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Gouvernance: MACKY SALL, 1000 JOURS AU POUVOIR


Vendredi 19 Décembre 2014

Pour le chef de l'État, la réélection est déjà dans la poche. Et il n’a peut-être pas tort d’être optimiste. Face à lui, c’est le désert. Et les rares oasis où fleurisse l’opposition, sont dans un état de délabrement avancé

Macky Sall vient de boucler 1000 jours à la tête du Sénégal. Pour espérer atteindre encore cette barre symbolique, il faudra qu'il soit réélu dans un peu plus de deux ans ou bien que son présent mandat coure jusqu’en 2019, contrairement à sa volonté exprimée. Dans les deux cas, ce sera le 14 septembre 2017 qu’il sera pour la deuxième fois dans le mille au pouvoir. Il se dit certain de rempiler, mais ce n’est pas gagné.

Ce vendredi 19 décembre est bien spécial pour Macky Sall. Il ne l’a peut-être pas remarqué. Son entourage et les plus de 65% de Sénégalais, qui l’ont élu le 25 mars 2012, non plus : il vient de passer mille jours au poste de président de la République. Soit exactement deux ans, huit mois et dix-neuf jours.

Il franchit cette barre symbolique au moment où l’année 2015, avec ses promesses et ses incertitudes, s’apprête à enterrer 2014 avec son lot de fortunes et d’infortunes. Double occasion pour le chef de l’État de faire ses comptes. Et, surtout, de formuler ses vœux dont le plus cher reste sans nul doute celui de jeter, à deux ans de l’échéance, les bases de sa réélection en 2017.

Ça, c’est dans le cas où Macky Sall réalise sa promesse de réduire son mandat de 7 à 5 ans. Le dernier mot revient au peuple sénégalais, qui devrait être convoqué en référendum au cours du second semestre de 2015.

Par contre si le projet de révision constitutionnelle est rejeté, le successeur de Wade restera en poste jusqu’en 2019. Il n’aurait pas, dans ce cas, réalisé sa principale promesse de campagne, mais ça ne serait pas de sa faute. Et donc s’il devait perdre le pouvoir par la suite, ça ne serait certainement pas à cause de ce ratage.

Mais pour le chef de l’État, le second mandat est déjà dans la poche. L’opposition comptant à ses yeux pour du beurre, il ne cesse de claironner que l’affaire ne sera qu’une simple formalité.

Il n’a peut-être pas tort d’afficher un tel optimisme. La conjoncture lui est favorable. Nettement. Face à lui, c’est le désert. Et les rares oasis où fleurisse l’opposition, sont dans un état de délabrement très avancé.

UNE OPPOSITION APHONE

Moustapha Niasse, leader de l’Afp et troisième au premier tour de la présidentielle de 2012, sous la bannière de Benno siggil Sénégal, a fait allégeance au chef de l’État. Promettant que son parti soutiendra sa candidature lors de la prochaine présidentielle. À l’annonce de cette nouvelle, les rares velléités sécessionnistes poussées dans les rangs des Progressistes ont été vite contenues. Macky Sall peut dormir tranquille.

Le Pds, première force d’opposition, est presque condamné à l’inaction. Il est comme une bête enragée mise en cage. Il s’agite sur place, se tourne et se retourne, sans se libérer de ses chaînes. Dans une tribune parue la semaine dernière dans le quotidien L’AS, Amadou Tidiane Wone, directeur de cabinet d’Abdoulaye Wade, avouait, à sa manière, cet état de fait : «Certains aimeraient bien nous confiner dans un feuilleton judiciaire tirant en longueur, pour contenir et neutraliser, les énergies de la nouvelle opposition née des résultats du scrutin de 2012. D’autres, pour solder leurs vieux comptes personnels avec le Président Abdoulaye Wade, voudraient réduire le débat politique à un procès contre sa personne, sa famille et leurs amis. Peine perdue !»

«Peine perdue» ? Pas si sûr. Car si le dessein de «certains» et «d’autres» est bien de détourner l’opposition de l’essentiel, c’est presque fait. Les libéraux et consorts ont disparu du vaste champ politique pour se retrouver sur l’étroit terrain judiciaire, et ça fait plus de deux ans que ça dure.

En outre, l’ancien ministre de la Culture est passé à côté des vraies causes du statisme qui handicape son parti. Oubli ? Pudeur ? Opportunisme ? Pédagogie ? Tout cela à la fois ? En tout cas, son diagnostic de la racine du mal est erroné. Le talon d’Achille du Pds et ses alliés reste Abdoulaye Wade. L’ancien chef de l’État s’entête à faire de la libération de son fils, Karim Wade, le seul combat qui vaille. Oubliant que la présidentielle c’est pour demain. Que pour espérer retrouver grâce aux yeux des Sénégalais, qui les ont chassés du pouvoir en 2012, les Libéraux doivent, d’une part, se choisir très vite un leader charismatique et, de l’autre, proposer un projet politique alternatif crédible. Un vaste programme qui devait être entamé au lendemain des dernières Locales, mais qui, depuis, est sans cesse remisé.

Rewmi aurait pu ramasser les dividendes des atermoiements du Pds et s’ériger en adversaire coriace contre le pouvoir, mais son leader, Idrissa Seck, n’affiche pas la grande forme. Il est pris en tenaille entre les désertions dans ses rangs et ses lugubres calculs politiciens qui brouillent sa ligne politique que l’opinion, voire certains de ses partisans, peinent à saisir.

