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Opinion

Edito de seneplus: L’Affrontement final Par Serigne Saliou Guèye


Samedi 6 Février 2016

Après avoir déstabilisé l’AFP, démantelé le PDS et anesthésié Tanor, Macky Sall martyrise Khalifa Sall, peut-être son futur concurrent à la prochaine présidentielle. Mais attention au retour de flamme


Il y a une quinzaine de jours dans ces mêmes colonnes, nous parlions d’un duel à fleurets mouchetés entre le maire de Dakar et le président de la République du Sénégal. Nous concluons en disant que «ce duel à fleurets de moins en moins mouchetés est en train de virer en Mortal Kombat, chacune des deux têtes d’affiche jouant de sa fine lame et surtout de sa capacité de nuisance». Eh bien les premières détonations qui donnent le signal de ce duel sanglant viennent de retentir avec la pluie de grenades qui s’est abattue sur les maires des collectivités locales de Dakar à la mythique place de l’indépendance.

En voulant se rendre à ce mythique lieu de la capitale pour examiner les premiers jalons du chantier du ministre du Renouveau urbain, Diène Farba Sarr, lequel a un projet de restructuration, les maires de Taxawu Dakar se sont heurtés aux forces de l’ordre qui ne leur ont pas permis de mettre pied aux chantiers. Ainsi le projet de rénovation de l’ancienne place Protêt de Khalifa Sall, estimé à 5 milliards de francs Cfa, se heurte à celui du président de la République via son homme-lige Diène Farba, évalué à seulement 300 millions de francs Cfa.

Il est de notoriété publique que ce bras de fer engagé par l’État contre Khalifa Sall a comme soubassement des motivations purement politiques pour ne pas dire politiciennes. Aujourd’hui, l’objectif principal du régime du Président Macky Sall est de retirer des mains de Khalifa Sall, Dakar qui polarise le 1/3 des électeurs du Sénégal. La capitale étant toujours un enjeu stratégique majeur dans la conquête du pouvoir, il devient impératif pour tout Président de se donner les moyens, fussent-ils machiavéliques, pour obtenir un second mandat.

Ainsi après l’Acte III de la Décentralisation qui affaiblit financièrement la mairie de Dakar, le blocage de l’emprunt obligataire de la mairie de Dakar sur le marché financier, la dislocation de l’Entité Cadak/Car et son dessaisissement de la gestion des ordures de Dakar, place maintenant au combat frontal entre le Président et le maire.

Il faut oser le dire : si les maires de Taxawu Dakar ont été violentés par la soldatesque du ministre de l’Intérieur, Abdoulaye Daouda Diallo, c’est parce que celle-ci a, à coup sûr, la bénédiction du premier magistrat de la République, Macky Sall. Mais dans ce duel mortifère, le grand perdant risque d’être le président de la République lui-même car les populations de Dakar qui ont porté ces maires au pouvoir local ne changeront de choix que lorsqu’elles auront jugé défaillante la mission pour laquelle elles ont jeté leur dévolu sur ces 17 maires de Taxawu Dakar.

En voulant combattre le maire de la capitale par un projet nommé «Dakar, ville verte» qui comprend plusieurs autres volets, le ministre Diène Farba part en guerre contre des moulins à vent. Malgré les propos manipulatoires, voire mensongers, de son conseiller technique Lamine Bara Gaye qui justifie le forcing de son patron par le pouvoir que leur offre le décret n°2014-875 du 22 juillet 2014, Diène Farba empiète dans le domaine de compétence du maire de la capitale.

Dans les attributions du maire de Dakar, il est dit que ce dernier «est chargé de veiller à la protection de l’environnement, de prendre en conséquence les mesures propres, d’une part, à empêcher ou à supprimer la pollution et les nuisances, d’autre part, à assurer la protection des espaces verts et, enfin, à contribuer à l’embellissement de la commune». Et dans celles du ministre du Renouveau urbain, il est dit que ce dernier, en sus de «mener une action concertée avec les collectivités locales en matière d’élaboration de plan d’urbanisme et d’espaces verts, est chargé de la planification urbaine sous réserve des compétences dévolues aux collectivités locales».

C’est une honte de voir un ministre de la République se crêper le chignon avec le maire de Dakar pour des travaux d’embellissement d’une place ou espace de la capitale. Le ministère du Renouveau urbain qui n’est que le clone du ministère de la Ville ferait mieux de s’occuper d’autre chose que du verdissement de la place de l’Indépendance.

En France, le ministère de la Ville que la droite considère comme un ministère inutile s’occupe de la rénovation urbaine au niveau des banlieues, des quartiers défavorisés en mal de lotissement, d’assainissement qui ont de réelles difficultés d’aménagement.

Le projet «Dakar, ville verte» de Diène Farba n’est pas une priorité pour les Sénégalais, qui attendent d’autres actions de son ministère. Nos banlieues souffrent d’une absence d’urbanisation et beaucoup de nos villes de l’intérieur connaissent de sérieux problèmes urbanistiques et architecturaux alors que, dans le programme du ministère de Diène Farba, rien n’est prévu pour pallier ces défaillances. Son patelin de Kaolack, comme d’autres gros villages comme Diourbel, Tambacounda, Louga, Kolda, Sédhiou, Kaffrine, Matam, voire Saint-Louis, avec ses vestiges coloniaux, qui est confronté à de sérieux problèmes d’urbanisation, accueillerait mieux les projets du ministère du Renouveau urbain.

Le Sénégal ne se limite pas à Dakar. Alors pourquoi vouloir se focaliser sur la capitale ? Ce combat par procuration que mène Diène Farba comme un fédayin avec ses projets risque de nuire, in fine, au président de la République plutôt que lui procurer quelques sympathies et adhésions électorales supplémentaires.

C’est honteux et ignoble de voir la police mater aveuglement des délégataires de pouvoir démocratiquement choisis par le peuple. Ces élus que l’on violente pour des raisons bassement politiciennes ont plus de légitimité que le ministre de l’Intérieur et son collègue du Renouveau urbain sursitaires à chaque conseil hebdomadaire des ministres.

Après avoir déstabilisé le parti de Moustapha Niasse, démantelé le Pds et humilié son chef Oumar Sarr, anesthésié Ousmane Tanor Dieng, maintenant le régime de Macky Sall martyrise le maire de la capitale, Khalifa Sall, peut-être futur concurrent du chef de l’Etat à la prochaine présidentielle. Mais attention au retour de flamme.

En janvier 2009, le président malgache Marc Ravalomanana avait entamé un bras de fer contre le jeune maire de la capitale Antananarivo, Andry Rajoelina. Cette situation avait débouché sur une véritable boucherie au mois de février. Et après une vive résistance du jeune édile et chef de l’opposition, Marc Ravalomanana est contraint à la démission le 17 mars 2009 à la suite à de manifestations populaires et après avoir été abandonné par l'armée. Et ce fut le sacre d’Andry Rajoelina. Un tel dénouement devrait servir de leçon à l’actuel président du Sénégal même s’il est inenvisageable une prise du pouvoir par des moyens non démocratiques.

En République, seul le dialogue prime. Mais malheureusement le pouvoir actuel n’entend entretenir avec ses adversaires politiques que des rapports basés sur la force administrative et physique
SENEPLUS




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