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Opinion

Les lundis de Madiambal Diagne: Khalifa n'aurait pas dû


Mardi 8 Mars 2016

Ce n’est pas dans de telles conditions d’humiliation qu’Ousmane Tanor Dieng accepterait de céder les rênes du PS. La déchirure semble profonde, la plaie saigne abondamment et il faudrait sans doute du temps pour la cicatriser


Les incidents survenus, samedi dernier, à la Maison du Parti socialiste à Colobane, à l’occasion de la réunion du Bureau politique convoqué aux fins de déterminer la position des «Verts» quant au référendum du 20 mars prochain, peuvent émouvoir mais ne surprennent guère.

Des jeunes se réclamant partisans du maire de Dakar, Khalifa Ababacar Sall, ont violenté des responsables du parti, saccagé les locaux, hué et insulté le secrétaire général Ousmane Tanor Dieng (OTD). Cette fois-ci, ils ont attaqué à la hussarde. Ils auraient rudoyé, frappé même des responsables du parti comme le ministre Serigne Mbaye Thiam et le maire de Kaffrine et porte-parole du parti, Abdoulaye Wilane. La furie de ces jeunes n’a pu être contenue que grâce à l’intervention, (ô combien opportune !), de Khalifa Sall qui, à l’inverse, est, à chaque fois, ovationné.

Cette situation traduit un malaise profond au niveau de ce parti. Tout le monde savait que la confrontation entre Ousmane Tanor Dieng et Khalifa Sall allait être fatale. Suite à de premières escarmouches lors de la rentrée de l’école du Parti socialiste le 9 janvier 2016, nous prévenions, dans une chronique publiée le 18 janvier 2016, que les deux hommes allaient s’affronter violemment d’autant que la stratégie de Khalifa Sall de continuer à faire le dos rond, à chaque fois que ses proches s’en prenaient à OTD, ne saurait perdurer.

On ne peut pas s’empêcher de penser que si Khalifa Sall s’était démarqué clairement ou avait condamné les insultes proférées à l’endroit de Ousmane Tanor Dieng ce jour-là, certainement que les derniers bien regrettables incidents n’auraient pas eu lieu. A la vérité, la récurrence de tels procédés d’un «bon Iznogoud» accuse Khalifa Sall. Le maire de Dakar et de surcroît secrétaire national chargé de la vie politique du Ps n’a plus d’excuses.

Déjà, en direction des opérations de renouvellement des instances du parti, en dépit d’une campagne médiatique remettant en cause le leadership de Ousmane Tanor Dieng, Khalifa Sall avait fait montre de contrition et avait tenu à réaffirmer une certaine loyauté à l’égard de Ousmane Tanor Dieng. Ses partisans sifflaient le secrétaire général. Aïssata Tall Sall était esseulée au front, devant la défection (lâche ?) de Khalifa Sall qui choisissait de voyager à la veille du congrès de renouvellement des instances du parti de juin 2014.

Les sifflets et insultes, adressés à Ousmane Tanor Dieng le 9 janvier 2016 par le même groupe de jeunes socialistes, laissaient Khalifa Sall avec un petit sourire en coin. L’intéressé se défend encore d’avoir ri des déboires de OTD. Des proches de ce dernier, comme le député Cheikh Seck, disaient n’être pas dupes. Ils désignaient Khalifa Sall comme le commanditaire de telles actions. Le modus operandi demeure le même et ce sont ces mêmes groupes de jeunes qui s’étaient dressés, au nom de Khalifa Sall, contre les Forces de l’ordre pour exiger que le maire de Dakar puisse continuer son projet controversé d’aménagement de la Place de l’Indépendance.

Il reste qu’il apparaît facile pour n’importe quel responsable politique de jeter un groupe de jeunes excités, pour ne pas dire une horde, pour insulter, saccager les lieux d’une réunion politique et la disperser. Pour autant, est-ce la bonne formule ou la bonne manière de gérer les divergences politiques ? Le débat politique devrait se mener au sein des instances et seul le rapport des forces arbitré par les suffrages exprimés par les militants devrait prévaloir.

En effet, il se dit que OTD contrôle les instances du parti pour avoir fini d’y placer ses partisans. Qui disait que nul ne devrait se plaindre de sa propre turpitude ? Si Khalifa Sall prétendrait avoir la préférence des militants, pourquoi n’avait-il pas revendiqué la place de chef au moment du renouvellement des instances du parti ? A ce que l’on sache, personne ne l’en avait empêché et qu’il en avait bien le droit. En démocratie, si on ne se présente pas à une élection, on ne devrait pas contester au candidat élu de l’être.

Aïssata Tall Sall qui s’était présentée contre Ousmane Tanor Dieng serait plus légitime pour contester la légitimité du secrétaire général mais, ironie de l’histoire, tout le monde se rappelle qu’elle avait été sacrifiée par le même Khalifa Sall au profit de Ousmane Tanor Dieng pour, disait le maire de Dakar, «l’intérêt supérieur du parti».

L’attitude des partisans de Khalifa Sall risque de braquer davantage et définitivement OTD. Ce n’est assurément pas dans de telles conditions d’humiliation que l’actuel patron des Socialistes accepterait de céder les rênes du parti de Léopold Sedar Senghor. La déchirure semble profonde, la plaie saigne abondamment et il faudrait sans doute du temps pour la cicatriser.

Par contre les échéances politiques n’attendent pas. Déjà, l’année prochaine, en 2017, au moins des élections législatives auront lieu. Le Ps sera obligé de former une coalition électorale. Ce parti qui perd inexorablement du terrain, d’une élection à une autre depuis sa débâcle électorale de 2000, semble ne plus pouvoir tirer son épingle du jeu que dans le cadre d’une coalition. Tous les sièges de députés et toutes les collectivités remportées par des élus socialistes ne l’ont été que grâce à des alliances politiques.

Khalifa Sall lui-même n’avait été élu maire de Dakar en 2009 que grâce à la coalition Benno Siggil Senegaal. Aussi, en 2014, il lui avait fallu constituer une alliance avec des partis et autres organisations de la Société civile pour pouvoir reconquérir son fauteuil de maire de la Capitale. C’est aussi un secret de polichinelle que le candidat du Ps à la mairie de Dakar avait été grandement aidé par le Parti démocratique Sénégalais (Pds) qui cherchait par ce moyen à barrer la route à l’ancienne Première ministre Aminata Touré.

Ousmane Tanor Dieng et ses proches s’inscrivent dans une logique de collaboration avec le régime de Macky Sall et donc pourront s’arrimer au wagon de l’Alliance pour la République (Apr). Une telle posture politique sera impossible pour Khalifa Sall qui cherche à s’émanciper et qui, paradoxalement, voudrait s’évertuer à chercher la caution de son parti. Vu les dernières tournures de son duel avec le secrétaire général, lui sera-t-il encore possible d’être adoubé par OTD ?

Placé dans la même situation en 2012 et 2015, Khalifa Sall s’était cassé, avait ménagé OTD jusqu’à avoir son soutien. Tout porte à croire que OTD ne s’y laissera pas prendre à deux fois. C’est dire que les «hussards» de Khalifa Sall ont, en quelque sorte, abattu les cartes de leur champion.

Prématurément ? Malgré lui ? La manière peut desservir l’intéressé car il laisse l’image d’avoir cherché à opérer un putsch politique, étant incapable d’imposer un challenge démocratique à un rival. Seulement, «il faut toujours mettre les cartes sur tables afin de bien définir les limites de l’inacceptable», disait Daniel Desbiens.

LEQUOTIDIEN




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