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ON A RETROUVE… SUN SOOLEY EX-MEMBRE DU GROUPE DE RAP «JANT BI»: «Pourquoi Jant Bi a éclaté»

Vendredi 17 Janvier 2014

Il a marqué d’une belle empreinte le hip-hop sénégalais. C’était à l’aube des années 90, alors que les groupes de Rap faisaient la pluie et le beau temps sur le paysage musical sénégalais. Membre du défunt «Jant bi», Sun Sooley, de son vrai nom Souleymane Bâ, a eu son moment de gloire. Plus d’une décennie après l’éclatement du groupe, il remonte sur ses grands chevaux, pour renouer avec le public sénégalais. Un autre style, un autre genre musical… L’Obs a retrouvé un autre Sun Sooley, version reggae-man, critique et acerbe…



Le Sénégal vous avait perdu de vue depuis quelques années. Qu’êtes-vous devenu entre temps ?

Il est vrai que je ne suis pas revenu au Sénégal depuis deux bonnes années. Même avant, lors de mes précédents séjours, je n’ai pas concrètement fait des apparitions publiques. Plein de choses se sont passées durant mon absence du Sénégal, dont la réalisation d’un album «One day inna Babylon» (un jour à Babylone). Il est sorti physiquement en Italie et en digital, il est disponible partout dans le monde. Il a enregistré un énorme succès en Italie et a été nommé meilleur album reggae en 2010. J’en suis très fier et c’est la raison qui m’a poussé à venir le présenter aux Sénégalais. J’espère qu’ils l’apprécieront également. Lorsque j’ai eu cette reconnaissance de la part des critiques italiens, j’ai eu une sorte d’explosion médiatique. Ce qui m’a permis de faire de grands festivals, de grandes scènes partout en Europe. J’ai même partagé une scène avec Alpha Blondy. Il y avait des milliers de personnes et cela m’a donné le courage et l’envie de revenir au Sénégal, pour faire partager l’histoire de cette production qui sera sur le marché, ce 23 janvier. Ensuite, j’entame une tournée avec les Alliances françaises du Sénégal et de la Gambie. J’ai un programme bien fourni. Je vais faire un peu le tour du Sénégal (Dakar, Saint-Louis, Saly, Banjul, Kaolack, Ziguinchor).

Vous aviez déjà annoncé la couleur de l’album avec un single «Sen System» qui avait fait le tour du petit écran. Pouvez-vous nous en parler ?

«Sen System», c’est l’abréviation de Sénégal système. J’entends tout simplement par là que le système sénégalais ne fonctionne pas. J’ai l’impression que les politiciens se f… de nous.

Vous aviez donc un œil sur l’actualité au Sénégal ?

Avec l’Internet, on sait à la minute près ce qui se passe dans le monde et je ne suis qu’à cinq heures d’avion du Sénégal. Du coup, je suis au fil de l’actualité, d’autant plus que ma famille est basée ici. J’ai, à plusieurs occasions, effectué des allers-retours, j’ai pu par moi-même prendre la température du pays. «Sen System» parle justement de la mauvaise gérance de nos politiciens. Il y a des problèmes de santé, d’électricité, d’éducation, de transport et bien d’autres qui minent notre pays. Malgré cela, on jette de l’argent par la fenêtre. C’est vraiment aberrant. J’ai écrit ce morceau du temps de Wade et il est toujours valable pour Macky Sall.

Vous insinuez donc qu’après Wade, il n’y a toujours pas cette rupture tant prônée par Macky Sall ?

Il n’y a pas cette rupture. Heureusement que lorsque j’écris un morceau, ce n’est pas pour un temps limité. Si vous regardez dans les archives de la musique sénégalaise, je n’ai jamais chanté des chansons temporelles. C’est dire que le système sénégalais depuis l’indépendance ne fonctionne pas. Abdou Diouf, Abdoulaye Wade, Macky Sall et consorts, on en a marre. Il est grand temps que cela change.

Si vous aviez un jugement à faire du régime en place, lequel serait-il ?

Macky Sall tâtonne. Les Sénégalais attendaient de lui un véritable changement, mais il continue de nous faire courir. Nous savons tous qu’il est l’élève de Wade. Heureusement que ce dernier, lui, a construit des routes qu’il s’est empressé de terminer.

N’est-ce pas aller trop vite en besogne que d’apporter un tel jugement, puisque le régime n’a pas encore deux ans d’âge ?

Les débuts de ce régime n’augurent rien de bon. La plupart des Sénégalais sont de cet avis. Ils sont déçus par le régime actuel qui ne prend pas en compte leurs préoccupations.

Vous semblez être en phase avec le mouvement «Y en a Marre» dont les principaux personnages sont des rappeurs…

Je n’ai jamais eu l’occasion d’avoir les contacts des membres de «Y en a Marre», mais je les soutiens dans leur combat. C’est dommage que je n’avais pas été là au moment où le mouvement avait été mis sur pied, mais de très loin, je suivais ce qu’il faisait. Néanmoins, je soutenais leur combat à distance, à ma manière, à travers les chansons.

Il y a comme un changement radical de ton entre le Sun Sooley d’avant et celui d’aujourd’hui. Avec le «Jant Bi», vous étiez plutôt fleur bleue avec des chansons d’amour, notamment «boul ma dioylo», celle qui vous a révélé au public sénégalais ?

