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Société

El Hadj Mansour Mbaye, communicateur traditionnel: Abdou Diouf, Wade, Macky et moi


Mardi 9 Février 2016

Il est l’incarnation de la sagesse, un monument et l’un des derniers mohicans de l’époque d’avant et d’après indépendance. El Hadji Mansour Mbaye a porté haut le flambeau culturel de notre pays. Médiateur social de premier plan, ce griot natif de Saint-Louis a accompagné tout le processus démocratique de l’histoire politique de notre jeune nation. Gardien du temple, une authentique bibliothèque vivante qui ne s’est jamais départi de ses leçons d’humilité et d’amour, l’ami du président Diouf est un modèle dans une société où les valeurs ont tout leur sens malgré les soubresauts de la modernité. Aujourd’hui, gagné par le poids de l’âge, l’homme respire pourtant toujours une certaine jeunesse. Il a encore le goût de la sape et des belles choses de la vie. Grand-père, qui ne peut jamais de se défaire de son tic « sa deug deug » (A vrai dire, en wolof), regarde l’avenir avec une dose d’optimisme. Il croit à l’émergence du Sénégal et se félicite des progrès réalisés par notre pays en si peu de temps. Dans cet entretien, El Hadji Mansour Mbaye revient sur la place que doit occuper le griot dans la société, parle de ses relations avec les présidents Abdou Diouf, Abdoulaye Wade et Macky Sall, mais également de ses rapports avec Léopold Sédar Senghor et le président Lamine Guèye.


El Hadji Mansour Mbaye, on vous présente comme un homme consensuel, comment vivez-vous votre statut de médiateur social ?

« Il s'agit d'une chose que j'ai héritée des mes ancêtres, de mon père. Dans ma famille, tout le monde incarne le statut de médiateur social. Il faut savoir que quand on est né dans un milieu où les gens sont dotés d'un esprit de médiation, on voudra forcément emprunter le même chemin. D'ailleurs, c'est pourquoi quand je suis au courant d'un malentendu, ou si l'on me met au courant d'un différend, je n'hésite pas à prendre mon bâton de conciliateur pour résoudre le conflit. Je préfère ne pas revenir sur les détails, mais j’ai pu assurer, dans ce pays, plusieurs opérations de médiation ».

Le Griot a toujours joué un rôle de médiateur dans notre société. Avez-vous l'impression que ce rôle est encore assuré par la jeune génération ?

D'abord, il faut préciser qu'il y a une grande différence entre notre génération et celle d'aujourd'hui. Toutefois, la nouvelle génération s'efforce d'assurer ce rôle de médiateur. Le seul problème, c'est qu'ils n'ont pas l'expérience que nous avions de notre temps. A l’époque, il y avait ce que l'on appelait le « Regroupement des grands griots du Sénégal ». Cette association rassemblait des gens comme Amath Ndiaye Samb, El Hadji Abdoulaye Nar Samb, des historiens à l'image de Demba Lamine, Assane Marockhya Coumba Ndiagane ainsi que de grands chanteurs tels que les Samba Diabaré Samb et tant d'autres. Cette génération est irremplaçable.

Vous êtes beaucoup imité par les jeunes griots, est-ce que vous voyez dans le lot quelqu'un qui soit capable de perpétuer votre œuvre ?

Je dirai oui lorsque je pense à un homme comme Mamadou Ndiaye Garmi et tant d'autres. Souvent, je me retrouve dans ce qu'ils font. L'ancien « Gardien de la Constitution », le président Abdou Diouf, me disait que lorsque quelqu'un est arrivé à un niveau où des gens imitent ses propos jusqu’à en gagner leur vie, décrocher des contrats d'emploi, fonder des familles, il doit remercier le bon Dieu. Et quand Garmi, Bécaye Mbaye ou bien même Khoutia parlent, je sens une certaine fierté.

Qui parle d'El Hadji Mansour Mbaye pense également au Parti socialiste. Qu'est-ce qui vous lie à cette formation politique ?

