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Opinion

MAMADOU DIA, ANCIEN PRÉSIDENT DU CONSEIL: PAR DEVOIR DE MÉMOIRE, UN ÉDIFICE OU UN LIEU PUBLIC À SON NOM...


Mercredi 8 Avril 2015

J’ai suivi, avec nostalgie, loin de mon pays, le 4 avril dernier, les différents programmes concoctés par nos différentes télévisions, (que nous avons, fort heureusement, la chance de suivre de l’étranger), relatifs à la commémoration du 55ème anniversaire de l’accession de notre pays à la souveraineté internationale.

Et c’est ainsi que j’ai pu découvrir un excellent documentaire (félicitations à nos confrères de la Rts et d’Intelligences Magazine) intitulé «De Senghor à Macky Sall», diffusé sur la Rts vers 14h. Le documentaire retraçait, entre autres, les grands moments ayant précédé et suivi le 4 avril 1960. Parmi les images qui défilaient, celles d’archives, en noir et blanc, de l’Institut National de l’Audiovisuel (Ina), Bry Sur Marne, Paris en France, ont particulièrement polarisé mon attention.

Des personnages-clés de notre histoire y apparaissaient, à la fleur de l’âge, avec beaucoup d’élégance et de noblesse. Des images qui forcément contrastent, (le temps est passé par là), d’avec celles que nous autres, nés après l’indépendance de notre pays, avons connues des illustres acteurs de notre histoire.

Et parlant d’histoire, quand j’ai vu, à maintes reprises, dans le documentaire, le Président Mamadou Dia aux côtés du Président Senghor, du Général De Gaulle et à des moments cruciaux de notre histoire comme lors de la création de la fédération du Mali ou encore à la célébration de la première fête de notre indépendance, avec aussi la cérémonie d’inauguration de la place de l’Indépendance, je me suis demandée pourquoi, oui pourquoi, en tout cas à ma connaissance, aucun lieu public ne porte le nom de l’ancien Président du Conseil ?

Et en fouillant sur internet, j’ai découvert, sur Seneweb.com, un article reprenant les paroles de Rolland Collin, ancien directeur de Cabinet de Mamadou Dia, c’était sur les ondes de la Radio futurs médias (Rfm) en décembre 2013, qui s’offusquait du fait qu’au Sénégal «aucune rue, aucune impasse ne porte le nom de Mamadou Dia. Cela me surprend».

Moi aussi je trouve cela surprenant, et suis convaincue que bon nombre de citoyens sénégalais et d’ailleurs, partagent cette surprise. L’histoire a besoin de mémoire pour survivre. Aujourd’hui nous avons les lycées Valdiodio Ndiaye, Blaise Diagne, Lamine Guèye, Charles de Gaulle, les universités Cheikh Anta Diop, Gaston Berger, les stades Demba Diop, Aline Sitoé Diatta, la célèbre avenue Léopold Sédar Senghor, Charles de Gaulle, la mythique place Faidherbe et j’en passe.

Et il suffit que le regard ou l’oreille s’arrête sur un de ces lieux pour se souvenir de nos illustres personnages. Que savons-nous de Mamadou Dia, sinon de ce qu’on a voulu nous faire retenir des événements dits de décembre 1962 ?

Et nous citons, pour nous rappeler cette épisode de notre histoire, (excusez de la longueur), le Docteur Seydou Kanté, en décembre 2012, dans une publication parue sur Dakaractu.com, intitulée «Relations entre Mamadou Dia et Senghor : La crise politique initiale qui a failli déstabiliser le pays».

Le Dr Kanté écrivait : «En 1960, année de l’accession du pays à la souveraineté internationale, le Sénégal opte pour un modèle politique assez proche du modèle français antérieur à 1958, avec des pouvoirs très importants donnés au Président du Conseil et un rôle limité au président de la République. Cette répartition des pouvoirs va être au cœur d’une grave crise politique.

Elle oppose le Président du Conseil Mamadou Dia et le président de la République Léopold Sédar Senghor, les deux chefs du premier exécutif sénégalais, en réalité déjà en désaccord à la veille de l’indépendance du Sénégal. En effet, en 1958, lorsque le Général De Gaulle propose un référendum aux différentes colonies françaises, débouchant sur une communauté franco-africaine, les deux hommes font état, à Gonnevillesur-Mer, en Normandie, de leurs divergences.

M. Dia souhaite la «rupture», alors que le Président Senghor propose le maintien du Sénégal dans une communauté avec la France. La seconde option l’emporte sur la première, mais, après l’indépendance, les divergences entre les deux hommes s’accentuent en outre sur la manière de gouverner le pays. En effet, selon la constitution initiale, Mamadou Dia, en sa qualité du Président du Conseil, représente le Sénégal sur le plan international.

Senghor qui, initialement, ne souhaitait pas être en charge de l’exécutif, finit par trouver cette situation inconfortable, lui l’Homme de lettres mondialement connu, car elle le prive d’une tribune internationale. En décembre 1962, après la tenue à Dakar d’un colloque international où Mamadou Dia tient un discours en totale contradiction avec les visions de Senghor et des ministres, la crise entre les deux chefs du pays atteint son paroxysme. Une grande partie des députés dépose une motion de censure.

Le Président du Conseil Dia s’y oppose en faisant évacuer l’Assemblée par l’Armée. Le 17 décembre 1962 au soir, la motion est néanmoins votée au domicile d’un député. Le lendemain, Mamadou Dia est arrêté avec plusieurs de ses amis.

Du 9 au 13 mai 1963, il est jugé pour haute trahison par la Haute cour et condamné à la déportation perpétuelle à l’extrême sud-est du Sénégal (Kédougou), à plus de 750 km de la capitale. Cet éloignement de Mamadou Dia le prive du soutien de ses partisans qui se rassemblaient préalablement devant l’endroit où il était détenu à Dakar. Il résulte de cette crise politique, une importante révision constitutionnelle en 1963, avec la suppression du poste de Premier ministre et l’instauration d’un régime présidentiel.»

Aujourd’hui, au-delà de ces événements, les générations présentes et surtout futures, ont le devoir de se souvenir du Président Mamadou Dia à travers un symbole. L’histoire en a besoin. Je suis convaincue que le Président Macky Sall qui, comme moi, est né après les indépendances, saura réparer cet oubli, pour ne pas dire injustice. Et les générations futures ne manqueront pas de dire :

«Il était une fois un Président de la République qui avait réparé une injustice...» Il y a plusieurs manières d’entrer dans l’histoire. Le Président Dia y est entré, rendons-lui hommage en nous souvenant de lui autrement que par cette page sombre de notre histoire politique.

PAR AMINATA MBODJ
LEQUOTIDIEN





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