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Politique

Les Grands Entretiens Avec Babacar Justin Ndiaye sur Dakaractu : Ce que Ousmane Camara n'a jamais dit...


Jeudi 28 Avril 2016

Vous avez, semble-t-il, passé votre jeunesse à cheval sur deux cercles, pour utiliser la terminologie de l’administration coloniale, c’est à dire ceux de Diourbel et Kaolack ?

Oui. C’est exact! J’ai pratiquement passé la plus grosse partie de ma jeunesse à Kaolack. Je suis natif de Diourbel, mais très tôt exilé Kaolack. Une jeunesse passée à Kaolack, avec des apparitions vacancières à Diourbel. Mais c’est vraiment entre Kaolack et Saint-Louis que j’ai passé toute ma jeunesse. Ce que j’ai appelé un jeune sans jeunesse, parce que nous avons plongé très tôt dans le tourbillon.

Dans lequel des cercles vous avez commencé votre cycle primaire ?

Mon cycle primaire je l’ai entamé en 1939. Je devais avoir 7 ans, à Diourbel, mais très rapidement handicapé par une blessure qui m’a ramené à Kaolack pour des raisons, disons : socio-culturelles. Dans l’entendement de nos familles, on pensait que l’homme devait être formé loin de sa famille. Et en tant que fils unique, c’est ainsi que j’ai été envoyé chez mon oncle maternel pour justement être « dressé» ou « initié », donc faire de moi un homme et non une espèce de femellette. (Rires). C’est ça la trame explicative de mon exil à Kaolack.

Au regard de votre date et de votre lieu de naissance, on peut déduire que vous n’aviez pas le privilège d’être citoyen français, à l’instar des natifs de Saint-Louis ou de Gorée ?

Si, si, si… J’étais dès ma naissance citoyen français, puisque mes deux parents étaient des citoyens français. Certes, je suis né à Diourbel, mais mon père est né à Saint-Louis, et ma mère a vu le jour à Rufisque. Ce qui m’a valu d’être convoqué lorsque j’étais au Lycée, par le service militaire français, car j’avais oublié que j’étais né français.

Est-ce que ce privilège a joué ultérieurement dans votre carrière ?

Non. Aucune influence. J’allais même dire que ça a failli être un handicap. Au Lycée, nous étions assujettis à la préparation militaire. Il y avait une ségrégation entre les citoyens et les sujets, alors que nous étions tous des élèves du même établissement. Arrivé à la préparation militaire, j’étais avec deux de mes camarades. Sur une promotion qui en faisait une quarantaine, nous n’étions que deux citoyens. Nous passions nos journées en garnison. A notre grand étonnement, au déjeuner, nous voyions que nos camarades qui étaient dits « sujets » n’avaient droit qu’à un bout de manioc cru ; tandis que nous les « originaires » nous avions droit à un repas conséquent à table. Cela nous a révolté, en voyant que nos camarades avec qui nous étions à l’internat, avec qui nous partagions tout, étaient parqués comme du bétail. Et puisque ce genre de manifestation n’était pas acceptable dans l’armée, j’ai eu quelques ennuis. Donc le fait d’être citoyen français m’a causé quelque déboire.

Ségrégation entre natifs de la même colonie. Ah le colonialisme !

A Saint-Louis, au lycée Faidherbe où je suis arrivé, en novembre 1946, je faisais partie de la première promotion des boursiers de l’AOF.

Est-ce qu’il y a quelques noms devenus célèbres qui vous viennent à l’esprit ?

Oui, ceux d’Abdourahmane Dia qui a été ministre et ambassadeur, Mamadou Ibra Ngom, Fernand Brigo qui a été un cadre de la compagnie aérienne Air Afrique. Il y avait des camarades non sénégalais mais qui ne sont plus de ce monde.

Le baccalauréat ?

Nous avons fait le bac en 1953.

L’université était embryonnaire…

Justement c’était l’embryon. Nous faisions partie de l’une des premières promotions. En 1950, il y avait l’institut des hautes études de Dakar. Il y avait l’Ecole de droit. Le tout rattaché à l’Université de Bordeaux.



Vous aviez une bourse ?

Automatiquement, tout étudiant était attributaire d’une bourse.

