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Abdoulaye Ndiaye, enseignant en Télévision au Cesti, ancien journaliste-présentateur à la Rts: "Il faut dépasser la télévision du mannequinat et du comique"


Samedi 23 Janvier 2016

Abdoulaye Ndiaye, enseignant en Télévision au Cesti, ancien journaliste-présentateur à la Rts: "Il faut dépasser la télévision du mannequinat et du comique"

Quelle différence peut-il y avoir entre un présentateur de télé, un animateur et un journaliste ?

La télévision est un milieu ouvert. On peut y faire cohabiter des personnes aux pratiques et aptitudes professionnelles pouvant permettre ensemble de faire une bonne télévision. Des artistes y remplissent des fonctions d’animateurs, de saltimbanques et d’amuseurs publics. Tout cela contribue à faire du programme. Reste qu’au niveau de la pyramide des meilleurs profils, le journaliste est au-dessus.

Il a été formé à l’école de la pratique d’un métier, celui d’occuper l’espace-information, l’animateur devant divertir. Il faut à cet effet faire la différence entre journaliste-présentateur et animateur. Le premier, en plus d’avoir appris l’exercice doit avoir de bonnes prédispositions car il fait l’intermédiation en déroulant un travail de groupe. Sans les éléments dynamiques d’une actualité à travers des reportages, il ne peut y avoir de journal télévisé ni de présentateur qui accroche son public.

Quelle lecture faites-vous des programmes télévisés actuels ?

Il y a un problème au niveau des programmes. La plupart de nos télévisions font dans le programme en flux. Un travail en studio avec sur les plateaux des personnes qui divertissent à longueur de journée. Certaines thématiques développées ne sont pas souvent télévisuelles. C’est une pratique de radio transposé à la télévision. On y parle beaucoup et on se congratule.

Ce sont des émissions arbres à palabres, dans une bonne partie des télévisions. On ne peut pas se permettre d’être, du matin au soir, dans une posture de quelqu’un qui fait une antenne avec tout ce que cela a comme coût, comme moyens, sur une émission qui ne donne pas à voir. En dehors des espaces politiques de débats démocratiques, on gagnerait à réduire ces genres d’émissions qui ont un coût et qui ne sont pas rationnalisées.

Pourtant, le public apprécie visiblement ce type de programmes.

Aucune étude ne prouve cela. Il ne faut pas faire croire que le public n’est pas intelligent. Loin d’imposer un diktat, le public ne prend que l’offre qu’on lui propose. L’uniformisation des offres ne lui laisse pas beaucoup de choix.

Le public vit un environnement de concurrence télévisuelle où prédominent danse et musique. L’art doit avoir sa place dans les programmes certes. Mais il doit l’être dans sa forme diversifiée et même fonctionnelle. Du théâtre au cinéma en passant par les autres expressions et ne point se limiter au binôme musique/danse.

L’aspect folklorique semble prendre le dessus sur les scènes. Pourquoi, selon vous ?

Le Sénégal est une société orale ; il nous faut éviter de transposer à la télévision rien que des tares et des contradictions. Il y a pourtant des limites à ne pas franchir dans l’utilisation d’un instrument aussi puissant que la télévision.

Les mannequins sont également de plus en plus présents dans les médias. Faut-il être télégénique pour faire de la télévision ?

Pendant longtemps le concept de télégénie a permis d’établir le choix de paraître à la télévision. Cela voulait dire pour beaucoup une belle physionomie, une bonne présence qui permette de bien passer à l’antenne. C’était l’époque de l’approche séduction en télévision.

Aujourd’hui, un visage plaisant ne suffit plus pour faire de la télévision. Il faut y ajouter une dose de compétence et d’intelligence professionnelles pour tous les corps de métier en télévision.

On note de plus en plus la reconversion des mannequins en personnages de télévision. Cela ne vous inquiètet-il pas ?

La reconversion est possible. Il faut éviter toutefois le surnombre de personnes qui ne remplissent aucun critère et n’ont aucun talent pour pratiquer ce métier. On semble beaucoup en compter dans le milieu. Cela ne contribue pas à apporter de la qualité dans l’offre télévisuelle.

Certains n’ont qu’un art rudimentaire qui ne permet pas aux gens qui regardent de pouvoir en tirer profit. On a souvent des animatrices avec un niveau zéro en culture d’où la nécessité d’aller se faire former.

Que faudrait-il faire pour améliorer les programmes des télévisions ?

La télévision montre et démontre. Ce sont des reportages qui dépaysent avec des images venues d’ailleurs. C’est l’émission ludique, c’est le divertissement. La télévision devrait permettre au public de pouvoir apprécier ce qui se passe ailleurs et de ne pas se limiter à des personnes, qui font une sorte de causerie permanente. L’espace information, doit être réhabilité. Il doit y avoir des horaires fixes des rendez-vous de grands magazines, de reportages, d’enquêtes, de documentaires qui instruisent et apportent des connaissances nouvelles au public.

Cela passe par des programmes en stock bien élaborés. Le défi numérique se relève à travers de bonnes programmations. Ceci est de la responsabilité des acteurs de télévision. Il faut dépasser la télévision du mannequinat, la télévision du comique qui n’apportent pas grand chose. Réduire la fonction du support à un espace de dissertation, de chants et de danses en permanence c’est limiter son rôle et ses possibilités dans l’évolution de nos sociétés.
LEQUOTIDIEN




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