C'est parce que d'abord je suis Saint-Louisien. C'est très rare d'être originaire de cette ville sans être un militant du Ps. C'est le président Lamine Guèye qui a formé ce parti. Il s’agit d’un Saint-Louisien, du premier avocat noir de l'Afrique occidentale française. Lamine Guèye a fondé le Ps et y a intégré le président Léopold Sédar Senghor.

En un moment, grâce à lui, tout le pays était partisan de ce parti politique. Je suis né et j’ai grandi dans ce climat. Ainsi en tant qu'ami et parent du président Lamine Guèye, et ayant travaillé avec lui à la mairie de Dakar en 1948, je suis demeuré socialiste. Il faut aussi savoir que je me retrouve dans la doctrine du Parti socialiste. J'avais des rapports personnels avec Lamine Guèye.

Quels ont été vos rapports avec le président Senghor ?

J'avais de très bons rapports avec le président Léopold Sédar Senghor, mais quand il a quitté le président Lamine Guèye, en 1948, nous n’avions plus de rapports personnels. Car, je suis resté avec le président Lamine Guèye. On est parti aux élections du 17 juin 1951, le président Senghor nous a battus. Il était accompagné d’Abass Guèye. Encore aux élections de 1956, le président Senghor était avec Mamadou Dia, il nous a battus de nouveau. En 1957 et 1958, Senghor a tendu la main à Lamine Guèye pour la fusion. C'est ainsi qu'on a fusionné le Bloc démocratique sénégalais (Bds) et le Ps. Par la suite, Lamine Guèye est devenu le président de l'Assemblée nationale et Amadou Babacar Sarr, qui était secrétaire général du Parti socialiste du Sénégal et de la Mauritanie, est devenu ministre du Travail et Affaires sociales. Voilà ce qui nous a permis de nous réconcilier avec Senghor.

Avec votre fameuse formule « Le gardien de la Constitution », vous avez contribué à asseoir le pouvoir d’Abdou Diouf. Avec le recul, comment appréciez-vous votre rôle à ses côtés ?

Je crois qu'il s'agit d'un rôle important. Cela, en ce sens que le président Abdou Diouf est d'abord un parent à moi. Les relations entre nos deux familles ont existé bien avant notre naissance. Ces relations ont été maintenues jusqu'à ce qu’Abdou Diouf soit devenu président de la République. Personnellement, je connaissais son père, sa maman et ses tantes. Lorsqu'il fut président, sa mère lui rappelait nos liens de parenté et d'amitié. Sa cousine qui s'appelait Tening Ndoye a également eu à jouer ce rôle. Abdou Diouf a effectué sa première tournée dans le Sine Saloum avec des grands reporters comme Abdoulaye Nar, Iba Guèye...

C’est en écoutant la radio quand il quittait Kaolack pour aller à Kaffrine que le président a entendu que je l'ai appelé le gardien de la Constitution. Une appellation que Lamine Guèye avait donnée à Vincent Auriol lorsqu'il était président de la République française socialiste lors d'une visite officielle à Dakar. Il s'agit donc d'une formule que j'ai empruntée à Lamine Guèye.

Abdou Diouf était très content de cette appellation. D'ailleurs, jusqu'à présent s'il me voit, il ne m'appelle jamais par mon nom mais il me dit : «gardien de la Constitution». Lorsqu'il était venu à Dakar, lors du 15ème Sommet de l’Organisation internationale de la Francophonie (Oif), il m'a dit devant tout le peuple sénégalais : El Hadji Mansour, je te donne l'autorisation de dire maintenant à Macky Sall le «gardien de la Constitution».

Durant toute la durée du passage du président Abdou Diouf au pouvoir, c'est moi qui assurait sa présentation. Ainsi, il m'amenait partout avec lui, y compris lors de ses missions à l'étranger.

Comment avez-vous vécu la défaite du président Abdou Diouf et du Parti socialiste en 2000 ?