On parlait des bourses de Lamine Guèye ou bourses municipales. Le dramaturge Douta Seck en a bénéficié, tout comme Faly Bâ futur directeur de Dakar-Marine…

C’est comme Abdoulaye Wade aussi. Faute d’enseignement supérieur sur place, lamine Guèye a octroyé des bourses municipales à un certain nombre de personnes dont des gens titulaires de diplômes d’Enseignement moyen. Il n’était pas exigé d’avoir le bac pour aller faire ses études à la métropole. Les gens étaient envoyés en France pour se perfectionner.

Effectivement Abdoulaye Wade a été instituteur, avant de poursuivre vers les cimes…

Exact! Effectivement, comme beaucoup d’autres, parce qu’ils étaient obligés de faire l’Enseignement court à Blanchot, pour aller ensuite à William Ponty. Soit pour devenir médecin ou instituteur.

Comme Houphouët Boigny, Modibo Keita, Diori Hamani etc...

Voilà effectivement on les appelait les Pontyns.

Ce qui n’est pas votre cas. Vous avez quitté Dakar pour Paris, muni de quel diplôme ?

La licence en droit en 1957. Là aussi, le système colonial est tel qu’on est obligé de s’arrêter en licence, soit pour aller enseignant ou atterrir au barreau comme avocat. Il fallait avoir la mention pour prétendre au doctorat qui n’existait pas à Dakar. Nous n’étions que deux Amadou Sow, futur directeur de l’USB et moi même.

Et Maître Lamine Guèye, docteur en droit avant vous…

C’est bien avant nous, puisqu’ il a fait ses études en France. A Dakar le plafond c’était la licence.

Manifestement il fallait être excellent ?

Oui, oui, oui. La sélection était sévère.

On associe fortement votre nom à la Fédération des Étudiants d’Afrique noire de France (FEANF). Quand et comment a débuté ce combat ?

J’ai dit dans l’ouvrage que je me suis mis dans la catégorie des jeunes sans jeunesse, du fait de mon engagement politique anti colonial dès le Lycée Faidherbe… Après, nous avons créé l’Institut des Hautes Études de Dakar (NDLR : ancêtre de l’Université), l’Union Générale des Etudiants de Dakar qui est devenue, par la suite, l’Union des Étudiants d’Afrique Noire qui avait comme pendant, la FEANF en métropole. C’est là où j’ai commencé à militer dans cette organisation qui était fortement anti coloniale.
Vous me facilitez la transition. Arrivé en France, j’ai intégré la FEANF.

Vous n’avez pas présidé la FEANF

Non, j’étais le Vice-président. C’est le togolais Koutikloui qui était président.

Le Guinéen Charles Diané a, lui aussi, présidé aux destinées de la FEANF. Adversaire intransigeant de Sékou Touré, le docteur en médecine Diané s’est exilé à Libreville, au Gabon…

C’est juste. Il a commencé ici, avec moi-même, comme Président de l’Union Générale des Étudiants d’Afrique noire. Nous avons continué. Il y avait également feu Hamat Bâ. J’ai étais chargé des relations extérieures.

Des témoins de cette époque rapportent que vous étiez doté d’un fabuleux talent oratoire qui impressionna même Benoit Frachon, un hiérarque du Parti Communiste français. Parlez-nous de cet épisode et de cette de votre parcours !

De par mes fonctions, j’étais le chargé des relations extérieures. Donc je devais participer et rencontrer toutes les organisations qui existaient en France. C’est ce qui m’a donné la chance d’être sur certaines tribunes. Ce qui m’a valu la réputation d’être un grand parleur et peut-être « éloquent » comme vous le rapportez. Mais notre organisation a encore des membres de grand courage comme Alpha Condé qui était à notre section de Toulouse, et notre aîné Abdoulaye Wade.

Et votre indéfectible ami Amadou Aly Dieng ?

Nous étions exactement dans la même foulée puisque nous sommes partis de Dakar ensemble. Pendant que j’occupais les relations extérieures, il était secrétaire général adjoint et s’occupait des affaires sociales et culturelles. Nous avons été côte à côte, et nous avons combattu côte à côte, en restant unis jusqu’à la fin. Il est natif de Diourbel comme moi. Nous avons même gardé les vaches de nos parents ensemble.

