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Attentat à Charlie Hebdo : «J'étais juste devant lui quand il a fait irruption...» (un des rescapés raconte)

Vendredi 9 Janvier 2015

Grand reporter à « Charlie Hebdo », Laurent Léger se trouvait dans la salle de conférence au moment où le terroriste a ouvert le feu. Miraculé, il raconte cette scène de cauchemar.

Il est l'un des rescapés de l'attentat au sein de la rédaction de « Charlie Hebdo ». Laurent Léger, 48 ans, grand reporter chargé de l'investigation au sein de l'hebdomadaire, assistait à la conférence de rédaction rituelle du mercredi.

Bouleversé, la voix rauque et cassée par l'émotion, cet ancien journaliste au « Parisien » se confie à notre rédaction et raconte cette terrible matinée. « C'était la première conférence de l'année. Tout le monde était joyeux et en forme. Certains rentraient de congé. L'ambiance était presque euphorique. L'année s'annonçait bien pour le journal et déjà le programme était chargé, se souvient-il. On venait tout juste d'avoir un débat vif et animé sur le dernier ouvrage controversé de Michel Houellebecq. Cabu, toujours si discret lors de cette réunion, ne cachait pas sa déception et son mécontentement. Philippe Lançon, lui, estimait au contraire que c'était un beau livre. »

La conférence était sur le point de s'achever lorsque tous les interlocuteurs ont entendu comme des pétards dans la rue. « On n'y a pas prêté plus d'attention que cela. On était heureux de se retrouver », témoigne encore Laurent Léger. C'est alors que la porte de la salle de réunion s'est brusquement ouverte.

«J'étais déjà par terre et, par chance, il ne m'a pas vu»

« Un homme habillé en noir avec une combinaison comme en portent les policiers ou les gendarmes, a surgi juste derrière moi, poursuit-il. J'étais assis le dos à la porte d'entrée, me suis retourné. Il était grand, baraqué et avait dans les mains un fusil d'assaut ou tout au moins ce que j'ai pris pour une arme longue. On a tous cru à une blague. L'ambiance est restée joyeuse. Puis on a senti une forte odeur de poudre qui venait du couloir, on a tous compris que la plaisanterie n'en était pas une. »

L'homme en noir, qui portait un gilet pare-balles, a alors tiré tout de suite en criant « Allah Akbar », indique le journaliste. « J'étais juste devant lui quand il a fait irruption et je me suis jeté en arrière, je ne sais comment, avant de me réfugier dans une encoignure de la salle où une autre petite table était posée contre le mur. Le tireur arrosait toute la salle et visait ceux qui étaient encore réunis. Moi, j'étais déjà par terre, collé au sol contre cette autre petite table et, par chance, il ne m'a pas vu », raconte encore Laurent Léger, qui refuse d'entrer dans les détails de cette scène de guerre. « Je ne peux pas dire ce que j'ai vu. Tant de talents sont partis. Tous les dessinateurs sont tombés en une fraction de seconde. Le tireur, heureusement, n'a pas pu faire le tour de la salle, car elle était bien trop exiguë avec cette table immense au milieu. C'est sans doute pour cela qu'il n'a pas pu achever les survivants et les blessés », continue le reporter en forçant sa mémoire troublée par le choc.

«Personne ne pouvait imaginer cela en plein Paris»

« Le tireur a repris alors le chemin du couloir. Je me souviens aussi du silence dans la salle qui a suivi son départ. Un terrible silence. J'étais tétanisé, comme figé sous la table. Terrorisé. J'étais recroquevillé dans ce coin. C'est sans doute ce qui m'a sauvé. C'était irréel... » Il reprend : « En partant dans le couloir, il a croisé une femme affolée et je l'ai entendu lui dire en français : Nous, on ne tue pas les femmes. Pourtant, il en a bien tué une dans la salle, notre collaboratrice Elsa Cayat. Puis on a encore entendu que ça pétaradait », glisse cet investigateur chevronné dans les affaires financières.

« On s'est alors mis à errer dans les couloirs, aidant les uns les autres à se relever. Pour d'autres, il n'y avait plus rien à faire. Personne n'y croyait. Ça l'est toujours pour moi d'ailleurs. Notre bureau est devenu un fait divers. Personne ne pouvait imaginer cela en plein Paris, dans le XIe arrondissement, dans une salle de rédaction où l'on débat des sujets du monde. Pour nous, la barbarie était en Syrie, elle nous a rattrapés en plein Paris ce mercredi. On avait fait face à toutes les menaces dans le passé. On avait tout surmonté... » analyse celui qui se décrit comme un survivant. Incapable de trouver le numéro des secours, c'est un ami proche qu'il a appelé pour lui demander de prévenir la police du carnage. Il a été pris en charge par les enquêteurs de la brigade criminelle, dont il tient à saluer le professionnalisme et la qualité de la prise en charge.

Pour tenter de faire face au traumatisme indélébile de cette tuerie, Laurent s'accroche coûte que coûte à la réalisation du prochain numéro de « Charlie ». « On va tout faire pour le sortir. Mais il y en a tant qui sont morts... Tous nos dessinateurs, l'âme du journal, ne sont plus là. » Moralement ébranlé, il refuse de « jeter l'anathème sur les musulmans, car cet acte n'est en rien un acte de foi mais bien un acte terroriste gratuit »

LEPARISIEN


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