Le Ps, qui a repris des couleurs depuis plus de cinq ans, aura son candidat pour la prochaine présidentielle. D’éminents responsables du parti estiment qu’il ne saurait en être autrement. Cependant, les Socialistes tardent à se mettre en ordre de bataille en vue de cette échéance qui arrive en grands pas. Et pour cause. L’ancrage des Verts dans la mouvance présidentielle n’autorise pas d’entrer ostensiblement en campagne avant l’heure. Et pis, le Ps est empêtré dans des querelles domestiques qui risquent de ruiner ses chances de retrouver le pouvoir lors de la prochaine présidentielle, près de 20 ans après la débâcle de 2000.

La reconduction d’Ousmane Tanor Dieng au poste de secrétaire général a calmé les esprits vindicatifs, mais elle n’a pas fermé les tranchées entre partisans de l’alternance au sommet du parti et les défenseurs de la continuité. Et au fur et à mesure que l’on se rapproche de la prochaine présidentielle, les positions s’affirment et se durcissent à propos de l’identité du futur candidat socialiste.

Tanor Dieng, qui avait promis de ne plus briguer la magistrature suprême, entretient le flou. Khalifa Sall ne fait plus mystère de ses ambitions présidentielles. Tandis qu’Aïssata Tall Sall, ragaillardie par sa reconduction à la tête de la mairie de Podor, remportée de haute lutte, seule, sans le soutien clair de son parti ni de la mouvance présidentielle, peut bien revendiquer la légitimité de porter les couleurs du Ps pour briguer les suffrages des Sénégalais. Entre une présidentielle et des Locales, il n'y a pas match, mais l'avocate n’écarte pas de descendre sur le terrain.

La gauche, de son côté, est bien lancée pour, une nouvelle fois, jouer les arbitres du jeu politique. En dehors d’AJ, tendance Mamadou Diop «Decroix», toutes ses têtes de Gondole (AJ de Landing Savané, PIT et LD, etc.) sont dans le camp présidentiel. Même si elles ratent rarement une occasion de critiquer le pouvoir, leur attachement à Benno Bokk Yaakaar ne souffre aucune ambigüité.

UN BILAN NE SUFFIT PAS

Dans ce contexte d’absence d’une opposition forte et de relative consolidation des bases de la Majorité, difficile de dire que Macky Sall a tort de déclarer que sa réélection est déjà acquise. Il peut même se permettre de sabrer le champagne à la fois pour ses mille jours au pouvoir et le nouvel an, qui s’annonce comme la dernière ligne droite en direction de la présidentielle- si celle-ci se tient en 2017. D’autant qu’au chapitre des réalisations, le chef de l’État ne manque pas d’atouts.

Au plan social, son bilan est chatoyant : baisse des prix de certaines denrées de base, couverture maladie universelle, bourses de sécurité familiale, baisse du prix du loyer, baisse de l’impôt sur les salaires, revalorisation des pensions des retraités et leur mensualisation, etc.

En outre, le Président Sall peut s’enorgueillir d’avoir lancé la traque des biens mal acquis, créé l’Office national de lutte contre la corruption (OFNAC), adopté la loi sur la déclaration de patrimoine, assaini les finances publiques, réussi l’audit de la fonction publique et lancé, dans la foulée, le Plan Sénégal émergent (PSE) dont les premiers fruits sont annoncés dans le courant de 2015. Sans compter que, depuis quelque temps, il incarne un leadership continental incontestable. Lequel s’est renforcé, notamment avec l’organisation du dernier sommet de la Francophonie. Ce qui a contribué à accentuer, symétriquement, son rayonnement ainsi que celui du Sénégal en Afrique et dans le monde.

Le tableau est globalement scintillant, mais il comporte quelques aspérités que le leader de l’Apr gagnerait à gommer au plus vite pour s’assurer une réélection sans tache. En effet, même si le pouvoir a multiplié les petits «cadeaux» pour le bonheur des Sénégalais, ce n’est pas encore la vie de château qu’espéraient ceux qui ont voté pour l’alternance le 25 mars 2012. Le coût de la vie reste élevé. Le chômage des jeunes est toujours prégnant. Dans les secteurs de la santé, de l’éducation, de l’énergie et de l’agriculture, entre autres, malgré des efforts notables enregistrés depuis plus de deux ans, les problèmes structurels d’hier sont en l’état.

Par ailleurs, le chef de l’État n’a pas encore donné suite aux conclusions de la Commission nationale en charge de la réforme des institutions. La paix en Casamance reste toujours un rêve. La traque des biens mal acquis est au point mort. L’implication de la famille présidentielle dans les affaires publiques devient de plus en plus inquiétante. Les affaires nébuleuses jalonnent les 1000 jours de Macky Sall au pouvoir : Petro-Tim, drogue dans la police, livre du colonel Alioune Ndao sur la gendramerie... L’Apr est ballottée entre les querelles intestines de ses membres et l’absence de structures formelles. Benno Bokk Yaakaar, qui tarde à se structurer, est secoué ces derniers jours par des tiraillements entre membres qui se regardent en chiens de faïence.

Sur toutes ces questions, le Président Sall est tenu de faire preuve de minutie s’il veut décrocher un second mandat sans accroc, en 2017 ou en 2019, et ainsi, le 14 septembre 2017, fêter 1000 jours supplémentaires au pouvoir

SENEPLUS





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