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Opinion

Du sens et du bon sens d'une décision: De qui se moque t-on? Par Ibe Niang Ardo, éditorialiste à Seneplus


Mercredi 29 Juin 2016

Il incarnait des cotre- valeurs. Il est incarcéré et, aujourd'hui, gracié un 23 juin par celui là même que nous avions élu, sur la base de la promesse de nous réconcilier avec nos valeurs. Qu'a donc fait ce peuple Sénégalais pour mériter cela ?



A propos de l'élargissement de Karim Wade de la prison de Rebeuss qui fait l'actualité ces derniers temps, il m'avait semblé bon d'attendre d'entendre les arguments du Président pour pouvoir me faire une opinion plus précise sur ses motivations qui semblent pour le moins surprenante. Karim et ses complices sont graciés, mais il est, dans le même temps, remis entre les mains d'un procureur général de la République du Qatar, qui l'a conduit illico presto à Doha. Qui aurait pu imaginer un tel scénario ?

Le bon sens est supposé être la vertu la plus commune des êtres humains que nous sommes. Nul n'accepte, sans rechigner, l'injure que l'on questionne son bon sens. Alors ce pourquoi il y a tant de controverses et passion autour de cette décision qui est contraire aux promesses faites ? Et puis rappelons que notre système judiciaire poursuit, juge et condamne uniquement des crimes, et jamais des individus en tant que tel.

Le crime quel qu'il soit est un fléau dans la nation et, chaque fois qu'il est perpétué en son sein, la société entière en est la victime. Quand le peuple élit à la magistrature suprême l'un de ses citoyens, c'est pour qu'il soit, entre autres, garant du bon fonctionnement et de l'efficience du système judiciaire. S'il y a quelqu'un qui doit bénéficier de la compassion du premier magistrat de l'Etat, c'est bien le peuple et non celui qui a été condamné pour crime par nos institutions compétentes.

Cela rend clairement l'argument de compassion du président Sall irrecevable pour ce peuple trahi, parce que fallacieux. Il faut donc aller rechercher la motivation de cette décision ailleurs que dans la magnanimité du chef de l'Etat.

D'autres argumentent autour du fait que la grâce est l'une des prérogatives régaliennes du président de la République et que Karim et ses complices y ont droit au même titre que les 7000 détenus qui en auraient déjà profité. Ne s'agit-il pas là d'un amalgame qui ressemble à s'y méprendre à de la fourberie ?

La nature du crime de Karim et ses complices est sans commune mesure avec ce que notre pays a connu jusque là. Si l'on prend le butin cumulé de tous les détenus condamnés pour vols ou détournements de deniers de nos 66 années d'indépendances, je doute fort qu'il n'atteigne les 10% des 138 milliards en jeu dans ce seul procès.

Au lieu de cela, au prétexte d'une tolérance coupable (masla tous azimuts), lui, le président, jadis chantre de la rupture, d'une justice sans discrimination, de la reddition des comptes et traque des biens mal acquis, a fini paradoxalement à défendre le principe d'une grâce présidentielle qui serait accessible à des crimes d'une ampleur sans précédent.

esressentons la nécessité d'un changement dans la façon de conduire les affaires publiques depuis des décennies, et ne cessons de l'exprimer de diverses manières.

Très tôt dans la décennie 80 à 90, les conditions objectives d'un changement se sont réunies et cela a aidé à ce que l'on s'engage dans un processus qui a abouti à deux alternances en l'espace de seize ans. Mais nous demeurons insatisfaits, convaincus d'avoir été bernés par tant de manœuvres politiciennes à répétition.

Et dans le même temps, les conditions de vie des populations se dégradent gravement dans la quasi indifférence des gouvernants. La désillusion gagne de l'espace et gare à celui qui a cru aux promesse du politicien à l'époque de ses campagnes électorales.

La manœuvre de ces politiciens est simple : créer les conditions d'un chaos en cherchant constamment à mettre les affaires publiques et privées sens dessus dessous de façon à être les seuls à pouvoir tirer leur épingle du jeu. Cette politique machiavélique s'emploie continuellement à saper nos valeurs et symboles. Il n'y a qu'à voir comment ils s'y sont pris pour faire en sorte que la date symbolique du 23 Juin coïncide désormais avec la libération de Karim, celle d'une confusion navrante d'événements particulièrement contradictoires.

Celui qui cinq ans auparavant incarnait le projet et les valeurs que le peuple abhorrait le plus et qui a fini par en être incarcéré, est gracié et relâché à la même date, par celui là même que nous avons élu, sur la base d'une promesse de nous réconcilier avec nos valeurs, de nous garantir la reddition des comptes et de ne protéger aucun délinquant. Qu'a donc fait ce peuple Sénégalais pour mériter cela ? Qui pouvait seulement imaginer en 2012 que cela se terminerait ainsi?





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