et deux phares d'atterrissage. «C'est à dire que quand les bateaux viennent à Dakar la nuit, il fait sombre et on ne voit pas plus loin que le bout du nez. Donc, les bateaux, avec ce phare, à 53 km de distance, ils voient le phare qui tourne et ainsi ils peuvent situer la terre. Et toutes les 5 secondes, il y a un faisceau de lumière qui passe. Et ces 5 secondes indiquent aux bateaux que ici, c'est Dakar. C'est le code, Dakar c'est 5 secondes. Et tous les navigateurs le savent», révèle Malamine Fall.

«Chaque 5 secondes, une lumière passe. Dakar, c'est 5 secondes»

Casquette bien visée, la cinquantaine, M. Fall retrace l'histoire du phare. Il souligne qu'avec cette lumière, les bateaux peuvent savoir que le Brésil est à l'Ouest, au Sud, il y a l'Afrique, au Nord-Ouest, on a les Caraïbes, Cuba, la Jamaïque, les Bahamas, New York, Washington et au Nord l'Europe.
«Ce phare a commencé à fonctionner le 1e avril 1864. Donc, il a 152 ans et quelques mois. A 53 km de Dakar, les bateaux vont apercevoir les phares. On a aussi un phare de secours d'une portée de 35 km. Ce phare des Mamelles est l'un des rares phares au monde qui guide à la fois et les avions, et les bateaux», narre le gardien de phare.

12 tonnes roulant dans un bain de 20 litres de mercure et 53 km de portée

S'agissant de la configuration du phare, le tour pèse 12 tonnes qui roulent dans un bain de 20 litres de mercure pour faciliter la rotation. Et lorsque le phare est allumé, une lentille optique autour de la lampe fait une rotation régulière, à un intervalle de cinq secondes. On l'appelle la lentille de Fresnel. Car elle porte le nom de son fabricant Alfred Fresnel. Il s’agit de ce physicien français qui a créé ce jeu d'optiques utilisé pour les phares.

Des explications du gardien du phare, à l'époque, il n’y avait pas d'énergie, on utilisait les feux de bois qu'on mettait sur les deux collines pour éloigner les bateaux de la côte. Après, s'ensuit les lampadaires à pétrole, puis le gaz. «Aujourd'hui, c'est électrifié, dit-il. La lentille amplifie la lumière et la projette loin, comme les phares de voitures. Ça a démarré avec les ampoules de 6 000 watts, après ce fût celles de 3 000 watts, puis les 1 000 watts».

Une vue panoramique de la ville de Dakar et de ses environs»

«Mais ces ampoules coûtent très cher. Et aujourd'hui, nous avons des ampoules allogènes de 250 watts, qui sont plus économiques et ont une durée de vie de 3 000 heures. Elles ont l'équivalent des 1 000 watts, avec une portée de 53 km», renseigne le gardien de phare.
Du haut du phare, on a une vue panoramique de la ville de Dakar et de ses environs. Le regard s'étend jusqu'à la Pointe des Almadies, l'île aux Sarpents et l'île de Gorée. Cette colline des Mamelles est le point culminant de Dakar, soit 126 mètres au-dessus du niveau de la mère, alors que celle abritant le monument de la Renaissance culmine à 95 mètres au-dessus du niveau de la mère.

Le phare culmine à 147m au dessus du niveau de la mer

Le bâtiment du phare fait aussi 21 mètres. Soit un total de 147 mètres de hauteur pour le phare. Raison pour laquelle, certaines télévisions de la place, des Ong, des organisations internationales, mais aussi certaines ambassades ont des antennes relais sur le phare pour avoir un bon signal.
«Quand le ciel est dégagé, surtout après les pluies et que la marée est basse, à partir d’ici, on peut apercevoir la Petite côte vers Mbour, mais aussi Yenn, Toubab-Dialaw, Ndayane et même Popenguine et au-delà. C'est pourquoi on dit que dans 5 siècles, Dakar va devenir une île complète. La mer s'arrête ici et à Cambérène. Parce que la mer avance chaque année d'un centimètre avec le réchauffement climatique. Et Djifer va être raillé de la carte du Sénégal bientôt», croit savoir Malamine Fall.

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