Curieusement, vous avez pu passer le filtre ou le tamis colonial. Normalement, un produit étincelant de la FEANF devait être catalogué et contré aux portes des grandes Écoles…

D’abord, on n’a pas pu m’empêcher d’aller en France. Car, j’avais mon passeport français. On a essayé de m’empêcher de ne pas avoir le passeport puisque jugé élément subversif… Donc j’ai pu, avec mon passeport, aller où je voulais. Mais le filtre des Écoles existait. Il faut quand même mettre à l’actif de nos formateurs, le fait qu’entre le système colonial et eux, il y avait un fossé. Le Gouverneur de la colonie du Sénégal, Bernard Cornut-Gentil alias BCG, ne nous aimait pas. Nous avions organisé un certain nombre de manifestations et nous considérions que les Senghor et autres étaient des complices. Dans ce cadre-là, l’autorité politique a fait pression sur les enseignants pour nous empêcher d’avoir des diplômes.

N’empêche, vous avez intégré la magistrature. Comment ?

Dès son retour au pouvoir, en 1958, le Général De Gaulle a créé une école pour former des magistrats français puisqu’il n’en existait pas en France. Il n’y en avait que pour les coloniaux. En France, il n’y avait que l’ENA. Mais puisque nous venions dans le cadre de la Communauté franco-africaine, De Gaulle avait octroyé des places à certains pays pour assurer la formation de magistrats et, aussi, assurer la relève des magistrats français dans une Afrique en route vers l’indépendance. A cet effet, le Centre National de Formation Judiciaire (CNFJ) a vu le jour. Le CNFJ devait recevoir 40 élèves majoritairement français. Nous étions quatre Sénégalais : Mme Marie-José Crespin de Gorée, El Hadji Diouf, André Gilbert et moi même. Nous étions choisis non pas par la France mais par la fédération du Mali. J’ai été choisi par Kéba Mbaye qui était directeur de cabinet de Boubacar Guèye, ministre de la Justice de la Fédération du Mali. Kéba Mbaye était mon aîné à Kaolack. Donc, c’est la Fédération du Mali qui m’a envoyé au CNFJ.

Vous devriez alors jeter la FEANF dans les eaux de la Seine. Adieu la FEANF et son combat ?

Non, j’avais déjà fini mes études après avoir fait mon doctorat. Et pendant ce temps là l’indépendance est arrivée. Donc ma carrière à la FEANF était finie. C’est comme ça que la Fédération du Mali m’a recruté comme magistrat stagiaire. Ensuite est venue la balkanisation, avec les indépendances.

Votre militantisme n’a pas retenti négativement sur votre carrière ?

Je vais donner l’exemple concret du Sénégal. Avant l’indépendance on avait Senghor, député du Sénégal au Palais-Bourbon, Mamadou Dia sénateur, Sékou Touré député de Guinée. Dans notre journal, nous les attaquions vivement.

En dépit de ces frictions, ils vous ont fait confiance ?

Oui justement c’est ça le paradoxe. La différence de perception et parfois l’opposition – même physique – ne nous a pas empêché de travailler ensemble. Il faut mettre cette souplesse d’esprit, à l’actif de nos aînés. Ce qu’on ne voit pas aujourd’hui.

Mais les besoins insatiables en cadres pour les jeunes Etats devaient primer sur le reste des considérations dérisoires. N’est-ce pas ?

Le besoin de cadres devait logiquement primer sur le fait de chercher à éliminer un adversaire. C’est un mérite à mettre à leur actif. Une anecdote savoureuse : après que je suis devenu ministre de Senghor, le Président Hamani Diori du Niger Diori était étonné de me retrouver dans les salons de Senghor. Les relations étaient tellement tendues entre élus d’Outre mer et les étudiants qu’il était étonné de me retrouver dans le gouvernement de Senghor comme ministre. Et il n’a pas manqué de faire ouvertement la remarque à Senghor en lui disant : « tu fais de Camara Ousmane un ministre ? » Pour dire à quel point les relations étaient tendues.
Nous Sénégalais, avions une sorte de gentleman agreement qui démontre que la bataille politique n’avait pas de prise sur la valeur réelle des partenaires. Cette réflexion de Diori Hamani a fait sourire Senghor.

