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Médoune Ndoye jeune pêcheur « brisé » par la Méditerranée : « Ce que je regrette… »


Samedi 23 Mai 2015

Médoune Ndoye en garde un souvenir amer. Agé de 36 ans le jeune homme est un pêcheur. Sa force naturelle, ses bras robustes attestent des longues années passées à tirer sur les filets. Il est trouvé, concentré à fond sur son travail en train de rabibocher ses filets sur cette plage sablonneuse de Soumbedioune. Loin des cotes européennes où il a vécu 1 mois. 30 jours avant d’être rapatrié sur ses terres natales.

Du rêve de rejoindre l’Europe par la mer pour donner un coup de fouet à son avenir envisagé sous un angle plus rose, Médoune est passé au cauchemar.

Il nous raconte son odyssée. «Sur la route les migrants sont confrontés à d’incessants rackets et traqués par des policiers et des douaniers opérant pour le compte de l’Union européenne. Ils subissent la faim, la soif, le froid, la violence», révèle t-il.

«Je ne savais pas que le voyage serait aussi compliqué même si j’étais conscient des difficultés auxquelles je serai confronté. Mais malgré tout cela j’ai pris mon courage à deux mains décidé à braver toutes les souffrances pour atteindre mon objectif. Le calvaire a duré deux longues années.

Des sacrifices il y’en a eu pour risquer ce voyage périlleux: une femme, deux enfants de 4 et 7 ans laissés derrière et une maman qui n’a pas hésité à vendre quelques bijoux pour aider son fils à avoir 1 millions de francs CFA dans les poches. Cette somme servira à payer les passeurs. Mais ce n’était pas tout car il fallait jouer à cache cache avec les gardes chargés de contrôler les clandestins qui seraient tentés de prendre illégalement le chemin de l’Europe. La pirogue qui va braver les 40 kilomètres séparant les côtes espagnoles de celles du Maroc pouvait maintenant prendre le départ avec à son bord les 400 aventuriers listés moyennant une somme de 500 000 francs CFA. Le périple en mer qui est l’ultime étape peut commencer.

«C’est dans la nuit, que la pirogue a pris le chemin de la méditerranée. Dans un premier temps la mer a refoulé l’embarcation sur la rive. Après quelques vérifications, on a décelé des trous dans la pirogue, mais on a réussi à colmater à l’aide de mastique.
La deuxième tentative était la bonne, on voguait tranquillement vers l’Espagne. certains d’entre nous étaient pris de mal de mer. Tout se passait plus ou moins bien quand l’eau commençait à avoir raison de la mastique et envahissait la pirogue. On a essayé en vain de boucher les trous avec nos habits, nos chaussures ou quelques choses qui pouvaient bloquer l’eau. Tous s’y mettaient en tout cas ceux qui n’étaient pas malades et pris de mal de mer. Je savais que ce n’est qu’une question de temps pour que la pirogue éclate. La moitié du chemin était parcourue après quelques jours en mer, il était hors de question de faire demi-tour comme le suggéraient certains pris de peur. Soudain une vague impressionnante a martyrisé l’embarcation qui craque définitivement. C’était le début de la fin… du rêve. L’horreur était à son comble. Les plus malchanceux étaient déjà noyées certains camarades qui ne savaient pas nager mais qui étaient plus rusés s’agrippaient aux corps comme s’ils leur servaient de bouées de sauvetage. chacun se débattait comme il pouvait pour sortir indemne de cette catastrophe.

Ceux qui savent nager comme moi s’en sont sortis car par la suite un bateau de pécheurs blancs alerté par les cris de détresses apportait les premiers secours. Ils lançaient des bouées de sauvetage. Les gardes côtes sensibles à ce spectacle désolant sont aussi venus à notre secours nous faisant monter à bord de leur embarcation pneumatique. Pendant ce temps les corps inertes flottaient sur l’eau». Son récit terminé, Médoune se tait un peu et reste un moment pensif.

En rembobinant le film de son aventure le jeune pêcheur n’arrive toujours pas à réaliser qu’il a consenti tous ces sacrifices pour rien du tout.

Médoune Ndoye sera de retour sur les rives de Soumbédioune après plus deux années.

Parti loin de sa terre natale, loin de sa famille, il a maintenant retrouvé les siens et se contente de son activité de pêcheur malgré les modestes revenues .

Aujourd’hui, Medoune semble regretter cette aventure même si des aînés qui ont tenté la même expérience ont réussi à découvrir cet Eldorado qu’est l’Europe, faisant profiter à leurs familles les délices d’une vie aisée sous un toit décent, à l’abri du besoin.

«On s’aperçoit de la richesse de notre terre natale dés que l’on s’éloigne laissant derrière sa famille proches amis etc.. Vaut mieux user ses forces ici au Sénégal avec nos petits boulots et nos maigres ressources plutôt que de risquer sa vie à rejoindre l’Europe qui ne garantit pas à tout le monde un avenir meilleur si ce n’est parfois la promesse d’une désillusion», raisonne t-il.

SENEWEB





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