Il s’agit de la logique de la démocratie. Comme le disait le président Lamine Guèye: on ne peut pas arrêter la mer avec ses deux bras. Si ce n'était qu'une dualité entre partis politiques, le président Diouf n'allait jamais perdre le pouvoir. A la veille des élections de 2000, il y a eu une grande coalition autour du président Wade. Laquelle coalition regroupait des gens comme Amath Dansokho, Landing Savané, Abdoulaye Bathily… L’objectif était de battre Abdou Diouf au deuxième tour. Cela m'avait fait très mal car le président Diouf a fait beaucoup de choses dans ce pays. Il a fait des résultats dans plusieurs secteurs parmi lesquels la santé, l'hydraulique, l'assainissement, l’éducation... Mais comme il le disait bien : «quand le suffrage universel se prononce, je m'incline devant le suffrage universel»…

Il faut rappeler que malgré votre fidélité affirmée au Parti socialiste, vous avez eu de bons rapports avec maître Abdoulaye Wade...

Vous savez que le président Abdoulaye Wade a un frère qui s'appelle Adama Wade. Ce dernier est le père de Doudou Wade qui était le président du groupe parlementaire libéral. C'était mon ami. Quand le président Wade est venu, c'est son ami, l'ancien maire de Dakar et président du Senat, Pape Diop, qui m’a amené auprès de lui. Ce dernier m'a demandé personnellement de venir à ses côtés. Je lui ai répondu poliment que je suis derrière lui pour  tout ce qu'il fait pour la République. Par contre, je préfère qu'il me laisse dans mon parti, car je suis un socialiste dans l’âme. Toutefois, il faut signaler que nous avions eu de très bons rapports. Il avait beaucoup de considération pour moi et vice-versa.

Avez-vous l'impression que Me Wade a été le «président de tous les Sénégalais» pour reprendre votre formule ? 

Naturellement quand on est élu au suffrage universel, on est le président de tous les Sénégalais. On peut être contre votre politique, votre démarche ou vos actions mais, vous demeurez le président de la République au vrai sens du mot.

Quel regard portez-vous sur l'actuel président de la République Macky Sall ? 

J'ai connu Macky Sall avant qu'il ne soit président de la République. Je l'ai fréquenté aux côtés du président Abdoulaye Wade, comme ministre de l'Intérieur puis Premier ministre. Nous avons toujours eu d’excellentes relations. A chaque fois qu’arrivait le mois béni du ramadan, il distribuait un ravitaillement en denrées de première nécessité à tous les communicateurs traditionnels de la région de Dakar.

Mais, en ce qui me concerne, Macky Sall demandait à son griot Farba Ngom de me l’amener. Aussi, en tant qu'ami, je lui rendais visite souvent et ce malgré qu’on ne soit pas du même parti. Je me rappelle, à l'époque de son conflit avec le président Abdoulaye Wade, nous avons continué à garder de très bonnes relations. Son ami Farba Ngom, qui est son griot personnel, me considère comme son propre père. D’ailleurs, il a épousé ma fille. Il faut aussi préciser que Macky Sall est venu plusieurs fois chez moi pour me rendre visite.

En dehors de la sphère politique, vous êtes fervent talibé tidiane. Quels sont vos rapports avec Tivaouane ?

A une époque où il n’y avait pas encore de radio et de télévision, lorsque Cheikh Seydi El Hadji Malick Sy faisait ses prêches, c'est mon père Amadou Mbaye Maodo qui se chargeait de traduire ses propos. Mon père a vécu avec El Hadji Malick jusqu'à sa disparition en 1922. Je suis né dans cet environnement et on m’a donné le patronyme d’El Hadji Mansour ibn El Hadji Malick. Aussi faut-il rappeler que c'est El Hadji Mansour Sy qui m'a présenté à Lamine Guèye avant que ce dernier ne m'emploie à la mairie de Dakar. Par la suite, j'ai continué à entretenir d'excellentes relations avec la famille.

