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France : l'interdiction du voile intégral validée par la justice européenne


Mardi 1 Juillet 2014

La Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) s’est refusée à une large majorité, mardi 1er juillet, à condamner la France à la demande d’une femme qui portait un voile islamique. La Cour siégeait en « Grande chambre », c’est-à-dire en assemblée plénière des 17 juges qui représentent les 47 pays du Conseil de l’Europe. Son arrêt est définitif.

La Cour de Strasbourg ne valide pas pour autant la loi française qui interdit le port du voile intégral. Au contraire, elle émet des réserves d’importance, mais dans ce cas précis, elle estime qu’il faut laisser aux Etats « une large marge d’appréciation ». Ce n’est pas une surprise : la Cour avait, dans une affaire comparable contre l’Italie, dû se livrer à quelques contorsions en matière religieuse pour ne pas froisser certains Etats sur une question particulièrement sensible.

La requête qui a conduit à la décision prise à Strasbourg avait été déposée le 11 avril 2011 par une Française musulmane de 24 ans qui portait tantôt la burqa (qui couvre entièrement le corps, avec une grille au niveau du visage), tantôt le niqab (qui couvre le visage à l’exception des yeux). La jeune femme indiquait que personne n’avait exercé de pression sur elle, et qu’elle portait l’un ou l’autre de ces voiles chez elle ou à l’extérieur, « mais pas de façon systématique », et qu’elle souhaitait pouvoir s’habiller comme bon lui semblait.

Elle avait invoqué trois articles de la Convention européenne des droits de l’homme, l’article 8 (droit au respect de la vie privée et familiale), l’article 9 (droit à la liberté de pensée et de religion) et l’article 14 (interdiction des discriminations). Elle avait ajouté, pour faire bonne mesure, l’interdiction des traitements inhumains et dégradants et la liberté de réunion, tous deux écartés d’emblée par la Cour.

ATTEINTE AU « VIVRE ENSEMBLE »

La Grande chambre admet que la loi française du 11 octobre 2010, qui interdit le voile dans l’espace public, constitue bien « une ingérence permanente » du droit au respect à la vie privée et à celui d’exercer librement sa religion. Mais elle estime que cette ingérence poursuit « deux des buts légitimes » prévus par la Convention : la « sécurité ou la sûreté » publique et la « protection des droits et libertés d’autrui ».

Sur la sécurité, la Cour a cependant des doutes : la loi française entendait lutter contre « la fraude identitaire » et « la nécessité de prévenir les atteintes à la sécurité des personnes et des biens ». Les juges européens estiment que l’interdiction absolue de porter le voile « ne peut passer pour proportionnée » que lors « d’une menace générale contre la sécurité publique », ce qui n’est pas le cas.

Quant à « la protection des droits et libertés d’autrui », le gouvernement français a fait valoir qu’il s’agissait de faire respecter l’égalité entre hommes et femmes, le respect de la dignité des personnes et celui des exigences de la vie en société, du « vivre ensemble ». La Cour n’a retenu que le dernier : « la clôture qu’oppose aux autres le fait de porter un voile cachant le visage dans l’espace public peut porter atteinte au “vivre ensemble” ». Elle dit comprendre que le voile met « fondamentalement en cause la possibilité de relations interpersonnelles ouvertes qui est un élément indispensable à la vie en société ».

Néanmoins, le concept du « vivre ensemble » lui paraît si « flexible » qu’il lui faut examiner si l’interdiction « est proportionnée au but poursuivi ». Elle admet que l’interdiction absolue du voile « puisse paraître démesurée » - c’est d’ailleurs l’avis de deux des juges. Tout d’abord compte tenu du faible nombre de femmes concernées, il était discutable d’« avoir fait le choix d’une loi d’interdiction générale ».

« CHOIX DE SOCIÉTÉ »

La Cour constate ensuite « que cette interdiction a un fort impact négatif sur la situation des femmes » qui portent le voile pour des raisons religieuses. Elle se dit d’ailleurs « très préoccupée » par « les propos islamophobes » qui ont marqué le débat sur le voile, et souligne « qu’un Etat qui s’engage dans un tel processus législatif prend le risque d’encourager l’expression de l’intolérance » : « des propos constitutifs d’une attaque générale et véhémente contre un groupe identifié par une religion ou des origines ethniques sont incompatibles avec les valeurs de tolérance qui sous-tendent la Convention ».

Après un commentaire aussi sévère, la condamnation de la France aurait pu passer pour acquise : pas du tout. La Cour estime de façon un peu jésuitique que l’interdiction du voile « n’est pas explicitement fondée sur la connotation religieuse des vêtements, mais sur le seul fait qu’ils dissimulent le visage ». Et que par ailleurs la sanction (150 euros maximum) est « parmi les plus légères » que la loi pouvait envisager.

seneweb





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