Au Niger, c’était la lutte à mort entre Diori Hamani et son opposant en chef, Djibo Bakary, successivement réfugié à Accra et à Conakry. Cependant, votre nomination à la tête de la Sûreté Nationale avait déboussolé les observateurs, vu votre appartenance antérieure au PAI…

Là aussi c’est un principe que Senghor avait posé. Nous devons beaucoup à Senghor pour la mise en place d’un État de droit. Il n’a pas voulu tenir compte des personnes. Il avait estimé, au lendemain de l’éclatement de la Fédération du Mali, qu’on devait mettre en place des institutions avec l’installation de la Cour Suprême, notamment. Une autre anecdote. A la cérémonie d’installation de cette Cour, le Président Senghor avait invité son collègue Tsiranana de Madagascar. Dans l’aréopage, il y avait Mamadou Dia, Président du Conseil, Lamine Guèye Président de l’Assemblée Nationale etc.... Le juge Isaac Foster s’est adressé à Senghor en ces termes : « Monsieur le Président de la République même nos erreurs s’imposeront à vous ». A l’endroit de Mamadou Dia, il dira ceci : « Si vos arrêtés ne sont pas conformes à la loi, nous nous opposerons à leur promulgation. » Se tournant vers le corps diplomatique, il ajoutera : « Excellences, vous pouvez dire à ceux que vous représentez que le Sénégal a une justice indépendante ». C’est à ce titre que Senghor a estimé que la police devrait être dirigée par un magistrat. Le premier directeur de la Sûreté était Leyti Niang qui fut l’un des premiers magistrats du Sénégal et un camarade de promotion de Kéba Mbaye. Et c’est après les évènements de 1962 qu’on a désigné un commissaire pour en faire le Directeur de la Sûreté. Lorsque le calme est revenu au lendemain du procès de 63 et du vote de la nouvelle Constitution, Senghor est revenu aux fondamentaux de l’Etat de droit, en nommant un magistrat comme directeur de la Sûreté. C’est comme ça que j’ai été nommé patron de la Police.

Quels souvenirs saillants gardez-vous de cette présence au cœur de l’Etat et des secrets d’Etat ?

J’y suis resté 7 ans de 64 à 1970. Il s’est passé bien des choses … J’ai eu à connaître le maquis de nos amis communistes, comme Amath Dansokho.

Vous avez géré l’attentat de la tabaski ?
Oui, mais aussi l’assassinat de Demba Diop à Thiès et pour déboucher sur les graves événements de 1968 et 1969 où véritablement le pouvoir n’a tenu qu’à un fil avec un grand Général, Jean Alfred Diallo allergique au coup d’Etat militaire C’est cette grande tourmente qui a retenu mon attention. J’ai pu voir de l’intérieur comment la rue pouvait déboulonner un pouvoir bien qu’assis sur des bases solides. Senghor avait la légitimité qu’il fallait, mais il a failli être emporté par la bourrasque.

Vous avez été, en tant directeur de la Sûreté nationale, la cheville ouvrière de l’expulsion du Sénégal, de la star sud-africaine Myriam Makéba. Racontez-nous !

Visiblement, le Président Senghor n’aimait pas Myriam Makéba. D’abord, il trouvait son style et sa danse… vulgaires. Ensuite, sa proximité voire son rôle d’agent d’influence de Sékou Touré, de Cuba et des Panthères noires etc... tout cela excédait Senghor. Durant son séjour dakarois, elle multipliait les slogans anti-impérialistes, les discours à tonalité propagandiste. Bref, elle agaçait au plus haut niveau. On m’a demandé de l’expulser du territoire, avant la fin de sa série de concerts.

Vous citez, plus haut, Jean Alfred Diallo. Il y a un autre Jean non moins intéressant. Quelles furent vos relations avec Jean Collin ? Étant entendu que les relations entre Habib Thiam et Jean Collin d’une part, et entre Jean Collin et Famara Ibrahima Sagna d’autre part, étaient exécrables… Jean Collin n’était pas votre patron parce que vous avez quitté la Sûreté avant son arrivée ?

Mon patron d’alors, le ministre de l’Intérieur, Amadou Cissé Dia, a été remplacé par Amadou Clédor Sall. Moi, j’ai quitté mon poste pour intégrer le gouvernement du nouveau Premier ministre Abdou Diouf. Lorsqu’on me nommait Directeur de la Sûreté, Jean Collin était Secrétaire général du gouvernement. Puis, il a pris la place du défunt André Peytavin, au ministère des Finances. Donc pas de rapports avec lui.