El Hadji Abdoul Aziz Sy Dabakh me demandait toujours de lui amener la radio et la télévision. Après lui, Serigne Mansour Sy «Borom daradji» a aussi continué dans cette même lancée. L’actuel khalife également, Serigne Cheikh Ameth Tidiane Sy Al makhtoum, me voue une très grande considération. On ne sait pas encore quand le khalife va sortir de sa retraite spirituelle mais le jour où il sera dehors, il recevra en premier Serigne Abdou Aziz Al Amine, puis Serigne Mbaye Sy Mansour, Maodo Sy et Mansour Mbaye.

Vous avez également de très bonnes relations avec les autres confréries du Sénégal à l'image de Touba. Qu'est-ce qui explique cela ? 

Mon père était très ami avec Serigne Moustapha Mbacké, premier  khalife de Khadimou Rassoul en 1927. Serigne Cheikh Gaindé Fatma, son fils aîné était notre ami. Il m'aimait beaucoup... Si je pars à Touba, on me donne la parole. Je suis en très bonnes relations avec Serigne Bass Abdou Khadre, le porte-parole. Une fois, je suis parti présenter mes condoléances au khalife général Serigne Sidy Makhtar Mbacké, il m’a félicité devant Abdoulaye Mbaye Pèkh par rapport à mon rôle de médiateur social. C'est aussi de la même manière qu'on me traite partout, dans les différentes familles religieuses du Sénégal malgré que je sois un Tidiane convaincu de la famille de Cheikh Sidy El Hadji Malick.

Vous êtes un témoin de notre temps, comment voyez-vous le Sénégal d'aujourd'hui ?

Je pense qu'au Sénégal, les gens doivent remercier Dieu vu la situation qui prévaut dans certaines parties de la sous-région. Partout, il y a eu un coup d'Etat sauf dans notre pays. Notre démocratie, elle nous est spécifique. Je pense que le président de la République, Macky Sall, fait de son mieux pour développer le Sénégal.

Dans le passé, si l'on nous disait que le nombre d’universités, d’hôpitaux allait augmenter, que des autoroutes à péage à l'image de celle qui relie Dakar et Touba seraient construites, personne n'allait le croire. Ce n’est pas facile de gérer le Sénégal. Nous sommes indépendants depuis 1960 mais le Palais n'était pas indépendant. Car, toutes les premières dames qui se sont succédé dans ce lieu avaient pour noms : Collette Senghor, Elisabeth Diouf et Viviane Wade. C'est la première fois que nous avons une grande dame sénégalaise au palais en la personne de Marième Faye Sall. Il s’agit d’une femme qui s'habille avec élégance, qui fréquente les mosquées, les églises. Elle se distingue par ses œuvres sociales.

Qu'est-ce qui fait que vous soyez absent depuis quelques temps de la scène publique ?

C'est simple. Avec l'âge, j'ai pris la décision de prendre ma retraite. Actuellement, j'ai des neveux, des fils, des petits-fils, pour assurer la relève. Il ne m'appartient plus d'aller dans les stades pour suivre de lutte où à Sorano.

En tant que témoin de l’histoire sociopolitique du Sénégal, quelle date vous a le plus marqué ?

Je dirai le 17 juin 1951, lorsqu’on a battu le président Lamine Guèye. Pourtant, ce dernier avait amené le président Senghor pour le nommer député malgré que son parti ne fût pas d’accord. Aux élections de 1948, Ndar, Gorée, Rufisque avaient tous voté pour Lamine Guèye. Les quatre communes avaient porté leur choix sur Guèye. Mais lorsque le statut des quatre communes a disparu et que tout le monde est devenu citoyen, le président Senghor, s’alliant avec les paysans, a alors battu le président Lamine Guèye.