Les gens se sont beaucoup trompés sur le groupe «Jant bi». Nous étions les premiers en 1996 à faire entrer le hip hop dans les maisons. En ce temps, les rappeurs faisaient plus dans le Hardcore (Rap pur et dur). Plus dans un souci commercial, nous avons mis en avant une chanson d’amour. Nous avons été beaucoup plus subtiles et malins pour toucher le cœur des mamans et autres dans les chaumières. Mais dans l’album, nous avions un esprit très critique et engagé. C’est toujours mon cas. C’est une suite logique. Sun Sooley du groupe «Jant Bi» a été quelqu’un… je ne peux pas être moins que ça. Je suis un artiste engagé. J’ai vécu au Sénégal pendant 32 ans. Je suis expatrié depuis 9 ans. Aujourd’hui, j’ai 41 ans. J’ai mûri à travers mes textes, les voyages, les expériences. Je suis très engagé socialement et je ne peux être que ça. Par contre, je parle d’amour. Je parle aussi de paix.

Qu’est-ce qui a été à la base de l’éclatement du groupe «Jant Bi» ?

«Jant Bi», à une certaine époque, entre 1999 et 2000, nous avons fait notre dernier album (le troisième du groupe), qui est passé inaperçu parce qu’on n’a pas fait la promotion. C’était l’époque du changement du pouvoir avec l’arrivée d’Abdoulaye Wade. A cette période, les Sénégalais ne calculaient pas la musique parce que tout le monde était content du changement. Dans cette même période, notre frère Doudou a voyagé pour des raisons personnelles. Le côté social nous prenait à la gorge. On avait une famille, des enfants. Qui veut faire l’aventure pour gagner plus d’argent, tu es le bienvenu. On ne retient personne. Dès qu’il (Doudou Ndiaye Fall) est parti, on voulait faire avec Moussa Dieng la continuité, mais on n’avait plus le même feeling. Du coup, chacun a décidé de faire carrière solo. J’ai sorti en 2003 mon album «Siratikal Moustaqim» (le droit chemin) parce qu’à cette époque, j’avais pris le «wird» (oraison) Tidiane et je me suis consacré à la spiritualité. C’était un album typiquement reggae. Après, le «Jant Bi» ne s’est plus jamais retrouvé. On a toujours été des frères, on le restera. Aujourd’hui, je suis aussi un producteur. Je suis en train de produire Doudou qui est en Italie depuis une dizaine d’années. Moussa qui est ici est aussi un producteur. On a des liens très étroits.

Y a-t-il une chance de vous retrouver à nouveau pour faire renaître le «Jant Bi» ?

Il n’y a pas de chance que le «Jant Bi» renaisse. Par contre, il y a de grandes chances que l’on fasse un morceau ensemble, car beaucoup de Sénégalais nous demandent de faire le remix de «boul ma dioylo». C’est bien possible que nous le fassions.

Ne faites-vous pas partie des rappeurs qui se sont servis du rap pour s’expatrier ?

Non non ! Je ne suis pas de cette catégorie-là. Le «Jant Bi» a commencé à voyager en 1997. On partait et on revenait sans problème. Pourquoi on a émigré ? J’ai de la famille en Europe. Je suis allé et je suis resté, histoire de reculer pour mieux sauter. Rester au Sénégal, être populaire à travers la musique alors que tu n’as pas les moyens de t’acheter une voiture décente ou construire une maison. La musique ne nourrit pas son homme au Sénégal. J’ai vu comment vivent mes amis artistes qui sont encore là. C’est catastrophique. Il y en a qui ont réussi et qui ont tenu le coup, mais ce n’est pas évident. J’ai rejoint ma famille en France en 2005. Depuis, je suis resté et je fais des allers-retours. Mon souhait, c’est de revenir très fort et ceci est en train de se concrétiser petit à petit, puisque j’ai créé mon label. Je suis en train de produire des artistes sénégalais. Je suis en train de produire la première compilation du reggae africain avec une marée d’artistes du Mali, Congo, Mozambique, Mauritanie, Guinée, Sénégal… C’est une compilation qui jusqu’à quelque temps était parrainé par Alpha Blondi qui est un ami. Mais je suis en train de le virer sur Youssou Ndour qui a fait l’album Dakar Kingston. Je vais essayer de voir Youssou Ndour pour concrétiser ce projet.

En Italie, vous faites autre chose que de la musique ?

Je ne fais que de la musique.

Et vous gagnez bien votre vie ?

En Europe, la musique nourrit son homme. Je tourne pas mal. Un cachet en Europe, c’est dix cachets au Sénégal. Je vous assure que ça n’a rien à voir. Je plains franchement mes amis artistes talentueux qui sont en Afrique.

Vous avez changé de genre musical en adoptant le reggae. Pensez- vous que le public sénégalais vous suivra ?

Les Sénégalais adorent le reggae. La preuve, quand il y a Sean Paul, Morgan Heritage, Alpha Blondy ou Tiken Jah Fakoly qui viennent, les stades sont remplis. Pourquoi Sun Sooley ou Dread Maxim ne peuvent pas remplir les stades. C’est un complexe alors. Sun Sooley aujourd’hui représente dignement, je ne dis même pas le Sénégal, mais l’Afrique, en Europe. Je suis revenu pour présenter un album qui a été mixé et masterisé dans l’un des plus grands studios de l’Europe, à Milan. Cet album, je vais le présenter avec une qualité sonore au Sénégal pour montrer que le reggae sénégalais existe bien et est bien représenté.

Côté jardin, qu’est devenu le Sooley de «Jant Bi», le plus adulé par la gent féminine à l’époque ?

A 41 ans, Sun Sooley est père de famille. Il est rangé. Il est tranquille. Je vis paisiblement avec la femme que j’aime.

Une Sénégalaise ?

C’est vraiment privé. Je ne veux pas parler de ma vie sentimentale. J’ai de grands enfants. D’ailleurs, mon fils aîné a fêté ses 20 ans hier (mercredi 15 janvier)…

GFM



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