Je me suis laissé dire que le puriste Habib Thiam avait relevé une flopée de fautes dans un document écrit par Jean Collin. D’où le début de leur mésentente. Est-ce vrai ?

Je ne saurai le confirmer.

Abdou Diouf, lui, va plus loin que tout le monde. Il qualifie Jean Collin de bandit ou presque, dans ses mémoires. Votre opinion ?

Je ne partage pas ce point de vue. Je pense que pour être juste – dans la lignée des gens que Senghor cherchait, détectait et propulsait – on peut considérer Jean Collin comme un bâtisseur. Il a été une pièce maîtresse dans la mise en place de notre administration. Il était plus intéressé par la qualité du travail que par le temps de travail. Parce qu’il ne s’agissait de pas venir à huit heures, de mettre son chapeau et d’aller se promener…

Mais vers la fin, il est devenu le Père Joseph du régime, plus que l’éminence grise…

J’étais dans le gouvernement de Senghor, mon collègue Jean Collin étant ministre de l’Intérieur et moi successivement ministre de l’Information et ministre de l’Enseignement supérieur. Je dois dire que partout où il est passé et chaque fois que je l’ai sollicité, j’ai eu à apprécier sa connaissance du terrain. Je dois reconnaître en lui un grand administrateur. Maintenant que d’autres le considèrent comme un bandit, là …

Convenez-avec moi qu’Abdou Diouf le connaissait mieux que vous ?

Oui, il y a ce qu’on appelle le zaïr et le batine (le caché et l’occulte)….C’est pourquoi je ne peux pas partager le jugement des uns et des autres. Ce que j’apprécie, c’est la célérité dans la décision. Pas de tergiversations dans la prise de décision. Et ça aidait beaucoup dans des moments cruciaux où il fallait agir rapidement. Je ne peux pas être dans la turpitude …C’est pourquoi j’ai de l’admiration pour l’homme Jean Collin et le général Jean Alfred Diallo. Au demeurant, dès que Senghor est parti, on m’a envoyé à Londres. Pendant 4 ans, on m’avait exilé à Londres en qualité d’ambassadeur.

Était-ce une disgrâce ?

La question n’a pas été abordée par Abdou Diouf dans ses mémoires. On pensait, d’après les rumeurs, qu’on me destinait au sommet de l’État. Des rumeurs. Mais ce qui est constant et vrai : en 1981, je suis passé de ministre de l’Enseignement supérieur à rien du tout.

Dans la lutte pour le pouvoir post-Senghor, est ce que vous n’étiez pas plus proche de Babacar Bâ que d’Abdou Diouf ? N’était-ce pas le motif secret de votre éloignement en Angleterre ?

Non, c’était l’inverse. Diouf m’avait même consulté pour faire entrer certains dans le gouvernement. C’est cette proximité qui faisait croire à certains que je serai nommé ceci ou cela. Le réveil a été plus brutal que prévu. Senghor parti, moi aussi je suis parti.

Il y a, selon certaines sources, des zones d’ombre autour de la démission de Senghor. Mme Senghor, née Colette Hubert, aurait été horrifiée par les images de l’assassinat sauvage, par le Sergent-chef Samuel Doe, de tout le clan des Tolbert, sur la plage de Monrovia en 1980. Par ailleurs, un rapport du SDECE (services spéciaux français) sur la Révolution islamique d’Iran en 1979, aurait convaincu la France que le chrétien Senghor n’était plus un facteur de stabilité dans un Sénégal à majorité musulmane. Pire, il serait le meilleur tonifiant de la propagande islamiste revigorée par Khomeiny. Qu’en dites-vous et qu’en savez-vous ?