L’autre date qui m’a particulièrement marquée, c’est celle du 17 décembre 1962, quand on a voté la motion de censure pour arrêter le président Mamadou Dia. Il n’a jamais fait un coup d’Etat. Peut-être qu’il a fait un coup de force en sortant les députés à l’Assemblée nationale. D’ailleurs, s’il voulait faire un coup d’Etat, il avait avec lui l’armée loyale, la gendarmerie et la police. A l’époque, les députés, qui avaient voté cette motion de censure, pensaient qu’ils seraient battus en retournant à la base, dans leurs départements. C’est la raison pour laquelle ils se sont coalisés pour voter la motion censure et faire chuter le président Mamadou Dia.

Quelle a été la personnalité qui vous a le plus marquée ?

C’est le président Lamine Guèye. Maire de l’Afrique occidentale française, il disait que pour qu’un pays émerge, il faut que ses jeunes aillent à l’école. C’est dans ce sens qu’il a envoyé beaucoup de jeunes Sénégalais, à l’époque, pour aller étudier à l’étranger. Il s’agit, entre autres, de Valdiodio Ndiaye, d’Abdoulaye Ly, d’Abdoulaye Wade, de Moustapha Wade. Avant lui, le gouvernement français n’octroyait que des bourses d’études vétérinaires. Lamine Guèye a bâti le fondement de ce pays. Souvent je me sens tellement mal quand les gens l’oublient. Il en est de même pour le président Dia, qui était un grand Africain, un grand Sénégalais. Il a marqué son temps.

Lors de la présidentielle de 2012, le candidat socialiste Ousmane Tanor Dieng avait comme slogan « Pour une République des valeurs ». Quelles sont-elles ?

Il s’agit de la dignité, du courage et du travail. Ce sont des valeurs qui ont toujours caractérisé l’identité sénégalaise.

Qu’est-ce qui, à votre avis, caractérise le citoyen sénégalais aujourd’hui ?

Je pense qu’il s’agit surtout de cette liberté d’expression. Aujourd’hui, dans notre pays, nous avons une presse libre.

Comment trouver l’évolution économique de notre pays. D’après vous, le Sénégal a avancé ou reculé sur le plan économique ? 

Je considère que le Sénégal est en marche. Je me souviens d’une époque où dans les villages il n’y avait que des lampes à pétrole. Actuellement, il y a de l’électricité presque partout. Avant, il fallait mettre des jours pour rallier une région.

Mais maintenant, nous disposons d’importantes infrastructures routières. Et je pense que nous devons rendre grâce à Dieu.  Nous pouvons arriver à l’émergence. Cette année, lorsque le  khalife général des mourides, Serigne Sidy Mockhtar Mbacké, a invité les gens à retourner à l’agriculture, des résultats très intéressants ont été enregistrés dans ce domaine. Aussi, en écoutant le compte rendu de la Journée de l’élevage, je pense que nous avons de quoi être optimistes pour l’avenir de notre pays.

Quel est le rôle, la place du griot pour une meilleure socialisation de nos concitoyens ?

Le griot est un roi. Mais l’impolitesse, l’absence de secret, la trahison, la mauvaise fréquentation peuvent l’empêcher de continuer à jouir d’un tel statut. Par exemple, je suis socialiste et Tidiane mais, cela ne m’empêche pas d’être dans tous les foyers religieux. Je suis ami avec des gens du pouvoir comme de l’opposition. Je suis très bien avec Macky Sall, qui est le président de l’espoir, celui que j’appelle « l’homme des grands projets de l’Etat ». Quand Abdoulaye Wade était là, je l’appelais « le président de tous les Sénégalais ». Abdou Diouf, je le nommais le « gardien de la Constitution ».

Quelle est la valeur qui vous est la plus chère chez un Homme ?

La personnalité et la dignité. Une personne doit être aussi un homme de parole.

Votre plus grande joie ? 

Je dirai le jour où j’étais assis à la place que mon père avait l’habitude de prendre pour interpréter les propos d’El Hadji Malick Sy. D’habitude, les paroles de mon père ne s’arrêtaient qu’au niveau de la mosquée. Mais moi, par la grâce de Dieu, j’ai la chance de m’adresser à tout le Sénégal, l’Afrique et l’Europe grâce à la magie de la radio et de la télévision pour passer le message du  khalife.