Mon intime conviction, ma vérité à moi, est que Senghor en véritable homme d’État, savait où il allait. Il avait préparé son départ. Ce n’est pas fortuit qu’il ait choisi Abdou Diouf en 70. Il a misé sur une génération pour la relève et il a estimé que pour former son remplaçant, il lui fallait un délai. Et pendant 10 ans il a formé une cohorte pour gérer le futur immédiat. Les événements de mai 1968 ont un peu précipité les choses. Il avait compris qu’il y avait un décalage : soit c’est lui qui était vieux, soit c’est le peuple sénégalais qui était jeune. C’est vous dire qu’il y avait une rupture. Il a dit au chef d’Etat-major, le Général Jean Alfred Diallo, en 1968 : « Si vous voulez, prenez le pouvoir ! ». Réponse de l’officier : « Ce n’est pas ça qui m’intéresse… ». Bref, Senghor avait incité des gens de ma génération, (Docteur Daouda Sow, Alioune Sène etc.) à mouiller le maillot. On avait commencé en technocrates, il voulait qu’on allât sur le terrain politique. Dans ce sens il avait même fait un décret pour dire que les magistrats détachés pouvaient avoir des activités politiques. Donc les photos affreuses du Libéria et un rapport secret n’ont pas été, à mon avis, décisifs.

Vous êtes juriste de formation, nanti d’une grande expérience, donc à l’aise sur les aspects juridiques de l’Histoire comme de l’actualité. En 1987, le duo Diouf-Collin a procédé à la radiation de tous les policiers du Sénégal. Etait-ce légal ou légalisé a posteriori.

A cette date, j’étais Président de la Cour suprême. Il y a avait un certain usage avec Senghor qui voulait que, pour certains textes à caractère important, on consultât la Cour Suprême. Dissoudre un corps aussi important que la police relevait au moins d’une consultation.

Oui, Monsieur le Président… Est-ce que lorsque les barbares étaient aux portes de Rome, on doit continuer les querelles byzantines, c’est-à-dire de finasser. N’oubliez pas que la manifestation policière devait passer sous les fenêtres du Président de la république. Vous mesurez…

J’aurai compris qu’on puisse, après le danger, punir les responsables. Mais qu’on puisse froidement radier tout policier sénégalais, qu’il soit à Dakar, à Bakel, etc. C’est ça qui est condamnable et que je n’ai pas apprécié.

Dans le même ordre d’idées, quel regard portez-vous sur les Chambres Africaines Extraordinaires qui jugent Hissène Habré ?

Plus l’appellation est longue, plus les questions se posent. On a l’impression qu’il s’agit de la juridiction des vainqueurs et on cherche des moyens sur des oripeaux. Je ne pense pas que cela soit la justice réelle. Je ne considérais pas ça comme une justice. C’est comme les gens qui tuent au nom de l’Islam ce n’est pas l’Islam qui tue les gens.

Et votre mot sur la CPI qui juge Gbagbo, Bemba, Blé Goudé. Aucun Dupont !

Ma question : pourquoi nous nous embarquons dans ces choses-là ? Nous montons dans le premier véhicule, après nous crions. Au lieu de dire que nous sortons, pourquoi nous entrons dans ces trucs là. Les États-Unis n’ont pas signé alors que nous, nous y entrons tête baissée. Il ne fallait signer le Statut de Rome, puisque les conséquences sont connues d’avance. Cela me rend triste le juriste que je suis. Je suis déçu.

On est dans les dernières minutes de notre conversation-marathon. L’alternance, en mars 2000, vous a trouvé hors du champ politique. Posture sereine pour bien l’apprécier. Qu’en dites-vous ?

Cette alternance de 2000 est la véritable mort de Léopold Sédar Senghor qui ne s’est pas trompé sur sa vision, mais s’est trompé sur nous que ce soit Abdou Diouf ou encore moi. Senghor ne s’est pas trompé, c’est nous qui nous sommes trompés. Parce qu’en 1968, déjà, il disait que les hommes de sa génération étaient finis et qu’il fallait mettre des jeunes. Et qu’on se retrouve, en 2000, avec Abdoulaye Wade. C’est l’échec.

Senghor et Wade étaient, selon vous, en opposition ou en complicité ?

Il n’y a jamais eu d’adversité réelle entre les deux. C’est pourquoi, Senghor lui donnait des qualificatifs assez affectueux comme Ndiombor etc... Il n’y avait aucune haine, mais il pensait qu’Abdoulaye Wade n’entrait pas dans ses plans. Il avait besoin de Wade pour son multipartisme. Et d’ailleurs Abdoulaye Wade lui rend bien cette affection, en se considérant comme héritier de Senghor. Pour Wade, Abdou Diouf est un hiatus.

Merci, Monsieur le Président !






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