Un regret dans la vie ? 

Je n’en ai pas eu si ce n’est le jour où mon père et ma mère ont quitté ce monde.

Il y a une époque où vous animiez une émission nommée « Jakarlo », laquelle a contribué à la promotion de plusieurs artistes sénégalais…

Je faisais la grande nuit « Jakarlo ». Un jour, j’ai mis en ensemble Youssou Ndour et Thione Seck. Cela n’a pas été facile. J’ai pu également inviter des artistes comme Fambaye Isseu Diop, Khar Mbaye… Je me rappelle une fois qu’on avait même cassé les vitres de Sorano. Avec cette émission, j’ai eu beaucoup de choses. On m’a offert un titre foncier, une voiture. J’ai également lancé beaucoup d’artistes à l’image de Fatou Guewel.

Actuellement quel regard portez-vous sur la scène musicale sénégalaise ?

Quand un pays émerge, beaucoup de choses changent à la fois. Ce que nous désirions à notre époque n’est plus à la mode. D’un autre côté, il y a des gens comme Youssou Ndour qui ont un don. De la musique, il est parvenu à créer son propre parti et est devenu ministre. C’est une fierté pour nous.

Le Sénégal a enregistré récemment la perte de grands hommes de la culture en la personne de Doudou Ndiaye Rose et de Vieux Sang Faye. Avez-vous l’impression qu’ils ont laissé un vide ?

C’est une évidence. Doudou Ndiaye Coumba Rose et Vieux Sing Faye, paix à leur âme, ont laissé un grand vide. Vieux Sing Faye a hérité de son père Daouda Faye. A l’époque, si le président de la République française venait au Sénégal, c’est Daouda Faye qui assurait l’animation. Lors de la célébration du bicentenaire de la révolution française, Doudou Ndiaye Rose faisait partie des invités de marque. Vieux Sing a eu à former plusieurs générations de lutteurs et de musiciens. Toutefois, des gens comme Mbaye Dièye Faye sont en train de perpétuer le legs de leur père. C’est le cas également des fils de Doudou Ndiaye Rose.

Le sport populaire, c'est-à-dire la lutte et les « Navétanes », que vous connaissait si bien d’ailleurs, reste dominé par la violence. A votre avis, cela ne remet-il pas en cause les fondements de ces disciplines ?

La violence et le sport n’ont jamais fait bon ménage. Il faut que les acteurs apprennent à être plus responsables et à trouver un cadre de discussion pour mettre un terme à la violence. Je me rappelle, à l’époque où je jouais dans le « Réveil » de Saint-Louis, lorsque le Jaraaf, Gorée,  où « Le Foyer français » nous battaient, je rentrais tranquillement dans ma ville. Ce qui se passe actuellement dans le sport populaire n’est pas du tout normal. A notre époque, cette violence n’existait pas, pourtant nous avions de grands champions comme Abdourahmane, Talla, Babacar Diagne… Il arrivait même que le gouverneur général se déplace pour assister à certains combats de lutte. Toutefois, les choses commencent à changer.

Aujourd’hui, qu’est-ce que vous laissez à la nouvelle génération en héritage ? 

Actuellement beaucoup de gens viennent me voir afin que je leur raconte l’histoire contemporaine de notre pays. Je pense que cela peut constituer un héritage que je pourrais laisser à la postérité.

Pensez-vous que vos enfants seront en mesure de reprendre le flambeau ?

Je ne le pense pas. Mes enfants sont de grands intellectuels. Ils sont dans les banques et dans l’administration. Ils ont choisi un autre chemin, différent du mien. Pour terminer, j’invite le président de la République, Macky Sall, le gardien de la Constitution, l’homme des grands projets de l’Etat, le président de l’espoir… à appeler toutes les obédiences politiques à se réunir autour de l’essentiel. C’est ce que le président Senghor avait fait en appelant Lamine Guèye. Abdou Diouf l’a aussi fait en 1988 en tendant la main à l’opposition.

LESOLEIL




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